L’Iran en a appelé jeudi à la responsabilité du Fonds monétaire international, à qui, de manière très exceptionnelle, Téhéran dit avoir demandé de l’aide face au Covid-19 qui touche désormais officiellement plus de 10 000 personnes dans le pays.
« Notre banque centrale a demandé un accès immédiat » à l’instrument de financement rapide (IFR) du FMI, a déclaré le ministre des Affaires étrangères iranien Mohammad Javad Zarif sur Twitter. M. Zarif, a fait référence à la promesse faite début mars par la directrice générale du Fonds, Kristalina Georgieva, d’utiliser « autant que possible […] les financements d’urgence » du Fonds pour aider les pays membres « à faire face aux tragédies humaines et aux difficultés économiques causées » par l’épidémie mondiale de nouveau coronavirus partie de Chine. Téhéran n’a plus reçu d’aide du FMI depuis un crédit dont l’Iran a bénéficié entre 1960 et 1962, soit avant la fondation de la République islamique en 1979. Avec 75 nouveaux décès annoncés jeudi et un bilan officiel de 429 personnes tuées par la maladie Covid-19, l’Iran est l’un des pays les plus touchés par cette pneumonie virale, après la Chine et l’Italie. « Au cours des dernières 24 heures, 1.075 personnes ont été infectées » par le virus, ce qui porte « le nombre total des infections à 10.075 », a annoncé jeudi le ministère de la Santé. Dans un message publié sur son compte Instagram et repris par l’agence officielle Irna, le gouverneur de la banque centrale iranienne, Abdolnasser Hemmati, affirme avoir demandé formellement, par lettre, le 6 mars, un accès à l’IFR. « Compte tenu de la prévalence généralisée du coronavirus dans notre pays et de la nécessité de continuer à prendre des mesures fortes afin de prévenir et guérir (cette maladie) et pour faire face à ses impacts économiques », l’Iran demande au FMI une aide d' »environ 5 milliards de dollars » au FMI, écrit M. Hemmati.
« Besoin urgent »
Selon le site internet du Fonds, l’IFR « offre une assistance financière rapide à tous les pays membres qui (en) ont un besoin urgent ». M. Hemmati n’a pas publié la copie de la lettre qu’il dit avoir adressée au Fonds. Les différents prêts que peut accorder le FMI doivent être approuvés par le Conseil d’administration de l’institution, où, dans la pratique, aucune décision ne peut être prise contre la volonté des Etats-Unis. Ceux-ci mènent actuellement une politique de « pression maximale » destinée à assécher les finances de l’Etat iranien, et le président américain Donald Trump n’a jusqu’à présent montré aucune volonté de l’infléchir. Sur Twitter, M. Zarif a exhorté « le Conseil d’administration du FMI [à] coller au mandat du Fonds, être du bon côté de l’histoire et agir de façon responsable ». M. Zarif, qui dénonce régulièrement les sanctions économiques américaines visant son pays comme du « terrorisme économique » a accusé ces derniers jours Washington de se livrer à du « terrorisme médical » contre le peuple iranien. La mission iranienne au siège des Nations unies à New York a diffusé jeudi une lettre de M. Zarif au secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, dans laquelle le ministre iranien dénonce la « punition collective » imposée par les Etats-Unis à son pays par le biais des sanctions qui « sapent [les] efforts pour combattre l’épidémie de Covid-19 en Iran ».
Washington a annoncé en 2018 le rétablissement de lourdes sanctions économiques contre Téhéran à la suite du retrait unilatéral des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien conclu en 2015 entre la République islamique et la communauté internationale. Sur le papier, les médicaments et les équipements médicaux échappent aux sanctions de Washington mais, en réalité, ceux-ci sont soumis au blocus américain, les banques internationales préférant généralement refuser une transaction impliquant l’Iran plutôt que de courir le risque de s’exposer à des représailles aux Etats-Unis. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) a estimé mercredi que l’Iran faisait « de son mieux » pour contenir l’épidémie de Covid-19 mais que le pays manquait cruellement d’équipements. « Nous essayons de mobiliser davantage de soutien pour l’Iran », a ajouté l’agence onusienne. « Le personnel soignant iranien se bat courageusement en première ligne contre le Covid-19 », mais « leurs efforts sont contrecarrés par de grandes pénuries causées par les restrictions sur l’accès aux médicaments [et] équipements [médicaux] imposés à notre peuple, a renchéri M. Zarif sur Twitter en déroulant une liste de « besoins urgents » de son pays.
AFP