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Coronavirus : ce qu’on sait et ce qu’on ignore encore


L'essentiel des cas de contagion directe entre humains a été observé en Chine. Trois autres cas ont été rapportés au Vietnam, en Allemagne et au Japon. (Photo AFP)

Taux de mortalité, niveau de transmission entre humains, moment où un malade devient contagieux, période d’incubation : de nombreuses inconnues empêchent encore de déterminer l’impact mondial de l’épidémie partie de Chine et provoquée par un nouveau coronavirus.

Pour l’heure, plus de 130 patients sont morts sur un total de près de 6 000 cas en Chine. Aucun patient n’est mort hors de Chine, alors qu’une soixantaine de malades ont été répertoriés dans une quinzaine d’autres pays, de l’Asie et l’Australie à l’Europe, l’Amérique du Nord et le Moyen-Orient. À ce stade, on ne peut connaître avec précision le taux de mortalité lié à ce nouveau coronavirus baptisé 2019-nCoV, puisqu’on ne sait pas combien de personnes sont réellement infectées. Ce taux est « aujourd’hui clairement inférieur à 5% », a jugé mardi la ministre française de la Santé, Agnès Buzyn. Et il baisse chaque jour, puisque proportionnellement, il y a plus de nouveaux cas confirmés que de décès.

Auparavant, seules deux épidémies mortelles ont été causées par un coronavirus, vaste famille à laquelle appartient le nouveau virus : le SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) et le MERS (syndrome respiratoire du Moyen-Orient). Selon l’OMS, l’épidémie de SRAS avait fait 774 morts dans le monde sur 8 096 cas en 2002/2003 avant d’être jugulée, soit un taux de mortalité de 9,5%. Toujours en cours, l’épidémie de MERS a fait 858 morts sur 2 494 cas depuis septembre 2012, soit un taux de mortalité de 34,5%.

Une personne pourrait en contaminer plus de 5 autres

Le nouveau virus « est moins mortel que celui du SRAS ou du MERS. Par contre, il a l’air plus contagieux », selon Agnès Buzyn. À titre de comparaison, l’OMS estime que la grippe saisonnière fait entre 290 000 et 650 000 morts par an dans le monde. Différents experts ont tenté d’estimer le nombre de gens contaminés par une personne infectée. Appelé « taux de reproduction de base » (ou R0), ce paramètre est important pour cerner la dynamique d’une épidémie. Plusieurs estimations vont de 1,4 à 3,8, ce qui est jugé modéré, explique à l’AFP David Fisman, professeur à l’université de Toronto. Mais des scientifiques chinois ont produit une estimation plus élevée, selon laquelle une personne pourrait en contaminer plus de 5 autres. « Si cela se confirme, cela pourrait expliquer en partie la hausse rapide du nombre de cas » détectés en Chine, selon J. Stephen Morrison, du Centre pour les études stratégiques internationales (CSIS) à Washington. Cette hausse pourrait toutefois aussi venir du fait que « la capacité de détection s’est améliorée dans les hôpitaux chinois », a nuancé Agnès Buzyn. Cette question cruciale reste encore sans réponse.

Dimanche, les autorités chinoises ont avancé que la contagion était possible avant même que des symptômes n’apparaissent (ce qui est le cas pour la grippe mais ne l’était pas pour le SRAS). Toutefois, cette hypothèse s’appuie sur l’observation de quelques cas et n’est pas confirmée avec certitude. « Il est urgent de mener des recherches sur cette question », insiste le Pr Mark Woolhouse de l’université d’Édimbourg (Écosse). « Notre principal espoir de contrôler l’épidémie est d’identifier rapidement les patients touchés et de les isoler pour éviter la contagion », rappelle-t-il. « Si la transmission du virus avant même l’apparition des symptômes se confirmait à large échelle, l’efficacité de telles mesures serait compromise ».

Une incubation comprise entre deux à dix jours en moyenne

L’essentiel des cas de contagion directe entre humains a été observé en Chine. Trois autres cas ont été rapportés au Vietnam, en Allemagne et au Japon. Le risque de telles transmissions est « très bas dans les pays développés », selon J. Stephen Morrison. Cependant, si des cas étaient exportés « vers certains pays d’Afrique ou d’autres continents où les moyens de sécurité sanitaire sont limités, de gros foyers épidémiques pourraient alors éclater hors de Chine ». « Cela pourrait être le prélude à une pandémie mondiale », ajoute J. Stephen Morrison, en précisant que pour l’heure, un tel scénario n’est que théorique.

Quant à la durée entre l’infection par le virus et l’apparition des premiers symptômes, les derniers éléments en date semblent montrer qu’elle pourrait être plus courte que ce qu’on pensait. L’OMS l’estimait lundi à deux à dix jours en moyenne. Mais pour certains cas, c’est plus rapide : sur 34 patients chinois étudiés par des chercheurs aux Pays-Bas, la moyenne de la période d’incubation était de 5,8 jours. Quant à un Vietnamien de 27 ans contaminé par son père revenu de Wuhan, les symptômes sont apparus en seulement trois jours, selon une lettre parue mardi dans la revue médicale américaine NEJM. C’est la fourchette haute de la période d’incubation, 14 jours, qu’a retenue la France pour fixer la durée de l’isolement auquel seront soumis ses ressortissants rapatriés de Wuhan.

L’âge moyen des 41 patients en Chine est de 49 ans

La maladie respiratoire provoquée par le nouveau coronavirus et le SRAS ont des symptômes communs, selon l’observation des 41 premiers cas repérés en Chine. Tous ces patients avaient une pneumonie, la quasi-totalité avait de la fièvre, les trois quarts toussaient, plus de la moitié avait des difficultés respiratoires. Mais « il y a d’importantes différences avec le SRAS, comme l’absence de symptômes affectant les voies aériennes supérieures (nez qui coule, mal de gorge, éternuements) », analyse le Pr Bin Cao, auteur principal de ces travaux publiés dans The Lancet. L’âge moyen des 41 patients est de 49 ans et moins d’un tiers souffrait de maladies chroniques (diabètes, problèmes cardiovasculaires…). Près d’un tiers a présenté une détresse respiratoire aiguë et six sont morts. Il n’existe ni vaccin ni médicament contre le coronavirus, et la prise en charge médicale consiste à traiter les symptômes, dont la fièvre.

LQ/AFP