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Autriche : un nouveau chancelier avant un nouveau duel électoral


Le drapeau autrichien flotte sur le Parlement à Vienne le 22 avril 2015. (Photo : AFP)

Le nouveau chancelier autrichien Christian Kern est investi mardi à la tête d’une coalition gouvernementale usée par neuf ans de pouvoir et incapable de contenir la progression de l’extrême droite donnée favorite pour l’élection présidentielle en fin de semaine.

Christian Kern, 50 ans, sera formellement installé dans ses nouvelles fonctions par le président de la République sortant, Heinz Fischer, en fin d’après-midi. Christian Kern, qui dirigeait jusqu’alors la compagnie nationale ferroviaire, aura pour mission de ressouder le parti social-démocrate (SPÖ), dont il prend aussi la tête, et de donner un nouveau souffle à la coalition formée avec les conservateurs de l’ÖVP.

Les deux partis ont reconduit leur alliance depuis 2007 au fil de trois élections législatives mais ont subi un revers inédit au premier tour de l’élection présidentielle, le 24 avril, où leurs deux candidats ont été éliminés de la phase finale du scrutin. Déstabilisé par cette déroute, la chancelier SPÖ Werner Faymann, au pouvoir depuis 2008, a démissionné de tous ses mandats deux semaines après l’élection, estimant n’avoir plus la confiance nécessaire au sein de son parti.

Norbert Hofer, le candidat de l’extrême droite FPÖ, est arrivé en tête du premier tour de la présidentielle avec 35 % des voix. Il affrontera au second tour, dimanche, l’ancien patron des Verts, Alexander Van der Bellen (21,3 %). Le duel s’annonce extrêmement serré. Une victoire de M. Hoffer pourrait remanier les cartes de la politique autrichienne et marquer un nouveau jalon dans une Europe bousculée par la montée des populismes.

Le président autrichien, élu pour six ans, ne participe pas à la gestion quotidienne du pays mais il dispose de pouvoirs formels étendus, notamment celui de nommer un nouveau chancelier et de dissoudre le parlement. La cohabitation avec un président d’extrême droite ne serait que l’un des défis qui attendent le nouveau chancelier, néophyte dans la conduite d’un exécutif et qui n’a même jamais été ministre. Christian Kern figurait en revanche depuis longtemps dans le carré des candidats potentiels du SPÖ pour la chancellerie, parti avec lequel il est lié depuis sa jeunesse et où il a cultivé ses réseaux.

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Ce quinquagénaire à la mise impeccable bénéficie d’une réputation flatteuse de manager performant. A la barre depuis 2010 du rail autrichien (ÖBB), il a redressé les comptes d’une entreprise plombée par les pertes mais aussi par une culture d’entreprise jugée peu compétitive, tout en cultivant de bonnes relations avec les syndicats. Sa gestion du transport et de l’assistance aux centaines de milliers de migrants ayant transité par l’Autriche durant la crise migratoire de l’été 2015 avait été applaudie pour son humanité et son efficacité.

Il part avec une bonne cote de popularité dans l’opinion publique où il est crédité de 42% d’opinions favorables, selon un sondage paru ce week-end dans le quotidien Kurier. Selon la même enquête, 77% des sondés estiment que la décision de Werner Faymann de jeter l’éponge était la plus judicieuse. Christian Kern «a une tâche herculéenne devant lui» et en premier lieu celle «de guérir les fractures du parti» divisé entre ses ailes gauche et droite, selon le politologue Thomas Hofer.

Le changement de cap du gouvernement en matière de politique migratoire avec la décision, ces derniers mois, de limiter le nombre de demandeurs d’asile et de restreindre leurs droits, a creusé les divisions au sein du SPÖ. Le parti conservateur a fait du maintien de cette ligne dure une condition de la poursuite de la coalition avec les sociaux démocrates dont le mandat court normalement jusqu’en 2018.

Christian Kern, dont la ligne politique reste encore mystérieuse, devra aussi définir la position du SPÖ vis à vis du FPÖ, certains sociaux-démocrates évoquant ouvertement des possibilités d’alliance. Issu d’un quartier populaire, diplômé en journalisme et en management, Christian Kern a travaillé comme conseiller ministériel SPÖ dans sa jeunesse. Il avait quitté la politique en 1997 pour rejoindre le groupe énergétique Verbund, dont il avait intégré le directoire avant de prendre la tête de l’ÖBB.

Le Quotidien/AFP