Les ministres des Affaires étrangères de l’UE, réunis lundi à Luxembourg, ont appuyé « tous les efforts » pour empêcher la Syrie de recourir à des armes chimiques, tout en appelant à relancer le processus politique pour mettre fin au conflit, après les frappes des États-Unis, de la France et du Royaume-Uni.
« Le Conseil estime que les frappes aériennes ciblées ont constitué des mesures spécifiques prises dans le seul but d’empêcher le régime syrien d’utiliser à nouveau des armes chimiques et des substances chimiques comme armes pour tuer des Syriens », indiquent les conclusions de la réunion. « Le Conseil soutient tous les efforts destinés à prévenir le recours aux armes chimiques », est-il souligné.
Le chef de la diplomatie française Jean-Yves le Drian s’est félicité de ces conclusions. « L’UE et les États membres nous ont soutenu dans cette volonté de prévenir et de dissuader toute utilisation de l’arme chimique. L’UE est donc unie », a-t-il affirmé avant de quitter la réunion. Pour le chef de la diplomatie luxembourgeoise, Jean Asselborn, les frappes occidentales de samedi sur la Syrie sont « une opération unique et elle doit le demeurer ».
« Le but de ces frappes a été de montrer qu’il y une ligne rouge qu’il ne faut pas dépasser », a expliqué son homologue belge Didier Reynders. « Nous soulignons que l’élan de la situation actuelle doit être utilisé pour revigorer le processus visant à trouver une solution politique au conflit syrien », ont insisté les 28 dans leur déclaration.
Des divergences entre États…
Ce qui ne peut se faire sans Moscou. « Sans la Russie, il est impossible de résoudre ce conflit », a reconnu le chef de la diplomatie allemande Heiko Maas. Le mot d’ordre est éviter une « escalade » militaire dans la région. « Nous devons reprendre le chemin d’un dialogue politique sur la Syrie avec la Russie et l’Iran », a renchéri Didier Reynders.
A La Haye, les ambassadeurs de Russie, du Royaume-Uni et de France se sont rendus lundi au siège de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC) pour une réunion d’urgence consacrée à la Syrie, après l’attaque chimique présumée du 7 avril contre le fief rebelle de Douma, qui a entraîné les frappes occidentales ciblées de samedi. La priorité est de permettre à l’OIAC « d’achever le démantèlement du programme ». Tous les États membres en conviennent : l’utilisation d’armes chimiques est inacceptable et ne devait pas rester impunie.
…qui profitent à la Russie
Mais les 28 étaient divisés quant à l’option militaire. A un bout de l’échiquier : la France et le Royaume-Uni. A l’autre : les neutres. Entre les deux : les membres de l’Otan, dont beaucoup sont partagés sur les frappes. « La déclaration des 28 est le maximum qui pouvait être dit », a-t-on insisté de source diplomatique. Nombre de gouvernements européens sont contrariés car ils craignent la réaction de Vladimir Poutine, soutien du président syrien Bachar al-Assad. La veille des frappes, le président russe avait mis en garde contre tout acte « irréfléchi et dangereux en Syrie » qui pourrait avoir des « conséquences imprévisibles ».
Moscou tire avantage des divisions au sein de l’Union européenne. Les réactions après l’empoisonnement au Royaume-Uni de l’ancien agent double russe Sergueï Skripal – attribué par Londres à la Russie – l’ont démontré. « Tout le monde a fait le même constat. Tout le monde a eu la même lecture des faits, mais tout le monde n’a pas répondu de la même façon », souligne une source diplomatique européenne. Au total, 19 pays membres de l’UE ont expulsé des diplomates russes de leur territoire, cinq ont simplement rappelé leur ambassadeur pour consultation et trois n’ont pas bougé (Autriche, Chypre, Grèce). Et il aura fallu beaucoup de persuasion pour convaincre les 28 d’incriminer Moscou.
Le Quotidien/AFP