Des centaines de milliers de fidèles musulmans, encadrés par un dispositif de sécurité renforcé, terminaient samedi le grand pèlerinage annuel de La Mecque, deux jours après la pire tragédie à endeuiller ce rassemblement depuis un quart de siècle.
Les autorités saoudiennes, critiquées pour une organisation jugée défaillante depuis la bousculade meurtrière de jeudi, ont revu samedi à la hausse le bilan des victimes, à 769 morts et 934 blessés.
Déjà le 11 septembre, moins de deux semaines avant le début du pèlerinage annuel, plus de cent fidèles avaient péri dans la chute d’une énorme grue sur la Grande mosquée à La Mecque, le premier lieu saint de l’islam.
Samedi, dès les premières heures de la journée, des groupes de pèlerins se relayaient sur le site de la lapidation à Mina, où le drame s’est noué jeudi, pour la fin du rituel consistant à jeter des cailloux sur trois stèles symbolisant Satan. Les déplacements de la foule étaient canalisés par un grand nombre de forces de sécurité, pour éviter de nouveaux incidents.
Les autorités saoudiennes n’ont pas encore établi la liste des victimes par nationalité et de nombreux pèlerins sont toujours confrontés à la pénible tâche d’essayer de retrouver des proches, morts ou vivants. « Nous n’avons ni dormi, ni mangé depuis la tragédie. Nous courons à pied d’un hôpital à l’autre », raconte une femme qui est sans nouvelles de son frère, porté disparu. « Nous avons donné son nom et sa photo à tous les hôpitaux » de la région.
Les autorités saoudiennes n’ont pas non plus communiqué sur les premiers éléments de leur enquête, qui « prendra (encore) du temps » selon le commandant des forces de sécurité en charge du hajj, le général Abdel Aziz al-Souly.
Cité par la presse locale, ce dernier a ajouté qu' »un rapport détaillé et complet sera soumis au Serviteur des deux saintes mosquées », le roi Salmane.
L’Iran, qui a payé le prix fort dans la bousculade avec un bilan revu à la hausse à 136 morts, 102 blessés et 344 disparus, a vivement mis en cause l’Arabie saoudite, son rival régional, et réclamé d’être associé à cette enquête.
Téhéran a convoqué samedi le chargé d’affaires d’Arabie Saoudite à Téhéran pour la troisième fois en trois jours et veut envoyer en Arabie saoudite une délégation, dirigée par le ministre de la Culture, Ali Janati.
Mais pour le grand mufti d’Arabie saoudite, cheikh Abdel Aziz al-Cheikh, la bousculade était hors du contrôle humain.
« Vous n’êtes pas responsable de ce qui s’est produit (…) Vous n’avez pas à être blâmé. Le sort et le destin sont inévitables », a-t-il dit à l’adresse du prince héritier et ministre de l’Intérieur, Mohamed Ben Nayef, qui préside également la commission du hajj.
Des pèlerins ont expliqué la bousculade par la fermeture d’une route à Mina, une ville de tentes blanches érigée près du site de la lapidation, et la mauvaise gestion par les forces de sécurité du flux des fidèles.
En Turquie, un dirigeant du parti islamo-conservateur au pouvoir a proposé que son pays organise le hajj car « les lieux saints de l’islam appartiennent à tous les musulmans », des propos dont le président Recep Tayyip Erdogan s’est désolidarisé.
Pour Abdallah al-Cheikh, président du Conseil consultatif, dont les membres sont désignés par le gouvernement, les pèlerins devraient respecter « les règles et les dispositions mises en place par les forces de sécurité ». « Ainsi, ils auront préservé leur vie, leur sécurité et facilité le déroulement des rites », a-t-il dit selon l’agence officielle Spa.
« J’espère que les organisateurs tireront les leçons pour le hajj de l’année prochaine », déclarait Abdelmahmoud Ibrahim, un pèlerin de 52 ans qui effectuait, sous un soleil de plomb, le rituel de la lapidation.
Après ce rituel, les pèlerins doivent ensuite conclure leur hajj en procédant à des circonvolutions autour de la Kaaba, au centre de la Grande mosquée de La Mecque, en direction de laquelle les musulmans prient cinq fois par jour.
Le hajj est l’un des cinq piliers de l’islam que tout fidèle est censé accomplir au moins une fois dans sa vie s’il en a les moyens. Près de deux millions de fidèles, dont 1,4 million venus de l’étranger, y ont participé cette année.
AFP / S.A.