Silencieux sur le Brexit depuis des mois, le remuant ministre britannique des Affaires étrangères Boris Johnson a mis le feu aux poudres en défendant une position diamétralement opposée à celle que devrait exposer Theresa May dans un discours prévu vendredi.
Le tacle est intervenu sous la forme d’une longue tribune publiée vendredi soir dans le Daily Telegraph, intitulée « Ma vision pour un Royaume-Uni ambitieux et prospère grâce au Brexit ». M. Johnson, qui avait fait campagne pour une sortie de l’Union européenne, y plaide pour une rupture nette avec l’Union après le 29 mars 2019, date à laquelle le Royaume-Uni est censé sortir officiellement de l’UE, et s’oppose à une période de transition.
Cet article sonne comme un défi contre la Première ministre qui a choisi de s’exprimer vendredi à Florence, en Italie, pour relancer un processus de négociation dans l’impasse avec Bruxelles et s’apprête au contraire à annoncer qu’elle souhaite une période de transition, et est prête à contribuer au budget de l’UE pendant cette période, selon plusieurs fuites.
Face à ce que la majorité des commentateurs considèrent comme une provocation pour Teresa May, son porte-parole s’est contenté d’affirmer lundi que le chef de la diplomatie britannique « soutient le projet de la Première ministre concernant le Brexit » et qu’elle n’a nullement l’intention de le congédier.
Pour le chef du Parti libéral-démocrate, Vince Cable, la décision de Teresa May sonne comme un nouvel aveu de faiblesse. Cela montre combien elle « est paralysée et impuissante » depuis le mauvais résultat enregistré aux législatives anticipées de juin par son Parti conservateur. S' »il continue à saper son autorité, le garder la rend incroyablement faible » aux yeux du public, estime également Tim Bale, professeur à l’université Queen Mary de Londres. « Mais elle est déjà incroyablement faible », a-t-il dit à l’AFP.
Un peu de « va-va-voom » dans le processus du Brexit
Dimanche, la ministre de l’Intérieur, Amber Rudd, s’était montrée plus sèche, lors d’un entretien télévisé où elle a demandé à son collègue d’arrêter « de jouer les donneurs de leçons ». Elle s’est également étonnée que Boris Johnson ait pu publier cette tribune le jour-même où le pays affrontait son cinquième attentat en quelques mois. Les amis de Boris Johnson, qui ambitionnait de devenir lui-même Premier ministre dans la foulée du référendum sur le Brexit l’an dernier, ont essayé de calmer le jeu, affirmant qu’il ne cherchait pas à se mettre en avant dans la perspective de la chute de Teresa May mais se préoccupait uniquement de l’avenir du Royaume-Uni et du contenu du discours de Florence.
« Il essaie de remettre un peu de +va-va-voom+ dans le processus du Brexit parce qu’il trouve l’ambiance trop négative », affirme l’un d’entre eux dans le Daily Telegraph lundi. Mais pour un député conservateur, le moment choisi pour le faire est « dangereux ». « Il allume la mèche qui risque bien de faire exploser la fragile unité du parti et du gouvernement », ajoute-t-il.
Le Times, qui dénonce les propositions pas très « sensées » de Boris Johnson, juge au contraire qu' »il se peut bien qu’il soit plus inquiet de son avenir » que de celui de son pays. Pour Tim Bale, le ministre des Affaires étrangères « est désespérément inquiet que le public l’oublie ou que ses collègues le marginalisent – après tout il a toujours envie d’être le leader ». « Dans l’immédiat, soit il espère que Teresa May n’aura pas l’autorité de le limoger, le confirmant comme une menace, ou qu’elle se séparera de lui, lui donnant l’occasion de se comporter comme la principale alternative si les choses vont mal pour elle », ajoute l’analyste.
Le Quotidien / AFP
Le Royaume-Uni souhaite la conclusion d’un nouveau traité sur la sécurité avec l’Union européenne après le Brexit et n’exclut pas de continuer à faire partie de l’office européen de police Europol, selon un document de travail publié lundi.
Pour le gouvernement britannique, il est « vital » de maintenir la coopération au niveau actuel avec un accord sur mesure, face à la menace terroriste qui pèse sur les pays européens, quelques jours après un cinquième attentat en six mois sur son territoire. Londres a examiné les accords conclus avec des pays tiers à l’UE comme le partage d’empreintes digitales ou l’échange des données des passagers aériens, mais considère que cela ne serait bien « inférieur » au niveau de coopération actuel. « Avec des menaces évoluant plus vite que jamais, il est dans le clair intérêt de tous les citoyens que le Royaume-Uni et de l’UE maintiennent la coopération la plus étroite possible dans la lutte contre le terrorisme, le crime organisé et les autres menaces pesant sur la sécurité », affirme Londres. « Développer un nouveau cadre pour poursuivre cette coopération requerra un niveau d’ambition partagé: le Royaume-Uni et l’UE doivent voir au-delà des accords avec des pays tiers existants », estime-t-il.
L’exécutif britannique juge également possible un accord pour rester dans le dispositif Europol et le système de mandat d’arrêt européen.
En revanche, « le Royaume-Uni ne sera plus soumis à la juridiction directe de la Cour de justice de l’Union européenne », ajoute le document, confirmant la volonté déjà exprimée par la Première ministre Theresa May.
La semaine dernière, le gouvernement britannique s’était déjà dit prêt à poursuivre « une coopération étroite » avec l’UE sur les questions de défense et de politique étrangère. Le Royaume-Uni voudrait offrir « une relation future plus étroite que n’importe quel partenariat actuel avec un pays tiers », soulignait ce document de travail.