Au moins 29 personnes ont été tuées dans une attaque contre un rassemblement politique dans l’ouest de Kaboul, selon le ministère afghan de l’Intérieur, la première attaque du genre dans la capitale depuis l’accord conclu entre les talibans et les États-Unis.
Quelque « 29 personnes, dont des femmes, ont été tuées et 61 blessées », a déclaré Nasrat Rahimi, le porte-parole de ce ministère, sur la messagerie WhatsApp. Wahidullah Mayar, porte-parole du ministère de la Santé, a fait état de « 32 morts, dont cinq femmes, et 58 blessés ». Les talibans ont nié toute responsabilité dans cette attaque qui souligne le niveau d’insécurité auquel l’Afghanistan est confronté, alors que les États-Unis se sont engagés le 29 février au Qatar à ce que toutes les forces étrangères se retirent du pays sous 14 mois, en échange de garanties des talibans. Sur une vidéo obtenue par l’AFP, Karim Khalili, le chef du Haut conseil afghan pour la paix, un organe public, voit son discours interrompu par un feu nourri, provoquant des hurlements dans la foule.
Des photos sur les réseaux sociaux montrent des alignements de corps, dont certains ont le visage recouvert d’un morceau de tissu, signe qu’il s’agit de cadavres. De nombreux membres de l’élite politique afghane étaient présents, dont le chef de l’exécutif afghan Abdullah Abdullah, qui dit avoir remporté la présidentielle de septembre même si les résultats officiels le donnent perdant. Parmi les convives, l’ancien président Hamid Karzaï et l’ex-Premier ministre Salahuddin Rabbani avaient quitté l’évènement un peu plus tôt, a raconté Mohammad Mohaqiq, le plus connu des hommes politiques hazaras et un proche d’Abdullah Abdullah, sur la chaîne Tolonews. « Tous les responsables de haut niveau ont été évacués des lieux en toute sécurité », a commenté Nasrat Rahimi, le porte-parole du ministère de l’Intérieur. Les deux assaillants, qui avaient ouvert le feu depuis un chantier proche de l’évènement, ont été abattus, a-t-il ajouté. Le président Ashraf Ghani a dénoncé « un crime contre l’humanité », dans un communiqué.
La trêve partielle avait été levée lundi
L’attaque visait une cérémonie commémorant la mort d’Abdul Ali Mazari, un homme politique de la minorité hazara, dont les membres sont très majoritairement chiites dans un Afghanistan largement sunnite. L’année dernière, cette même cérémonie avait déjà été visée par des tirs de mortier. Le groupe État islamique avait alors revendiqué l’attentat, qui avait tué au moins 11 personnes. Cet incident survient moins d’une semaine après la signature, le 29 février, de l’accord de Doha. Une trêve partielle instaurée à la demande de Washington le 22 février avait été levée lundi par les talibans. Ceux-ci ont depuis lors multiplié les attaques contre les forces de sécurité afghanes, soulignant la difficulté d’un dialogue entre les insurgés et le gouvernement de Kaboul, autre condition de l’accord de Doha. La rencontre interafghane, prévue le 10 mars à Oslo, semble mal engagée, alors que le président afghan, Ashraf Ghani, rejette l’un des principaux points de cet accord : la libération de jusqu’à 5 000 prisonniers talibans en échange de celle de jusqu’à 1 000 membres des forces afghanes aux mains des insurgés. Vendredi, Suhail Shaheen a répété la position des rebelles sur Twitter.
Les talibans sont prêts à négocier mardi prochain « si les provisions de l’accord sont mises en place et les prisonniers sont libérés », a-t-il écrit, un retard dans les discussions ne pouvant être imputé qu' »aux autres parties ». Parmi les dispositions sécuritaires que les talibans se sont engagés à respecter figure aussi l’assurance qu’ils ne prêteront pas assistance à des groupes extrémistes et qu’ils les empêcheront de se servir de l’Afghanistan comme d’une base pour menacer la sécurité des États-Unis ou de leurs alliés. Le groupe État islamique, présent en Afghanistan depuis 2015, a multiplié les attaques contre la communauté chiite dans le pays. Ces derniers mois, il a été fragilisé par des frappes aériennes américaines et de multiples offensives des forces gouvernementales ainsi que des talibans. Chassés de son bastion du Nangarhar, province frontalière du Pakistan, ses combattants demeurent présents dans le territoire voisin du Kunar ainsi qu’à Kaboul.
LQ/AFP