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Birmanie : la répression se poursuit, Aung San Suu Kyi de nouveau inculpée


Malgré la répression massive et les arrestations nombreuses, la mobilisation se poursuit. (photo AFP)

Les appels à la désobéissance civile contre la junte ont continué d’être lancés mardi en Birmanie malgré le durcissement de la répression par l’armée, qui fait fi des condamnations internationales et a inculpé une nouvelle fois Aung San Suu Kyi.

Déjà poursuivie pour avoir importé illégalement des talkie-walkies, l’ex-dirigeante de 75 ans fait face à une nouvelle inculpation pour avoir violé « la loi sur la gestion des catastrophes naturelles », a indiqué son avocat Khin Maung Zaw, précisant qu’une nouvelle audience devait avoir lieu le 1er mars. Cette procédure n’a rien d’équitable, avait commenté en amont Tom Andrews, rapporteur spécial de l’ONU. « Il n’y a rien de juste dans la junte. C’est du théâtre (..) et bien sûr, personne ne les croit ».

L’ancienne cheffe du gouvernement civil est « en bonne santé », a affirmé de son côté le vice-ministre de l’Information Zaw Min Tun mardi lors d’une conférence de presse. Aung San Suu Kyi et l’ex-président Win Myint sont « dans un endroit plus sûr pour leur sécurité (…) Ce n’est pas comme s’ils avaient été arrêtés. Ils restent chez eux », assignés à résidence dans la capitale administrative Naypyidaw, a-t-il ajouté.

Interdiction des rassemblements, déploiements de véhicules blindés, interpellations nocturnes, renforcement de l’arsenal législatif : les militaires n’ont cessé de durcir le ton depuis leur coup d’État qui a mis fin à une fragile transition démocratique de dix ans.

« Les manifestations ont été violentes (…) des sanctions seront prises », a averti une nouvelle fois Zaw Min Tun.

Rendez-nous nos dirigeants »

Malgré cela, la mobilisation se poursuit. Des manifestants ont bloqué un tronçon de voie ferrée à Mawlamyine au sud de Rangoun, interrompant le service entre la ville portuaire et la capitale économique, d’après des images diffusées par un média local. « Rendez-nous nos dirigeants », pouvait-on lire sur des banderoles, tandis que des contestataires ont exhorté les employés des chemins de fer à cesser le travail. Avocats, enseignants, contrôleurs aériens, cheminots : de nombreux fonctionnaires ont déjà répondu à cet appel à travers le pays en se mettant en grève contre le putsch.

A Rangoun, des moines, qui avaient mené la « révolution de safran » réprimée dans le sang par l’armée en 2007, ont marché vers l’ambassade américaine. Non loin de là, des jeunes ont joué du violon devant un groupe de danseurs vêtus de noir, tandis que d’autres ont chanté . « Avec la chair et le sang de nos jeunes, nous essaierons de mettre fin à la dictature militaire. C’est le sens de notre chanson », a expliqué Pan, 25 ans.

Après le déploiement dimanche de véhicules blindés dans certaines villes du pays, les foules étaient toutefois moins nombreuses dans les rues. D’autant que la junte poursuit les arrestations. Quelque 400 personnes – responsables politiques, médecins, activistes, étudiants, grévistes – ont été placées en détention ces deux dernières semaines, d’après une ONG d’assistance aux prisonniers politiques. Des rapports non confirmés font état d’interpellations supplémentaires.

« Pour faire leur sale besogne »

Les généraux continuent à s’attaquer aussi aux outils de communication. Pour la quatrième fois depuis le putsch, les connexions internet ont été presque totalement coupées dans la nuit de lundi à mardi, avant d’être restaurées huit heures plus tard. « Ils ont coupé internet pour faire leur sale besogne », a déploré Win Tun, une habitante de Rangoun. « Nous n’avons pas dormi de la nuit pour voir ce qui allait se passer. »

Ces perturbations sapent « les principes démocratiques fondamentaux », a déploré l’émissaire des Nations Unis pour la Birmanie, Christine Schraner Burgener, lors d’un entretien téléphonique avec Soe Win, commandant adjoint de l’armée birmane. Les coupures nuisent aussi « à des secteurs-clés, y compris les banques », a-t-elle ajouté dans ce rare échange entre la junte et le monde extérieur.

L’armée, qui dispose de deux soutiens de taille aux Nations Unies (Pékin et Moscou), fait la sourde oreille face aux multiples condamnations internationales et aux sanctions annoncées par Washington. Depuis, les généraux putschistes ont autorisé les perquisitions sans mandat ou les placements en détention pour une courte période sans le feu vert d’un juge. Une loi très liberticide sur la cybersécurité est également en train d’être mise en œuvre.

LQ/AFP