Les Grecs ont délivré hier un message sans appel à leur gouvernement en donnant la victoire à Syriza, le parti de gauche radicale d’Alexis Tsipras, pour qui « le peuple grec a écrit l’histoire ».
Explosion de joie au QG de campagne de Syriza hier soir à Athènes après l’annonce des premiers résultats. (Photos : AFP)
« Cela semble être une victoire historique » et c’est « un message qui n’affecte pas seulement les Grecs mais qui résonne dans toute l’Europe », a aussitôt déclaré Panos Skourletis, le porte-parole de Syriza. La victoire a été saluée par une explosion de joie au QG de campagne de Syriza, une tente dressée dans le centre-ville d’Athènes. Des centaines de personnes, venues de toute l’Europe, ont chanté Bella Ciao, agité des drapeaux. Certaines pleuraient.
Le scrutin était attendu anxieusement par les partenaires européens d’Athènes, inquiets de la volonté de Syriza de « fermement » renégocier l’énorme dette grecque et défier de manière inédite les programmes d’austérité imposée par l’Union européenne. La première réaction d’un des principaux économistes de Syriza, Yannis Milios, hier soir, était claire. Il a lancé que le « programme (représenté par l’actuel ministre des Finances Guikas Hardouvelis) est mort ».
Les analystes de la banque allemande Berenberg ont évoqué « une victoire de la colère sur la peur, de l’imaginaire sur la raison ». Ils ont décrit Tsipras comme « un insurgé populiste ». Mais l’Europe « ne lui épargnera pas d’accepter la réalité : on ne peut pas dépenser un argent qu’on n’a pas », ont-ils souligné. Le quotidien allemand Bild titrait de son côté dans son édition d’aujourd’hui : « Peur sur l’euro, Tsipras triomphe. »
> « Les démunis n’ont rien à perdre »
En Italie, Sandro Gozi, secrétaire d’État aux Affaires européennes, a pris acte de la victoire de Syriza. « Nous pensons qu’après ce vote nous aurons de nouvelles opportunités pour poursuivre le changement en Europe en faveur de la croissance, des investissements et de la lutte contre le chômage. »
Le succès de Syriza, s’il est confirmé, va donner en revanche un grand espoir aux autres formations de gauche radicale en Europe. En France, le leader du Parti de gauche, Jean-Luc Mélenchon, a évoqué « une lame de fond », « une page nouvelle pour l’Europe ».
Le gouvernement de Samaras a été sanctionné pour avoir essayé de satisfaire au maximum les exigences de réformes de la troïka des créanciers d’Athènes (Banque centrale européenne BCE, UE, FMI), en échange de 240 milliards d’euros prêtés au pays depuis 2010. En effet, la facture est lourde pour la population victime d’un taux de chômage à 25 % ou de réductions de salaires drastiques.
Alexis Tsipras, qui souhaite mettre en vigueur des mesures immédiates comme une remontée du salaire minimum de 580 à 751 euros, a déjà prévenu qu’il ne se contenterait pas d’un simple aménagement de la dette (175 % du PIB, plus de 300 milliards d’euros). Prenant exemple sur des concessions faites après la guerre à l’Allemagne – aujourd’hui chantre de l’orthodoxie budgétaire en Europe – il veut une importante réduction du principal de cette dette. Les marchés financiers risquent de ne pas apprécier, même si personne, pas même Tsipras, ne souhaite voir revenir le spectre du « Grexit », une sortie de la Grèce de la Zone euro.
Dans un bureau de vote du Pirée, Vaïa Katsarou, 49 ans, avocate, résumait le sentiment général vis-à-vis de Syriza : « C’est un risque mais les démunis n’ont rien à perdre. »
Le Quotidien (avec AFP)