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Élections en Russie : sans passion, le parti pro-Kremlin grand favori


Le Premier ministre russe Dmitry Medvedev vote à Moscou, ce dimanche 18 septembre. (photo AFP)

Plus de 110 millions de Russes votent dimanche pour des législatives que le parti pro-Kremlin au pouvoir devrait remporter sans surprise, à l’issue d’une campagne électorale apathique dans ce pays frappé par la récession économique.

Les premiers bureaux de vote ont ouvert samedi à 22h (heure du Luxembourg) sur la péninsule volcanique du Kamtchatka, dans l’Extrême Orient russe mais — immensité du pays et onze fuseaux horaires obligent — la majorité des électeurs ont commencé à se rendre aux urnes à partir de 7h dimanche dans la partie européenne du pays, notamment à Moscou et Saint-Pétersbourg.

Les premiers sondages sortie des urnes sont attendus après la clôture du vote à 20h à Kaliningrad, enclave russe au cœur de l’Union européenne.

À 9h, la participation au niveau national s’élevait à plus de 10%, selon la commission électorale centrale.

« La campagne électorale était inintéressante. Ils promettent tous beaucoup, mais rien ne change », regrette Alexandre après avoir voté à Moscou, retraité, qui assure être venu malgré tout au bureau de vote pour que « les autres ne choisissent pas » à sa place.

A Saint-Pétersbourg, Dmitri Pribytkov, 47 ans, évoque, lui, un scrutin « absolument prévisible ». « C’est mon pays, et je dois donner mon avis. Au moins, on me le demande — formellement, en tout cas », ajoute-t-il.

Ces élections se déroulent alors que le pays traverse une profonde crise économique. La chute du prix des hydrocarbures, qui représentent une part importante des revenus budgétaires, et les sanctions occidentales décrétées à la suite de la crise ukrainienne ont provoqué la plus longue période de récession depuis l’entrée en scène politique de Vladimir Poutine en 1999.

Le scrutin intervient par ailleurs dans un contexte politique exceptionnel: il s’agit de la première consultation à l’échelle nationale depuis l’annexion de la péninsule ukrainienne de Crimée, le déclenchement du conflit dans l’Est séparatiste prorusse de l’Ukraine et la pire dégradation dans les relations avec les Occidentaux depuis la fin de la Guerre froide.

Il fera office de test en Crimée, où les habitants participent pour la première fois à une élection russe.

Ces législatives où plus de 6.500 candidats issus de 14 partis sont en compétition pour 450 sièges à la Douma d’Etat, chambre basse du parlement, vient en outre après près d’un an d’une intervention militaire inédite en Syrie qui a fait de la Russie le maître du jeu dans le conflit.

Les électeurs devront également renouveler certains parlements régionaux et élire leurs gouverneurs. A ce titre, le président tchétchène Ramzan Kadyrov devra pour la première fois faire face aux électeurs depuis sa nomination à ce poste par le Kremlin en 2007.

« La campagne la plus molle »

Vladimir Poutine, fort d’une popularité record d’environ 80%, notamment en raison du rattachement de la Crimée largement salué par les Russes, et son parti Russie Unie, qui domine actuellement la Douma, peuvent envisager ce scrutin sereinement, assurés d’une victoire qui mettrait le président russe sur les rails d’un éventuel 4e mandat, s’il décidait à se représenter à la présidentielle de 2018.

Contrairement aux élections législatives de septembre 2011, dénoncées comme frauduleuses par des centaines de milliers de manifestants descendus dans la rue, le Kremlin semble cette fois vouloir donner au processus électoral plus de transparence.

Le président russe a ainsi placé à la tête de la commission électorale centrale l’ex-déléguée aux droits de l’homme auprès du Kremlin, Ella Pamfilova, pour remplacer Vladimir Tchourov, accusé par l’opposition d’avoir manipulé les résultats de plusieurs élections.

Dimanche matin, Mme Pamfilova a indiqué qu’elle avait eu écho de soupçons de fraudes à Barnaoul en Sibérie, et que la commission électorale centrale « pourrait réfléchir à annuler les élections » dans la région si celles-ci étaient confirmées.

Dans la majorité des régions russes, « tout se déroule normalement », a-t-elle ajouté.

Le scrutin, où la moitié des députés seront pour la première fois élus au suffrage majoritaire, n’a toutefois suscité que peu d’engouement en Russie.

L’ONG de défense des droits des électeurs Golos a ainsi dénoncé dans son rapport « la campagne électorale la plus molle et la moins active de ces 10 dernières années ».

L’opposition libérale, qui a cette fois eu l’occasion de présenter beaucoup plus de candidats que lors du scrutin précédent en 2011 et de diffuser ses clips de campagne à la télévision, a échoué à surmonter ses querelles internes et n’a pu présenter une liste commune.

Face à l’immense machine du pouvoir, les opposants qui avancent en ordre dispersé ont eu du mal à susciter l’enthousiasme des électeurs, davantage tentés de voter pour les candidats « du pouvoir en place » ou par l’abstention.

Le Quotidien / AFP