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Coronavirus : l’Italie exhorte l’UE à être à la hauteur


Giuseppe Conte s'en prend aux pays qui "raisonnent avec un regard vieux, dépassé. Une approche inadéquate pour cette crise". (illustration AFP)

Pilier et membre fondateur de l’Union européenne, l’Italie l’exhorte à se montrer à la hauteur des défis posés par la pandémie de Covid-19, faute de quoi elle court un risque mortel.

« Sans solidarité, les liens et les raisons d’être ensemble tombent à l’eau », prévient le président du Parlement européen, l’Italien David Sassoli, qui, dans une interview au quotidien Corriere della Sera, veut rester optimiste: « il est également vrai (…) que l’Europe se forge à travers les crises qu’elle affronte ». « L’Europe peut devenir plus forte », a-t-il estimé, à condition « que nos pays comprennent qu’ils ne peuvent s’en sortir en s’engageant dans le chacun pour soi ».

Un fossé sépare des pays du sud de l’Europe, comme l’Espagne et l’Italie, soutenus par la France, de ceux du nord, menés par les Pays-Bas et l’Allemagne. Les premiers, les plus touchés jusqu’à présent par la pandémie et dotés de finances publiques fragiles, souhaitent un soutien financier massif de l’UE pour surmonter les conséquences sanitaires, économiques et sociales de la crise. Ils plaident pour une mutualisation des dettes des pays de la zone euro, qui pourraient prendre la forme de « corona bonds », ce que les pays du nord refusent. « Je pense que certains pays n’ont pas perçu la mesure de la catastrophe qui nous guette et ne se rendent pas compte de la gravité de la situation pour leurs propres économies », a poursuivi David Sassoli.

« Le projet européen risque de sombrer »

Son cri d’alarme fait écho à celui de l’ex-président de la Commission européenne, Jacques Delors : « Le climat qui semble régner entre les chefs d’État et de gouvernement et le manque de solidarité européenne font courir un danger mortel à l’Union européenne. »

« Le projet européen risque de sombrer. Il est clair que si les divergences économiques entre pays européens augmentent et si la crise accroît les différences entre divers pays européens, au lieu de (les) diminuer (…), il sera très difficile de maintenir en l’état le projet européen », a renchéri lundi le commissaire européen à l’Économie, l’Italien Paolo Gentiloni. L’ancien chef du gouvernement italien souligne par ailleurs qu’une solution doit être trouvée « inévitablement à travers un dialogue avec l’Allemagne sans laquelle on ne trouvera pas un compromis ».

« Malheureusement, dans la dynamique des rapports entre les États européens, c’est la clé de lecture des crises précédentes qui a pris le dessus. Le fait est que cette discussion, qui est absolument légitime, n’est pas adaptée à la situation que nous vivons », a ajouté Paolo Gentiloni.

« Un regard vieux, dépassé »

Son raisonnement est repris par le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte dans une interview lundi au quotidien espagnol El Pais où il s’en prend aux pays qui « raisonnent avec un regard vieux, dépassé. Une approche inadéquate pour cette crise ». « Il ne s’agit pas d’une crise économique qui toucherait des pays moins vertueux que d’autres, c’est une crise sanitaire qui a explosé dans le domaine économique et social. C’est un défi historique pour toute l’Europe », dit-il.

Et pour éviter tout malentendu possible sur la mutualisation de la dette, il a martelé que « l’Italie ne demande pas le partage de sa dette publique accumulée. Cette dette restera à la charge de chaque pays », assure-t-il. « C’est le moment d’introduire un instrument de dette commune européenne qui nous permettra de remporter cette guerre aussi vite que possible et de relancer l’économie » alors que l’Italie terminera 2020 en récession en raison de l’épidémie, a ajouté Giuseppe Conte dont le pays affiche la deuxième dette la plus élevée de l’UE après la Grèce. Un sommet de l’UE s’est terminé sans résultat jeudi et a renvoyé à deux semaines une éventuelle prise de décision.

LQ/AFP