L’opposant russe Alexeï Navalny a accusé le président Vladimir Poutine d’être « derrière » son empoisonnement, dans sa première interview publiée depuis qu’il est sorti de l’hôpital allemand où il a été soigné.
« J’affirme que Poutine est derrière cet acte, je ne vois pas d’autres explications », a-t-il déclaré à l’hebdomadaire allemand Der Spiegel, qui a publié jeudi matin des extraits de l’entretien sur son site internet. Ces propos interviennent alors que les dirigeants des pays européens se réunissent jeudi en sommet et que la question de la réponse de l’UE à la Russie dans cette affaire pourrait être abordée.
L’Allemagne, qui assure la présidence tournante de l’Union européenne jusqu’à la fin de l’année, a menacé Moscou de sanctions. Et la chancelière Angela Merkel est allée personnellement rendre visite à Alexeï Navalny à l’hôpital. « Mon devoir est à présent de rester comme je suis, quelqu’un qui n’a pas peur. Et je n’ai pas peur! », affirme aussi le principal opposant au Kremlin. Selon l’hebdomadaire allemand, il confirme aussi dans l’interview, dont l’intégralité doit être diffusée plus tard dans la journée, son intention de revenir en Russie une fois guéri.
Infatigable militant de la lutte contre la corruption et critique féroce du Kremlin, Alexeï Navalny, 44 ans, est tombé gravement malade le 20 août à bord d’un avion en Sibérie. Trois laboratoires européens ont conclu à son empoisonnement avec un agent neurotoxique de type Novitchok, conçu à des fins militaires à l’époque soviétique. Selon les soutiens de Alexeï Navalny, des traces de Novitchok ont notamment été retrouvées sur une bouteille d’eau ramassée dans sa chambre d’hôtel en Sibérie, où il était en campagne pour soutenir des candidats à des élections locales. Les capitales occidentales ont dès lors appelé la Russie à s’expliquer et à enquêter. Moscou rejette toutes les accusations.
« Le plan des tueurs était simple : (…) que je finisse dans un sac plastique noir »
Dans une publication récente sur son compte Instagram, Alexeï Navalny avait déjà remercié les pilotes de l’avion qui avaient atterri d’urgence à Omsk en Sibérie après qu’il s’est trouvé mal, lui sauvant la vie. « Le plan des tueurs était simple : que je me sente mal 20 minutes après le décollage, après 15 minutes que je perde connaissance et (…) une heure après que je finisse dans un sac plastique noir », y écrivait-il. Alexeï Navalny est sorti il y a une semaine de l’hôpital berlinois de la Charité, où il a été soigné pendant un mois. Il poursuit désormais sa convalescence en Allemagne qui, selon sa porte-parole, prendra « beaucoup de temps ». Il a lui-même annoncé sur Instagram avoir encore beaucoup de rééducation en perspective pour « tenir sur une jambe. Regagner complètement le contrôle de mes doigts ».
Le Kremlin a affirmé qu’il était « libre » de rentrer en Russie. Mais, en parallèle, des huissiers russes ont gelé des comptes et la part détenue par Alexeï Navalny de son appartement à Moscou lorsqu’il était dans le coma après son empoisonnement présumé fin août. Selon la porte-parole de l’opposant, ces nouvelles décisions de justice sont liées à un contentieux opposant un homme d’affaires sulfureux, réputé proche du Kremlin, Evgueni Prigojine, à Alexeï Navalny et l’une de ses alliées, Lioubov Sobol.
LQ/AFP