Les États-Unis, confrontés à une forte hausse du nombre de morts, sont sur le point de dépasser l’Italie en nombre de cas détectés de coronavirus, dont les ravages pour l’économie et les travailleurs commencent à apparaître au grand jour.
La course contre la montre des autorités est saisissante : au moment même où le Sénat approuvait, tard mercredi soir, un plan historique de 2 000 milliards de dollars pour soutenir la première économie mondiale, le bilan de la pandémie franchissait le seuil symbolique des 1 000 morts recensés sur le sol américain, selon l’université Johns Hopkins.
Avec près de 70 000 cas enregistrés, le pays devrait, à ce rythme, dépasser l’Italie très rapidement et devenir le deuxième le plus touché de la planète par la pandémie, après la Chine.
C’est à New York, capitale économique connue pour son habitat extrêmement dense, que l’accélération est la plus forte. L’État du même nom avait enregistré jeudi matin 385 morts, soit 100 décès supplémentaires en 24 heures. Le nombre de cas y est aussi passé en un jour de 30 000 à plus de 37 000, soit plus de la moitié des cas américains recensés, a indiqué le gouverneur Andrew Cuomo.
Tests menés à grande vitesse
Devant l’hôpital Elmhurst, dans un quartier populaire du quartier du Queens, une cinquantaine de New-Yorkais, pour la plupart masqués et gantés, patientaient jeudi matin pour se soumettre au dépistage, dont les autorités ont accéléré la cadence, avec désormais un ratio d’une personne testée pour 160 habitants, soit « plus qu’en Corée du Sud », selon Cuomo.
« Nous sommes submergés », a indiqué Priscilla Carate, infirmière à l’hôpital Mount Sinai de Manhattan. « Les médecins et infirmiers aux urgences étaient débordés », a-t-elle ajouté, précisant qu’ils étaient en train d’aménager de nouveaux étages pour accueillir les patients. Beaucoup de patients « ont peur d’être proches les uns des autres », a-t-elle indiqué. Tant le maire que le gouverneur ont néanmoins souligné que les hôpitaux avaient reçu ces derniers jours suffisamment d’équipement pour faire face à l’afflux, au moins dans les prochains jours.
Mais ils ont également vivement critiqué les fonds alloués à New York dans l’énorme plan de sauvetage de l’économie américaine approuvé à l’unanimité par le Sénat, et qui doit maintenant obtenir le feu vert de la Chambre des représentants. Le plan « ne nous aide en rien face à la perte de revenus » causée par les pertes d’emploi et l’arrêt des entreprises, qui atteindrait déjà entre 10 et 15 milliards de dollars, a déploré Cuomo. « Je trouve ça irresponsable, dangereux (…) il faut aider ceux qui en ont le plus besoin ».
Car sur le front de l’emploi, la crise sanitaire commence à montrer ses effets économiques dévastateurs, alors que plus de la moitié des Américains sont désormais appelés à se confiner chez eux et que nombre d’activités « non essentielles » sont à l’arrêt. Le nombre de nouveaux chômeurs hebdomadaires a atteint un niveau sans précédent. Selon ces données vertigineuses dévoilées jeudi, 3,3 millions de personnes ont fait une première demande d’allocations chômage la semaine passée, soit trois millions de plus que la semaine précédente.
Risque d’un redémarrage précoce
Le secrétaire au Trésor Steven Mnuchin s’est dit confiant que le plan d’aide puisse permettre aux entreprises de réembaucher ces nouveaux chômeurs. Et le patron de la Banque centrale américaine, Jerome Powell, a promis que l’institution continuerait à prêter de l’argent « agressivement » pour atténuer l’impact économique de l’épidémie. Cette bouffée d’oxygène pourrait toutefois s’avérer n’être qu’un minimum vital dans un pays où les « amortisseurs sociaux » sont bien moindres que dans nombre d’économies occidentales.
Donald Trump laisse maintenant entrevoir une levée des restrictions pour Pâques, le 12 avril. Une échéance qui fait polémique. Joe Biden, probable adversaire démocrate du président républicain à l’élection de novembre, a jugé « catastrophique » l’idée de voir les Américains retourner aussi rapidement au travail. Cela « risque de provoquer un deuxième pic de contaminations », a-t-il prévenu, même si ses interventions semblent devenues inaudibles tant l’attention se concentre sur les conférences de presse quotidiennes de l’hôte de la Maison Blanche.
Anthony Fauci, spécialiste des maladies infectieuses au sein de l’équipe américaine de lutte contre le Covid-19, a aussi mis en garde contre la possibilité que l’épidémie, quand elle sera endiguée, puisse revenir de manière saisonnière. « Il est inévitable de se préparer à un second cycle », a-t-il lancé.
LQ/AFP