Les habitants de Copenhague étaient choqués et voulaient exprimer leur solidarité dimanche après deux attaques meurtrières menés par un seul homme, qui soulignent la haine d’une frange extrémiste contre la liberté d’expression et les juifs.
Dimanche matin, les habitants de Copenhague ont commencé à se rassembler dans les rues de la ville prise pour cible la veille. (Photos : AFP)
« C’est terrible, ils s’en sont pris au monde libre. Heureusement que ce matin il y a beaucoup de policiers », dit Jörgen Johanssen, 84 ans, un béret visé sur la tête qui s’avance lentement dans les rues de Copenhague, plus calmes qu’un dimanche ordinaire.
Devant la synagogue, bâtiment massif jaune en plein centre-ville protégé par des grilles, beaucoup de personnes, les larmes aux yeux, s’embrassent et se réconfortent, refusant de parler aux nombreux journalistes et laissant des fleurs, des bougies, ou signant un livre d’or.
« On se sent moins en sécurité, surtout la communauté juive. Je suis venue par solidarité. Tout le monde tombe sur le dos des Juifs et là on les a touchés alors qu’ils célébraient une Bar Mitzvah », déplore Liebecke, 65 ans, venue se recueillir.
« Ce n’est pas très rassurant, mais la police a fait un très bon travail », dit Tobias Hansi 19 ans, vendeur, pressé de se rendre à son travail.
Kristian et Camilla, 44 ans, soulignent ne pas avoir renoncé à une promenade dominicale avec leurs jeunes enfants. « On habite ici, en plein centre, et on n’avait pas l’intention de changer notre programme. Mais avec ce qui s’est passé, c’est clair que maintenant on a conscience qu’on peut être touchés ».
L’ambiance est très recueillie. Dans un coup de vent, une jeune femme en pleurs sort de l’immeuble qui fait face à la synagogue et dépose une gerbe.
> Un pays sous la menace terroriste
« Je suis venu pour manifester ma solidarité et mon soutien. Ce genre d’événements, on ne s’y attend pas, mais on sait qu’ils peuvent arriver », dit Jens, un psychologue de 27 ans. Selon lui, l’auteur des attaques s’est clairement « inspiré de ce qui s’est passé à Paris ».
« Dans un sens, on était préparé. On en avait parlé il n’y a pas si longtemps, en disant qu’avec la proximité de la synagogue, ça pouvait arriver là, dans la rue. Bien sûr, on ne voulait pas vraiment y croire », raconte Emma, 20 ans, serveuse dans le café au coin de la rue.
La chef de gouvernement Helle Thorning-Schmidt est venue aussi se recueillir avec des représentants de la communauté, auxquels elle a adressé ses condoléances. Elle a déposé un bouquet et souligné que la sécurité avait été renforcée après les attentats de Paris.
La menace terroriste planait depuis longtemps sur le Danemark, mais les deux attaques de samedi sont les plus meurtrières de l’histoire de ce pays de 5,6 millions d’habitants.
Début 2006, le royaume avait vu des musulmans en colère, de la Palestine à l’Afghanistan en passant par le Nigeria, brûler son drapeau après la publication de 12 caricatures du prophète de l’islam dans le quotidien Jyllands-Posten en septembre 2005.
Membre de l’Otan qui avait participé à l’invasion de l’Irak en 2003, le pays se savait menacé, y compris de l’intérieur par des jeunes musulmans radicalisés, en marge d’une société sécularisée qui défend une vision très généreuse de la liberté d’expression.
Nørrebro, le quartier de Copenhague où a été abattu l’auteur présumé des deux attaques, est un symbole des ratés de l’intégration des jeunes issus de l’immigration, avec un chômage plus élevé que dans le reste du pays, un habitat collectif peu attrayant pour les classes moyennes et un historique d’affrontements entre jeunes et forces de l’ordre.
En décembre, les services de sécurité (PET) estimaient à au moins 110 le nombre de jihadistes en Syrie et Irak venus du Danemark. Seize d’entre eux seraient morts.
AFP