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Abolition du changement d’heure : oui, mais laquelle choisir ?


Globalement, "le changement d'heure perturbe notre horloge interne". (illustration AFP)

Heure d’hiver ou heure d’été ? La Commission européenne veut mettre fin aux changements d’heure, en laissant chaque pays trancher. Un choix qui pourrait avoir des conséquences dans des domaines aussi variés que la santé ou les transports.

Santé

Globalement, « le changement d’heure perturbe notre horloge interne qui contrôle nos différents rythmes biologiques », souligne Véronique Fabre, chercheuse à l’Inserm. Lors du passage à l’heure d’été, le « manque de sommeil peut provoquer une chute de l’attention, occasionner de la somnolence, de la nervosité ou dégrader l’humeur », selon la chercheuse.

Cette perte d’une heure de sommeil s’inscrit dans le cadre d’un manque de sommeil plus général qui inquiète les médecins. Différentes études font état d’une hausse des infarctus du myocarde ou des crises cardiaques après le passage à l’heure d’été. « A priori on est quand même fait pour vivre avec le soleil », rappelle Joëlle Adrien, spécialiste du sommeil à l’Hôtel-Dieu à Paris. En France l’heure d’été correspond à deux heures d’avance sur l’heure solaire, ce qui « n’est pas une bonne idée ». Des spécialistes des rythmes biologiques recommandent de rester à l’heure d’hiver.

Énergie

Le changement d’heure a été instauré en France en 1976, après le choc pétrolier, dans le but de limiter l’utilisation de l’éclairage artificiel. Selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, qui avait lancé en 2006 une étude d’évaluation des impacts énergétiques du régime d’heure d’été, actualisée en 2009, « le changement d’heure permet des économies d’énergies et de CO2 réelles mais modestes, pour un coût quasi-nul de mise en œuvre ». En 2010, elle chiffrait les gains sur l’éclairage à 440 GWh, soit l’équivalent de la consommation en éclairage d’environ 800 000 ménages, grâce au passage à l’heure d’été.

Agriculture

Le monde agricole penche plutôt pour l’heure d’hiver. « Durant les moissons, en plein été, on a un décalage de deux heures avec l’heure solaire. Du coup on démarre plutôt tard et on est obligé parfois de finir de nuit », explique Luc Smessaert, membre de la commission changement climatique à la FNSEA. Les agriculteurs, calés sur le soleil, « auraient intérêt à avoir la même heure toute l’année », souligne-t-il. Par ailleurs, le changement d’heure « est toujours un moment de stress par rapport aux animaux ». Pour les producteurs laitiers par exemple, « on a besoin d’avoir une régularité au niveau de la traite, qui est un phénomène physiologique ». « Le changement horaire est plutôt fait pour un monde urbain, que pour un monde rural qui prend en compte le cycle de la nature », selon lui.

Sécurité routière

Les périodes d’obscurité prolongées dues au passage à l’heure d’hiver constituent un risque accru pour les cyclistes, piétons ou utilisateurs de trottinettes. Pas ou mal éclairés, ils se retrouvent moins visibles, notamment aux heures de pointe des trajets domicile-travail le matin et le soir. Sur la période 2008-2017, 43% des piétons tués annuellement l’ont été entre octobre à janvier.

Les accidents à vélo en nocturne augmentent aussi. « Il n’est pas très facile de voir quel effet ça aurait », concède le délégué interministériel à la sécurité routière Emmanuel Barbe. « Mais ça pourrait éviter un effet d’à-coup car il y a une chose qui est certaine, c’est qu’aujourd’hui il y a un effet (sur la mortalité) à cause du changement brutal des conditions de lumière » du jour au lendemain.

Transport aérien

Les compagnies aériennes s’inquiètent surtout de problème d’organisation, alors que les programmes des vols sont en général construits 12 à 18 mois en avance, et de l’adoption de créneaux horaires différents. « Il est important de garantir une harmonie au niveau européen par l’adoption d’une position commune sur ce sujet », souligne un porte-parole d’Air France.

LQ/AFP