De premiers otages enlevés par le Hamas sur le sol israélien et emmenés dans la bande de Gaza ont été libérés vendredi aux termes de l’accord négocié notamment par le Qatar, quelques heures après l’entrée en vigueur d’une trêve entre Israël et le mouvement islamiste palestinien.
Cette trêve offre un répit aux habitants de la bande de Gaza, assiégée et bombardée depuis le 7 octobre par l’armée israélienne, pour la première fois en sept semaines de guerre.
Le Qatar, médiateur clé avec l’Égypte et les États-Unis, avait obtenu mercredi un accord portant sur une trêve renouvelable de quatre jours pendant lesquels 50 otages retenus à Gaza doivent être libérés de même que 150 Palestiniens détenus en Israël.
Des otages israéliens ainsi que des Thaïlandais ont été libérés vendredi, selon des sources proches du mouvement islamiste.
Deux sources proches du Hamas ont affirmé que des otages avaient été remis dans la bande de Gaza au Comité international de la Croix-Rouge (CICR), en vue de leur retour en Israël. La Thaïlande a également annoncé que 12 de ses ressortissants retenus en otages avaient été libérés par le Hamas.
Un total de 24 otages, 13 Israéliens, dix Thaïlandais et un Philippin, ont été remis vendredi au Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à Gaza par le Hamas, tandis qu’Israël a libéré 39 femmes et enfants détenus dans ses prisons, selon le ministère qatarien des Affaires étrangères.
« Parmi les personnes libérées figurent 13 citoyens israéliens, dont certains ont la double nationalité, ainsi que 10 citoyens thaïlandais et un citoyen philippin », a déclaré le porte-parole du ministère, Majed Al-Ansari, sur X (anciennement Twitter).
Il a ajouté que « 39 femmes et enfants détenus dans les prisons israéliennes » avaient également été libérés dans le cadre d’un accord d’échange d’otages capturés par le mouvement islamiste Hamas le 7 octobre contre des prisonniers palestiniens.
La guerre a été déclenchée par l’attaque sanglante sans précédent menée le 7 octobre par le Hamas sur le sol israélien.
En représailles, Israël a bombardé sans relâche le territoire palestinien, placé en état de siège, et y a lancé le 27 octobre une offensive terrestre afin « d’éliminer » le Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza depuis 2007.
L’armée israélienne estime qu’environ 240 personnes ont été enlevées par le Hamas le 7 octobre puis emmenées à Gaza, et le Premier ministre Benjamin Netanyahu faisait de leur libération un préalable à tout cessez-le-feu.
Mais les ONG internationales, l’ONU et de nombreuses capitales étrangères ne cessaient de réclamer une pause dans les combats ou un cessez-le-feu, afin notamment d’acheminer de l’aide d’urgence à la population qui survit dans des conditions humanitaires désastreuses.
La « pause humanitaire » est entrée en vigueur à 6 h et le Qatar avait indiqué jeudi qu’un premier groupe de 13 femmes et enfants devaient être « libérés aux alentours de 15 h ».
À la mi-journée, une liste de 39 noms de prisonniers palestiniens, 15 enfants et 24 femmes, libérables en échange des otages, a été diffusée par la Commission chargée des prisonniers au sein de l’Autorité palestinienne.
Le CICR « recevra les otages un par un, ou par groupes, leur fera passer la frontière » avec l’Égypte au point de passage de Rafah puis « les confiera aux forces israéliennes », a indiqué Ziv Agmon, conseiller chargé du dossier auprès du bureau du Premier ministre, au centre de presse installé à Tel-Aviv pour suivre cette opération.
Selon une source sécuritaire égyptienne, les otages doivent ensuite partir pour Israël depuis l’aéroport égyptien d’al-Arich, dans le nord du Sinaï. Une information non confirmée côté israélien.
Enfin, « ils seront réunis avec leurs familles après leur arrivée » dans un hôpital israélien, a indiqué Ziv Agmon.
« Je pleure, je ris »
À Jérusalem-Est occupée, la Palestinienne Samira Douayyat a évoqué la possible libération de sa fille Shourouk, 26 ans, qui aura purgé la moitié de sa peine de 16 ans de prison. « Je pleure, je ris, je tremble », dit-elle.
Israël a diffusé une liste de 300 Palestiniens susceptibles d’être libérés au total si la trêve est prolongée, comptant 33 femmes et 267 jeunes de moins de 19 ans. Parmi ces détenus, 49 sont membres du Hamas.
« Nous avons posé comme condition que (…) les prisonniers femmes et enfants palestiniens » soient libérés « par ordre d’ancienneté » en détention, a déclaré Bassem Naïm, un haut cadre du Hamas.
Aux premières lueurs du jour, alors que les frappes aériennes incessantes depuis près de 50 jours jours s’étaient tues, comme les tirs de roquettes vers Israël à partir de Gaza, des dizaines de milliers de Palestiniens dans le sud de la bande de Gaza avaient déjà réuni leurs effets personnels pour repartir vers leurs villages.
Omar Jibrine, 16 ans, avait trouvé refuge avec huit autres membres de sa famille à l’hôpital Nasser, dans la ville Khan Younès.
Un quart d’heure avant même l’entrée en vigueur de la trêve, il a pris la route vers son village à quelques kilomètres de là : « Je rentre à la maison », dit-il.
Mais alors que voitures et carrioles se mettaient en branle, des tracts en arabe lancés depuis les airs par l’armée israélienne prévenaient : « La guerre n’est pas encore finie ».
« Revenir dans le nord est interdit », affirmaient les tracts.
L’armée israélienne considère le nord de la bande de Gaza, d’où ont fui des centaines de milliers de Palestiniens vers le sud, comme une zone de combat, affirmant que cette partie du territoire, où se trouve la ville de Gaza, abrite le centre des infrastructures du Hamas.
La communauté internationale a salué l’accord de trêve, y voyant un premier pas vers un éventuel cessez-le-feu durable.
« Prochaines phases »
Au terme de cette trêve, le gouvernement israélien et l’armée se sont engagés à « poursuivre » les combats contre le Hamas, classé organisation terroriste par Israël, les États-Unis, son principal allié, et l’Union européenne.
« Prendre le contrôle du nord de la bande de Gaza est la première étape d’une longue guerre et nous nous préparons pour les prochaines phases », a déclaré le porte-parole de l’armée, Daniel Hagari.
Le chef du Hamas en exil au Qatar, Ismaïl Haniyeh, a affirmé vendredi que « l’ennemi a fait le pari de récupérer les otages grâce au canon de ses fusils, aux tueries et au génocide » mais « qu’après 50 jours de crimes et d’horreur, l’ennemi a dû se plier aux conditions de la résistance (NDLR : le Hamas) ».
« Le Hamas réaffirme son engagement à l’accord » sur la trêve et l’échange, « tant que l’ennemi s’y tient », a-t-il ajouté.
Selon les autorités israéliennes, 1.200 personnes, en grande majorité des civils, ont été tuées lors de l’attaque menée par le Hamas contre Israël.
En représailles, Israël a bombardé sans relâche la bande de Gaza, où 14.854 personnes, parmi lesquelles 6.150 enfants, ont été tuées, selon le gouvernement du Hamas.
Entrée de camions humanitaires
Israël a aussi placé depuis le 9 octobre le petit territoire, déjà soumis à un blocus israélien depuis 2007, en état de « siège complet », coupant les livraisons d’électricité, d’eau, de nourriture, de médicaments et de carburant.
L’aide internationale, dont l’entrée est soumise au feu vert d’Israël, arrive au compte-gouttes via l’Égypte.
La trêve doit permettre l’entrée d’un plus grand nombre de convois d’aide dans le petit territoire surpeuplé, où, selon l’ONU, 1,7 million des 2,4 millions d’habitants ont été déplacés par la guerre.
Vendredi, « trois camions transportant 150 000 litres de carburant et quatre camions de gaz sont entrés » dans la bande de Gaza via Rafah, « soit 84 tonnes », a déclaré Waël Abou Omar, le directeur de la communication du point de passage de Rafah, côté palestinien.
En outre, un total de 230 camions contenant de l’aide alimentaire doit entrer dans la journée.
Selon l’agence de l’ONU pour les réfugiés palestiniens (Unrwa), 160 000 litres de carburant sont nécessaires chaque jour pour assurer « uniquement les opérations humanitaires de base ».
Cette aide est destinée seulement au sud de la bande de Gaza et elle est remise à l’ONU et au Croissant-Rouge, ont précisé des responsables.
Mais la trêve reste « insuffisante » pour faire entrer l’aide nécessaire, ont souligné des ONG internationales, réclamant un véritable cessez-le-feu.