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Dans le monde, un ramadan confiné ou… parfois comme si de rien n’était


L'OMS précise que le confinement ne dispense pas les musulmans "en bonne santé" de jeûner, "comme les années précédentes". (Photo : AFP)

Certains, confinés, vont rester prier à la maison, d’autres continueront d’aller à la mosquée. Le mois de jeûne du ramadan, qui commence autour de vendredi, en pleine pandémie de coronavirus, sera vécu de manière disparate à travers le monde.

Dans de nombreux pays, ce sera donc « ramadan en privé, loin des uns et des autres et loin des mosquées« , comme le résume Taulant Bica, un des responsables de la communauté musulmane albanaise. Pas de rassemblements pour de grands repas du soir (iftar), pas de prière nocturne à la mosquée (tarawih), pas de réunion entre amis jusque tard dans la nuit, pas de voyage dans les villes saintes de l’islam.

Au Moyen-Orient, de l’Arabie saoudite au Maroc, en passant par l’Égypte, le Liban ou la Syrie, où le confinement est généralisé, les restrictions sanitaires strictes sont soutenues dans la plupart des cas par les autorités religieuses. « Nos cœurs pleurent », se désole le muezzin de la Grande Mosquée de La Mecque, désertée. Pour cette année exceptionnelle, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) avait elle aussi clairement préconisé « l’annulation des rassemblements sociaux et religieux », y compris « dans des lieux associés aux activités du ramadan, tels que les lieux de divertissement, les marchés et les magasins ». Mais elle précise toutefois que le confinement ne dispense pas les musulmans « en bonne santé » de jeûner, « comme les années précédentes ».

Le ramadan est l’un des cinq piliers de l’islam. En Iran, pays du Moyen-Orient le plus touché par la pandémie, le guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, a appelé ses concitoyens à éviter tout rassemblement, sans pour autant « négliger la prière ». Jeûne et prières chez soi, a également recommandé la direction des affaires religieuses, Diyanet, en Turquie. En Russie aussi, les fidèles sont encouragés à prier chez eux. Au Kosovo et en Albanie, deux pays à forte majorité musulmane, les fidèles sont priés d’observer les rites religieux à la maison, tout comme en France, en Autriche, en Allemagne. Pas de prières collectives autorisées non plus en Bulgarie ni en Bosnie.

En Allemagne, où les mosquées restent fermées malgré la levée progressive des restrictions dans les prochaines semaines, des lieux de cultes berlinois ont préparé des « récitations de Coran », des « prières » et des « allocutions en ligne ». De même aux Pays-Bas, pays pas totalement confiné, où des services de prière du ramadan seront diffusés en streaming aux fidèles. En Afrique subsaharienne, les Sénégalais, musulmans à plus de 90%, se préparent à un ramadan hors du commun, avec interdiction de prières collectives et fermeture des mosquées. Les Sénégalais seront donc privés des « nafilas » (prières après la rupture du jeûne). Les conférences religieuses, activité primordiale pendant ce mois, sont annulées.

En outre, alors que le ramadan est traditionnellement une période de réunions et de déplacements entre l’intérieur du pays et Dakar, au bord de l’Atlantique, les mouvements de population entre les villes ont été proscrits par les autorités. Afin que l’aide aux plus démunis ne soit pas trop affectée par les mesures de confinement, associations et autorités s’organisent différemment. Ainsi en Turquie : les iftars publics extérieurs organisés en faveur des plus nécessiteux ne pourront se tenir, mais les municipalités d’Istanbul et d’Ankara prévoient de leur distribuer des plats ou d’envoyer des colis alimentaires.

« L’islam ne soutient pas l’imposition d’un quelconque quota de fidèles »

Au Sénégal, Alassane Ndour, ancien international de football sénégalais, et son association ne proposeront pas de repas, mais distribueront « des denrées, du riz, du sucre et du mil », affirme-t-il. Et dans chaque pays, les autorités religieuses continuent leurs traditionnels appels à la charité. En Asie, continent où résident plus d’un milliard de musulmans, les mesures de sécurité sanitaires sont plus difficiles à mettre en place, la foi l’emportant parfois sur toute autre considération. Au Pakistan, les imams ont convaincu les autorités de ne pas fermer les lieux de culte. Nuit après nuit, amis et familles célèbreront ensemble l’iftar.

Au Bangladesh, les dignitaires religieux ont balayé les recommandations sanitaires des autorités. Dans ce pays, le pouvoir a appelé à réduire la fréquentation dans les mosquées. « L’islam ne soutient pas l’imposition d’un quelconque quota de fidèles », a tonné un imam appartenant à l’un des principaux groupes d’imams du pays. En Indonésie, où des millions de personnes se rendent dans leurs villes et villages natals après le ramadan, le gouvernement a finalement banni ces mouvements de population, par crainte d’une explosion des cas de Covid-19.

LQ/AFP