Le bilan du nouveau coronavirus a dépassé vendredi le sinistre plafond des 100 000 morts, dans un monde cloîtré qui tente de circonscrire une pandémie toujours susceptible de « résurgence mortelle » en cas de déconfinement précipité selon l’OMS.
Le bilan du nouveau coronavirus a dépassé vendredi le sinistre plafond des 100 000 morts, dans un monde cloîtré qui tente de circonscrire une pandémie toujours susceptible de « résurgence mortelle » en cas de déconfinement précipité selon l’OMS. Depuis l’apparition du Covid-19 en décembre en Chine, 100 661 décès ont été recensés à ce jour, dont 70 245 en Europe, continent le plus touché, selon un bilan établi vendredi en fin d’après-midi.
L’Italie est le pays au monde ayant enregistré le plus de morts (18 849), devant les États-Unis (17 925), l’Espagne (15 843) et la France (13 197). Depuis le début de la pandémie, 1 650 651 cas ont été déclarés dans le monde, dont plus de 475 000 aux États-Unis, où la pandémie progresse aujourd’hui le plus rapidement.
Des centaines de millions de chrétiens ont entamé ce même jour les célébrations d’un week-end de Pâques inédit et sans fidèles, en particulier sur l’immense place Saint-Pierre de Rome, d’ordinaire noire de monde. Pour la fête la plus importante de la tradition chrétienne, c’est sur écran que les fidèles suivront les messes d’un pape François lui-même confiné.
Juifs et musulmans se voient aussi privés de leurs célébrations
Vendredi soir, à la lumière des torches, le chef spirituel des 1,3 milliard de catholiques regardera deux groupes de cinq personnes – des détenus et du personnel médical – rejouer la Passion du Christ. Les médecins, infirmiers, infirmières, sœurs, prêtres qui combattent la pandémie sont « morts au front comme des soldats qui ont donné leur vie par amour », a décrit le pape sur une chaîne de télévision italienne, ajoutant qu’ils rejoignaient la liste des « crucifiés de l’Histoire ». À Jérusalem, pour la première fois en plus d’un siècle, le Saint-Sépulcre sera également fermé au public durant tout le weekend pascal. Une simple messe à huis clos y a été célébrée pour le Vendredi saint, qui commémore la crucifixion du Christ.
Chrétiens, mais également juifs et musulmans se voient privés de leurs célébrations : toutes les fêtes religieuses du mois d’avril sont affectées, Pâques chrétienne, mais aussi Pessah, la Pâque juive, et sans doute aussi le ramadan qui doit débuter autour du 24 avril.
En cas de déconfinement trop tôt, « résurgence mortelle » de la pandémie
Entre autres nouveaux bilans, 987 personnes sont décédées en France en 24 heures, parmi lesquelles un enfant de six ans, selon les autorités sanitaires. « Pâle rayon de soleil » cependant, la diminution des admissions en réanimation (62 patients en moins). Après un nouveau record journalier de près de mille morts également en Grande Bretagne, le gouvernement britannique a exhorté au respect du confinement malgré le week-end pascal qui promet d’être ensoleillé. Le Premier ministre Boris Johnson, contaminé et hospitalisé depuis dimanche, se remet à l’hôpital mais « doit se reposer », selon son père.
L’Espagne a annoncé vendredi son plus bas nombre de morts quotidiens depuis le 24 mars, avec 605 décès. Le confinement a été prolongé en Irlande comme en Italie jusqu’à début mai. La Turquie a dépassé de son côté les 1 000 morts vendredi. La timide tendance à la baisse de la tension hospitalière dans plusieurs pays montre que le confinement commence à porter ses fruits. Partout, les autorités sanitaires appellent à ne pas relâcher les efforts pour autant.
Et alors que certains pays européens se préparent à la sortie du confinement, dans le sillage de la Chine, l’OMS a souligné qu’une levée trop rapide des restrictions « pourrait entraîner une résurgence mortelle » de la pandémie. Son « reflux pourrait être aussi mortel que sa propagation s’il n’est pas géré convenablement », a prévenu le patron de l’agence onusienne, l’Ethiopien Tedros Adhanom Ghebreyesus. Des experts mettent également en garde. « Le pire scénario serait une sorte de fête de la victoire avec tout le monde dans la rue, en train de s’embrasser et de se congratuler », prévient David Lalloo, directeur de l’École de médecine tropicale de Liverpool.
Également pour l’après-confinement, le gouvernement allemand s’apprête à lancer une application mobile, inspirée de Singapour, pour faciliter le suivi individuel des cas et l’identification des chaînes de contamination, alors que l’exploitation des données issues des smartphones suscite un vif débat. Sur le même thème, Apple et Google ont annoncé vendredi un partenariat pour permettre le suivi numérique des individus ayant été à proximité des personnes infectées « dans le but d’aider les gouvernements et les agences de santé à réduire la propagation du virus », mais « en intégrant la confidentialité et la sécurité des utilisateurs au cœur de la conception ».
Seuls les animaux en profitent
En Afrique, où la Banque mondiale et la Banque africaine de développement ont dit craindre une « crise alimentaire », le Gabon mettra en œuvre un confinement total de sa capitale Libreville dès dimanche. En RDC, aussi touchée par le virus, la fièvre Ebola n’en finit pas non plus, avec un nouveau cas de cette meurtrière fièvre hémorragique détecté à Beni (est), à trois jours de la proclamation officielle prévue de la fin de l’épidémie. Au Burundi en revanche, qui ne compte à ce jour que trois cas selon la version officielle, tout va bien : le parti au pouvoir et ses pasteurs évangéliques assurent que le pays est protégé par « la grâce divine ». Ailleurs dans le monde, la ville de Moscou durcira dès lundi le confinement, les services de santé de la capitale russe atteignant « leurs limites » avec des semaines « difficiles » en perspective. En guerre depuis cinq ans, et théâtre de l’une des pires crises humanitaires, le Yémen a annoncé vendredi un premier cas de contamination.
Alors que les hommes sont confinés, les animaux eux continuent d’en profiter. Après les dauphins dans les canaux de Venise ou les canards dans les rues de Paris, des rorquals ont fait leur réapparition au large de Marseille, le long des côtes françaises de la Méditerranée.
AFP/LQ