Près de 55 personnes ont été tuées dans un attentat au camion piégé jeudi contre un centre de formation de la police à Zliten dans l’ouest de la Libye, l’une des attaques les plus sanglantes dans ce pays plongé dans le chaos.
Un kamikaze a fait détoner les explosifs à bord d’un camion-citerne utilisé pour le transport d’eau à 8h30 locales (7h30 au Luxembourg) contre le centre où des gardes-côtes suivaient une formation, a indiqué une source de la sécurité de Zliten. Selon un témoin, il y avait quelques 300 hommes dans le complexe, la plupart des gardes-côtes qui se préparaient à leur stage dans cette ville située à environ 170 km à l’est de Tripoli.
L’attaque n’a pas été revendiquée dans l’immédiat, alors que le pays livré aux milices, est déchiré depuis plus d’un an entre deux gouvernements rivaux -l’un basé dans l’Est et reconnu par la communauté internationale et l’autre siégeant dans la capitale Tripoli.
« Entre 50 et 55 personnes ont été tuées et au moins 100 blessées » à Zliten, une cité contrôlée par la coalition des milices de Fajr Libya liée aux autorités parallèles, a déclaré le porte-parole du ministère de la Santé à Tripoli, Ammar Mohamed Ammar. Il a estimé que le bilan pouvait encore changer car les « victimes ont été transportées dans différents hôpitaux ».
Un appel au don de sang a été lancé après l’attentat survenu dans le quartier de Soug al-Talata, dans le centre-ville, qui était bondé au moment de l’attaque.
Le porte-parole de l’hôpital de Zliten Mouammar Kadi a affirmé que son établissement avait reçu jusqu’ici au moins 40 morts et 70 blessés. L’hôpital de Misrata, à quelques 70 km plus à l’ouest, a annoncé avoir reçu jusqu’ici quatre morts et une cinquantaine de blessés.
Profitant du chaos dans lequel est plongé la Libye depuis la révolte qui a mis fin en 2011 au régime de Mouammar Kadhafi, le groupe jihadiste Etat islamique (EI) s’est implanté dans le pays où il a revendiqué plusieurs attentats sanglants.
L’EI, qui contrôle la ville de Syrte (450 km à l’est de Tripoli) et cherche à élargir son contrôle à d’autres régions, combat aussi bien les forces relevant du gouvernement reconnu basé dans l’est du pays que celles relevant du gouvernement de Tripoli.
Lundi et mardi, des combats entre des gardes des installations pétrolières et des jihadistes de l’EI dans la région pétrolière stratégique du nord du pays ont fait plusieurs morts et au moins quatre réservoirs de brut ont pris feu.
Sur Twitter, l’émissaire spécial de l’ONU pour la Libye, Martin Kobler, a condamné l’attentat de Zliten et appelé « tous les Libyens à s’unir de manière urgente pour combattre le terrorisme ».
L’ONU s’efforce de mettre en place un gouvernement d’union nationale en Libye et M. Kobler a souligné la nécessité pour le Parlement légitime d’approuver rapidement sa formation en avertissant que tout retard profiterait à l’EI.
Un accord politique prévoyant un gouvernement d’entente nationale basé à Tripoli, a été signé sous l’égide de l’ONU le 17 décembre par des membres des deux Parlements rivaux, et doit être entériné avant le 17 janvier.
Après avoir condamné l’attentat, l’Union européenne et la France ont de nouveau incité les Libyens à s’unir pour faire face « au terrorisme ».
Les Occidentaux sont convaincus qu’il faut agir vite en Libye contre la menace croissante du groupe EI et poussent les Libyens à s’unir au sein d’un gouvernement qu’ils pourront soutenir en vue de faire face au groupe jihadiste.
L’EI « inquiète de plus en plus » les pays de l’Otan, « donc il est possible » qu’ils interviennent en Libye, note Malcolm Chalmers, directeur adjoint du centre de réflexion RUSI, à Londres. « La question est quelle intervention, de quelle nature, de quelle ampleur ? Cela dépendra beaucoup de l’évolution de la menace d’ici un mois ».
L’EI compte environ 3.000 combattants en Libye selon Paris. Et après l’assaut contre la région pétrolière en début de semaine, les Occidentaux redoutent qu’il s’enrichisse sur les hydrocarbures, déstabilise l’Afrique sur le flanc sud, et exporte des jihadistes vers l’Europe, infiltrés au milieu des migrants traversant la Méditerranée.
AFP