Les pays de l’UE, confrontés à la plus grave crise migratoire depuis la Seconde guerre mondiale, ont plusieurs options pour faire face à l’afflux des malheureux chassés par les conflits en Syrie et dans nombre d’autres pays, mais ne parviennent à s’entendre sur aucune.
L’été a vu arriver en Europe un nouveau flux de migrants à travers les Balkans, en plus de ceux qui affrontent les dangers d’une traversée de la Méditerranée ou tentent de pénétrer dans le tunnel sous la Manche, au péril de leur vie.
Malgré les récents efforts de l’Allemagne, le redéploiement des réfugiés dans les différents pays de l’Union européenne se heurte au manque de volonté de gouvernements qui cherchent à contenir l’influence grandissante de partis populistes ou d’extrême droite. Quant aux mesures visant à tarir à la source le flux des migrants, en Afrique ou au Moyen-Orient, elles sont dans l’impasse car les turbulences dans la région privent l’Europe d’interlocuteurs stables.
Tant et si bien que les pays européens en arrivent à prendre des mesures unilatérales radicales, comme la construction par la Hongrie d’une clôture métallique le long de sa frontière avec la Serbie pour couper l’une des routes d’accès à l’UE.
« Nous devons faire quelque chose, et il vaut mieux le faire quand on a encore le contrôle », avertit un diplomate européen. « Nous devons travailler sur plusieurs fronts à la fois: répartir l’effort entre Européens, mieux contrôler les frontières extérieures, améliorer la coopération avec les pays de transit ».
Les dirigeants européens, tirés de leur inaction en avril par la noyade de plus de 700 personnes en Méditerranée, n’ont pourtant pas réussi à surmonter leurs désaccords sur un plan de répartition des migrants par quotas pour alléger la pression sur l’Italie et la Grèce, situées en première ligne. Ces derniers jours, l’arrivée de milliers de personnes à la frontière hongroise avec un record de 2 100 personnes en une journée, et l’usage de gaz lacrymogènes par la police macédonienne, ont remis la crise migratoire au centre des préoccupations.
La chancelière allemande Angela Merkel et le président français François Hollande, réunis en urgence lundi, ont appelé à une réponse « unifiée ». Berlin, qui se prépare à accueillir 800 000 demandeurs d’asile en 2015 – plus que tous les autres pays de l’UE réunis – a suspendu le renvoi des demandeurs d’asile syriens vers leur pays d’entrée dans l’UE, contrairement à ce que prévoit le règlement de Dublin.
Mais un plan en dix points pour faire face au problème des réfugiés, dévoilé par Berlin cette semaine, et qui appelle à une « juste répartition » des réfugiés en Europe et à « une approche commune » pour le contrôle des frontières, laisse pointer une certaine frustration de l’Allemagne envers ses partenaires. De la Suède à la France en passant par le Royaume Uni, les gouvernements sont confrontés à des partis anti-immigration qui compliquent toute initiative pour accueillir plus de réfugiés.
La Slovaquie a suscité de nombreuses critiques ce mois-ci en se disant prête à accepter 200 réfugiés, mais seulement s’ils sont chrétiens. Mme Merkel elle-même s’est retrouvée ces derniers jours confrontée à une vague de manifestations et de violences visant des étrangers. Dans une interview début août, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, avait exhorté les dirigeants européens à « ne pas se laisser aveugler par la pensée populiste ».
Pour le rapporteur spécial de l’ONU sur les droits des migrants, le Canadien François Crépeau, la solution consiste à ouvrir le marché du travail aux demandeurs d’asile et aux migrants et à leur accorder des visas. « La construction de barrières, l’usage de gaz lacrymogène et d’autres formes de violence contre les migrants et les autres demandeurs d’asile, la détention (…) n’empêcheront pas les migrants de venir ou de tenter d’arriver en Europe ».
Un sommet entre dirigeants européens et africains est prévu à Malte en novembre. Il devrait être en partie consacré à la question des passeurs et des trafiquants. Mais la flotte hyper-entraînée de l’UE doit se limiter à secourir les migrants car elle n’a pas de mandat de l’ONU ni des autorités libyennes, où sont basés beaucoup d’entre eux, pour s’attaquer aux trafiquants.
AFP / S.A.