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Crise politique en France : le gouvernement lâche du lest pour éviter la censure


L'éventualité d'une France sans gouvernement ne plaît pas aux marchés. (photo AFP)

Le Premier ministre français, Michel Barnier, a lâché du lest ce jeudi dans l’espoir de convaincre l’extrême droite de ne pas renverser son gouvernement minoritaire de centre-droit lors d’une censure à l’Assemblée nationale qui provoquerait, selon lui, une « tempête » économique et financière.

« J’ai décidé de ne pas augmenter les taxes sur l’électricité dans le projet de loi de finances 2025 », « cela permettra une baisse des prix de l’électricité de 14 %, qui ira donc bien au-delà de la baisse de 9 % prévue initialement », affirme le Premier ministre dans un entretien au quotidien Le Figaro.

Il a précisé qu’il s’agissait d’une demande quasi unanime de la classe politique.

Les députés du Rassemblement national (RN) avaient répété cette exigence dans un communiqué juste avant son annonce, comme ils avaient réitéré d’autres revendications, dont l’indexation des pensions au 1ᵉʳ janvier « pour tous les retraités ».

« Victoire » pour le RN 

Le président du RN Jordan Bardella a très vite réagi à l’annonce du Premier ministre, estimant que ce recul sur les taxes sur l’électricité constituait « une victoire » pour le Rassemblement national, mais a ajouté que des « lignes rouges demeurent » notamment sur le déremboursement de médicaments.

« La France qui travaille ou qui a travaillé doit être entendue : il faut un moratoire sur toute nouvelle création ou hausse d’impôt et de taxe », a affirmé le président du RN sur X.

En place depuis à peine plus de deux mois, le gouvernement joue sa survie face à la motion de censure que le RN menace de voter avec la gauche, peut-être dès la semaine prochaine sur le budget de la Sécurité sociale, faute d’obtenir des engagements en faveur du pouvoir d’achat des Français, dont le parti d’extrême droite s’est érigé en garant.

Le Rassemblement national soutient également la gauche dans sa tentative jeudi d’abroger la très décriée réforme des retraites.

Le ministre de l’Économie et des Finances Antoine Armand a de son côté réaffirmé sa détermination à redresser les comptes publics, alors que la deuxième économie de la zone euro est épinglée par Bruxelles pour son déficit excessif et attend la décision de l’agence de notation S&P sur sa dette vendredi soir.

« Décrocher comme un avion » 

L’exécutif souhaite ramener le déficit public de 6,1 % du PIB en 2024 à 5 % en 2025, puis sous le plafond européen de 3 % en 2029, tout en amorçant une lente réduction de la colossale dette (112 % du PIB à fin juin soit presque 3 230 milliards d’euros).

Or si le gouvernement tombe, le budget ne sera pas adopté, et la France foncera droit dans le mur, assurent ses membres.

« Ce que je dis aux partis politiques qui n’ont rien en commun, tout à droite ou tout à gauche de l’hémicycle », c’est que « ce n’est pas parce qu’on n’est pas d’accord avec une politique qu’on met un pays dans le rouge », a lancé Antoine Armand sur BFMTV/RMC.

« On risque de décrocher comme un avion qui est en altitude et qui à un moment risque de perdre le contrôle. Or, il y a un chemin: ce chemin, c’est ce budget », a-t-il ajouté, appelant notamment le Parti socialiste à la « responsabilité ».

L’éventualité d’une France sans gouvernement fait déjà tressaillir les marchés. Le taux d’emprunt de la France a dépassé pour la première fois mercredi, brièvement, celui de la Grèce, pays qui avait frôlé la faillite.

L’ancien président François Hollande a pour sa part rejeté les appels à la démission d’Emmanuel Macron en cas de censure, appels venus de la gauche radicale, de l’extrême droite ou de certains politiques de droite.

« Faire une élection présidentielle dans l’état où est le monde, dans la situation où est le pays avec les marchés qui nous surveillent ? Vous pensez que c’est la bonne solution ? Non, je ne le crois pas », a-t-il dit, tout en expliquant qu’il voterait la censure à l’Assemblée.