L’UE « risque de rater » ses objectifs en matière de valorisation des déchets d’équipements électriques et électroniques, a prévenu jeudi la Cour des comptes européenne, appelant à durcir les contrôles contre les « activités criminelles » et transferts illicites hors d’Europe.
Depuis 2019, le taux de collecte minimal de ces déchets à atteindre par les États de l’UE est fixé soit à 65% du poids moyen des équipements électriques et électroniques commercialisés au cours des trois années précédentes, soit à 85% des déchets électriques et électroniques générés dans le pays. « En réalité, seuls deux États semblent bien placés pour atteindre les objectifs de collecte fixés pour 2019 », année pour laquelle les statistiques doivent encore être publiées, a déploré dans son rapport la Cour des comptes de l’UE, sans nommer ces deux pays.
« L’Europe recycle actuellement environ 80% des e-déchets qu’elle collecte. La collecte, le recyclage et le réemploi des déchets électroniques n’avancent pas au même rythme dans tous les États », a déploré Joëlle Elvinger, responsable de l’étude, appelant à « accélérer la cadence ». Ce « document d’analyse », publié avant l’élaboration fin 2021 d’une « initiative d’économie circulaire » par la Commission européenne, propose de mieux appliquer les exigences existantes en matière de traitement.
« Une gestion parfois peu scrupuleuse »
Les e-déchets (outils électriques, appareils ménagers, panneaux photovoltaïques…) contiennent à la fois des composants dangereux et des matières recyclables, métaux et plastiques, rappelle le rapport, soulignant qu’une tonne de smartphones « contient cent fois plus d’or qu’une tonne de minerai d’or ». Pour autant, les auditeurs épinglent « une gestion parfois peu scrupuleuse », par exemple l’extraction sans précaution de substances toxiques ou l’accumulation sans traitement de déchets dangereux, « souvent liée à l’absence ou à la rareté des contrôles ».
En 2017, treize des 28 États membres à l’époque n’avaient pas de plans d’inspection sur le traitement des déchets électroniques – au risque d’encourager certaines firmes à extraire uniquement les composants ayant de la valeur sans retraiter le reste, quitte à abandonner illégalement les déchets dans la nature. Entre 2009 et 2013, les autorités italiennes ont découvert dans des forêts, zones industrielles ou terrains agricoles environ 300 décharges sauvages, indique le rapport.
Autre défi : un contrôle jugé insuffisant des transferts illicites de déchets vers les pays extérieurs à l’UE. « Le taux de détection des infractions liées à la criminalité environnementale est faible », les poursuites judiciaires « sont négligeables statistiquement », et si les revenus des activités criminelles dans le secteur des déchets « sont comparables à ceux du trafic de stupéfiants », elles « tombent sous le coup de sanctions bien plus faibles », regrette le rapport.
LQ/AFP