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Capitulation nazie : le jour où le monde a changé


L'artillerie lourde a déjà été sortie lors des répétitions pour le défilé prévu ce vendredi 8 mai sur la place Rouge. (photo AFP)

C’est à Reims, en France, qu’ont démarré, jeudi, les cérémonies de commémoration du 70e anniversaire de la capitulation nazie. Dans la capitale champenoise fut signé le premier document mettant fin au conflit. La date du 7 mai a été reléguée aux oubliettes de l’histoire par Staline qui exigea un nouvel acte de reddition le lendemain à Berlin, devant le général Jukov.

70e anniversaire de la capitulation allemande

« L’acte signé à Reims était bien la véritable capitulation totale et sans condition des Allemands et nullement un accord préliminaire comme l’ont fait croire les Soviétiques», assure l’historien Philippe Buton, professeur à l’université de Reims Champagne-Ardenne.

Le 7 mai 1945 à 2 h 41 au quartier général d’Eisenhower situé dans un collège de la rue Jolicœur à Reims (aujourd’hui rue Franklin-Roosevelt), le général Alfred Jodl, chef d’état-major des armées du IIIe Reich, paraphait le document qui mettait fin à la Seconde Guerre mondiale en Europe après cinq ans, huit mois et six jours de batailles sanglantes.

Le court texte signé par le général américain Walter Bedell-Smith, adjoint d’Eisenhower, et l’officier de liaison russe Ivan Sousloparov, enjoignait aux troupes allemandes de cesser le feu le 8 mai à 23 h 01 et de se conformer aux ordres des forces expéditionnaires des alliés occidentaux et du Haut commandement soviétique.

Introduit au dernier moment dans la salle, le général François Sevez, adjoint du général Juin, fut invité comme simple témoin, à signer le document dont il n’existait pas de version française. «Staline était dans une rage folle en apprenant la reddition à Reims, il lui était impensable qu’aux yeux de l’histoire la paix ait été signée dans un territoire sous contrôle américain», souligne Philippe Buton.

Dans la soirée du 8 mai au quartier général du général soviétique Gueorgui Joukov dans la banlieue de Berlin aux mains de l’Armée Rouge, un acte similaire à celui de Reims a donc été signé par le maréchal Wilhelm Keitel, commandant en chef de l’Armée allemande en présence d’officiers russes, américains, britanniques et français.

De Gaulle ne voulait pas être un spectateur

La capitulation devait entrer en vigueur à 23 h 01, heure d’Europe centrale, conformément au traité signé à Reims la veille. Seule cette date, le 8 mai pour l’Europe mais le 9 pour la Russie en raison du décalage horaire, resterait donc dans l’histoire pour marquer la victoire des Alliés contre le régime nazi.

«La volonté de Staline de faire oublier le 7 mai à Reims s’est en fait conjuguée avec celle de Charles de Gaulle qui ne supportait pas que la France ait été cantonnée à l’obscur rôle de témoin par la signature d’un militaire inconnu», explique l’historien.
À Berlin, c’est le général Jean de Lattre de Tassigny, célèbre chef de la 1ère Armée française envoyé par De Gaulle, qui représentait la France et exigeait notamment la présence du drapeau tricolore lors de la signature au grand dam du maréchal allemand, selon l’universitaire.

Quoi qu’il en soit de ces péripéties historiques, expositions, conférences, projections de films, son et lumière ou encore reconstitution d’un camp de GI américains et défilé de chars et de véhicules d’époque : la ville de Reims a programmé quatre jours de festivités depuis mercredi pour commémorer la paix.

Annoncé un temps pour présider les cérémonies, jeudi, au monument aux Morts, le Premier ministre français, Manuel Valls, s’est finalement décommandé au profit du secrétaire d’État aux Anciens combattants, Jean-Marc Todeschini, qui accueillera les différentes représentations diplomatiques.

Le public pourra également découvrir le documentaire Le Grand Secret réalisé par Christophe Remy qui relate l’histoire du journaliste de l’Associated Press Edward Kennedy, envoyé spécial à Reims pour couvrir la reddition allemande et qui brisa l’embargo imposé par les autorités américaines pour révéler au monde la fin de la guerre en Europe.

Selon les spécialistes de la Seconde Guerre mondiale, 60 millions de personnes auraient péri dans ce conflit qui a tué près de 2,5% de la population mondiale sur tous les fronts.