Enferrés dans un encombrant scandale financier, les conservateurs allemands de la chancelière Angela Merkel pourraient encaisser dimanche une lourde défaite lors de deux élections régionales particulièrement scrutées à six mois des législatives.
L’Union chrétienne-démocrate (CDU) est donnée perdante dans les deux régions du sud-ouest, le Bade-Wurtemberg et la Rhénanie-Palatinat, où près de 11 millions d’électeurs sont appelés à renouveler leur parlement régional.
Les révélations en cascade autour de ladite « affaire des masques » et les critiques croissantes sur la gestion de la crise sanitaire risquent de provoquer des dégâts pour le parti de la chancelière.
Les premières estimations sont attendues au moment de la fermeture des bureaux de vote à 18h.
La CDU traverse « sa plus grave crise » depuis le scandale des caisses noires qui avait précipité la chute d’Helmut Kohl à la fin des années 90, estiment de nombreux commentateurs. Cette fois, ce sont notamment des soupçons de commissions perçues par des députés dans des contrats d’achats de masques, au début de l’épidémie, qui écornent l’image de la majorité.
Verts gagnants
Dans le Bade-Wurtemberg, bastion conservateur jusqu’en 2011, la CDU est créditée de 23 à 25% des voix et pourrait ainsi enregistrer le pire score de son histoire.
Les Verts, aux commandes depuis une décennie de ce Land prospère, coeur de l’industrie automobile, sont donnés largement gagnants.
Leur victoire offrirait un troisième mandat à Winfried Kretschmann, 72 ans, seul écologiste à diriger une région allemande. La coalition avec la CDU qu’il dirige depuis cinq ans est parfois perçue comme le laboratoire d’une possible alliance nationale entre ces deux partis à l’issue des législatives du 26 septembre.
Dans le Land de Rhénanie-Palatinat, voisin de la France, de la Belgique et du Luxembourg, les choses ne s’annoncent guère mieux pour le parti de la chancelière.
Après avoir caressé l’idée de mettre un terme à trois décennies de domination social-démocrate, la CDU est au coude à coude avec le SPD et la dirigeante sortante de la région, Malu Dreyer, pourrait bien être reconduite.
Quant à l’extrême-droite de l’Alternative pour l’Allemagne (AfD), en baisse au niveau national, elle devrait essuyer un recul dans les deux Länder.
En raison des contraintes sanitaires liées au coronavirus, le nombre de votes par correspondance devrait être particulièrement élevé cette année.
Fatigue des restrictions
Angela Merkel, qui espérait quitter le pouvoir au sommet de sa popularité, voit ses plans contrariés par les difficultés touchant la CDU et son allié bavarois CSU.
Deux députés, Georg Nüsslein (CSU) et Nikolas Löbel (CDU), ont dû quitter ces derniers jours leurs partis respectifs, suspectés de s’être enrichis à la faveur de l’épidémie en servant d’intermédiaires avec des fabricants dans l’achat de masques anti-Covid par les autorités.
Dans une controverse distincte, l’élu conservateur Mark Hauptmann a renoncé jeudi à son mandat de député après avoir été mis en cause pour des encarts publicitaires de l’Azerbaïdjan dans un journal régional qu’il dirige.
Des parlementaires CDU ont déjà été soupçonnés dans le passé d’avoir perçu de l’argent de ce pays riche en hydrocarbures. L’un d’eux a vu récemment son immunité levée.
Dans une tentative d’éteindre l’incendie, la CDU et la CSU avaient donné jusqu’à vendredi soir à leurs parlementaires pour déclarer d’éventuels gains financiers tirés de l’épidémie.
La polémique tombe aussi au pire moment pour le camp conservateur qui doit désigner prochainement son candidat à la chancellerie.
Armin Laschet, fraîchement élu à la tête de la CDU, se verrait bien mener la campagne électorale mais le patron de la Bavière Markus Söder pourrait partager la même ambition.
« L’affaire des masques » passe d’autant plus mal que des millions d’Allemands, un an après le début de la pandémie, sont las des restrictions en place et semblent douter de la stratégie du gouvernement.
Depuis le début de l’année, les conservateurs ont largement perdu leur image de gestionnaire efficace de la crise épidémique et de ses conséquences économiques.
Les difficultés d’approvisionnement en vaccins contre le Covid-19 n’ont fait qu’accentuer le mécontentement, sur fond de remontée des contaminations ces derniers jours. Les autorités sanitaires ne cachent d’ailleurs plus leur inquiétude face au « début d’une troisième vague ».
AFP