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Des milliers de migrants massés à la frontière polonaise, Varsovie craint l’escalade


Le porte-parole du gouvernement polonais Piotr Muller a déclaré à la presse qu'au total 3.000 à 4.000 migrants s'étaient massés près de la frontière. (Photo : AFP)

La Pologne s’est inquiétée lundi d’une escalade à sa frontière avec le Bélarus, aux confins de l’Union européenne, où des milliers de migrants sont massés, les Occidentaux dénonçant une tactique « inacceptable » de Minsk.

« Les forces du ministère de l’Intérieur et des soldats ont réussi à stopper la première tentative de passer la frontière en masse », a assuré sur Twitter le ministre polonais de la Défense. « Les migrants ont installé un camp dans les environs de Kuznica. Ils sont gardés en permanence par les services bélarusses », a-t-il ajouté.

La police aux frontières polonaise a diffusé des vidéos sur Twitter montrant des migrants, principalement originaires du Moyen-Orient, munis de cutters et de branches pour essayer de forcer le passage de la frontière, hérissée de barbelés coupants, tandis que des policiers polonais en tenue antiémeute veillaient au grain.

Le porte-parole du gouvernement polonais Piotr Muller a déclaré à la presse qu’au total 3.000 à 4.000 migrants s’étaient massés près de la frontière. « Nous craignons qu’il ne puisse y avoir une escalade de ce type d’actions à la frontière polonaise dans un avenir proche et de nature armée », a ajouté M. Muller, accusant à nouveau des personnes « liées aux services secrets bélarusses » d’être derrière ces tentatives de passage illégal de migrants.

A Varsovie, une cellule de crise gouvernementale, à laquelle participent le Premier ministre Mateusz Morawiecki, ainsi que les ministres de l’Intérieur et de la Défense, s’est réunie en début d’après-midi. « Nous nous préparons à tous les scénarios », a écrit sur Twitter le ministre de l’Intérieur Mariusz Kaminski.

Colère des Occidentaux

Bruxelles a accusé le président bélarusse Alexandre Loukachenko d’orchestrer l’arrivée de cette vague de migrants et de réfugiés en réponse aux sanctions européennes décidées après la répression brutale dont l’opposition a été la victime. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a à cet égard appelé lundi les Etats membres de l’UE à donner leur vert à de nouvelles sanctions.

« L’instrumentalisation des migrants dans un but politique est inacceptable », a-t-elle jugé dans un communiqué. Outre une extension des sanctions contre le régime de Minsk, elle souligne que l’Union européenne « va examiner comment sanctionner les compagnies aériennes de pays tiers » qui acheminent les migrants au Bélarus.

Réaction similaire des Etats-Unis qui « condamnent fermement l’exploitation politique et la manipulation de personnes vulnérables par le régime » bélarusse, par la voix du porte-parole de la diplomatie américaine, Ned Price. « L’utilisation des migrants par le régime Loukachenko en tant que tactique hybride est inacceptable », a également mis en garde l’Otan, appelant le Bélarus à « respecter le droit international ».

De son côté, l’Allemagne a appelé mardi l’Union européenne à « faire front commun » pour parer à la situation, assurant par la voix de son ministre de l’Intérieur, Horst Seehofer, que « la Pologne ou l’Allemagne ne peuvent pas faire face à ceci toutes seules ». « Nous devons aider le gouvernement polonais à sécuriser sa frontière extérieure. Cela devrait être l’affaire de la Commission européenne. Je l’appelle maintenant à prendre des mesures », a-t-il insisté.

« Rien d’agressif »

Ces accusations ont été balayées par les autorités bélarusses. « Tous ces gens, dont des femmes et des enfants, ne présentent aucune menace pour la sécurité et n’ont rien d’agressif », a rétorqué un responsable des garde-frontières bélarusses, Anton Bychkovsky. Les garde-frontières bélarusses avaient auparavant confirmé dans un communiqué qu' »un grand groupe de réfugiés transportant des effets personnels se (déplaçait) le long de l’autoroute vers la frontière avec la Pologne ». « Selon ces réfugiés, ils se sont rassemblés pour former un groupe assez large pour empêcher leur expulsion forcée par la Pologne et attirer l’attention de la communauté internationale sur le non-respect des droits de l’homme en Pologne », a ajouté M. Bychovsky.

Des médias polonais ont cependant diffusé des interviews de migrants contredisant cette version et expliquant que les Bélarusses les forcent à franchir la frontière. Des dizaines de vidéos diffusées sur les réseaux sociaux lundi montraient des groupes de centaines de personnes, portant des vêtements chauds et des sacs à dos, marchant le long d’une route.

Selon une géolocalisation faite par le service de fact-checking de l’AFP, une des vidéos a été prise à Bruzgi au Bélarus, à 1,2 km de la frontière avec la Pologne. La cheffe de l’opposition bélarusse Svetlana Tikhanovskaïa en a appelé à ce sujet sur Twitter au Conseil de sécurité de l’ONU.

La situation se détériore depuis fin août et a poussé la Pologne à ériger une clôture de barbelés et à instaurer un état d’urgence empêchant la présence de médias dans la zone, en plus de masser des milliers de soldats. Au moins dix migrants sont morts jusqu’à présent dans la région, dont sept du côté polonais de la frontière, selon le quotidien polonais Gazeta Wyborcza.

LQ/AFP