Victimes de leur succès ou impossibles à réguler… Les trottinettes en libre-service ne sont plus les bienvenues à Paris, où les habitants sont appelés à voter le 2 avril pour décider de leur avenir.
Accusées de joncher l’asphalte malgré les 2.500 emplacements dédiés, de frôler à toute vitesse les piétons sur les trottoirs ou de ne pas être si écologiques que cela en raison d’un mauvais bilan carbone supposé, ces engins partagés n’ont pas réussi le pari de la cohabitation avec les autres usagers de la rue.
Alors que le contrat passé en 2020 par la mairie avec les trois opérateurs Dott, Lime et Tier, d’un montant annuel de 907.000 euros, arrive à échéance fin mars, la maire socialiste Anne Hidalgo a confié aux Parisiens le soin de statuer sur leur avenir à travers un référendum simplifié.
Le 2 avril, ces derniers pourront dire « oui » ou « non » aux trottinettes, à condition de se déplacer dans un des bureaux de vote de la capitale.
Une douzaine de sociétés en 2018
« Avec plus de deux millions d’usagers uniques ayant utilisé le service (…) cette année (2022, ndlr), ayant permis d’éviter l’émission de 700 tonnes de CO2 en 2021 dans la capitale, nous sommes convaincus que les Parisiens ont pris conscience du rôle que les micromobilités décarbonées jouent », ont réagi dans un communiqué les trois opérateurs, faisant état de 400.000 utilisateurs différents en octobre et d’une hausse de 71% des trajets depuis octobre 2020.
En 2018, une douzaine de sociétés s’étaient installées dans la capitale française avec leurs trottinettes en libre-service, mais les dérives ont amené la ville à limiter le marché à trois exploitants en 2020.
En 2019, un décret avait déjà encadré leur utilisation: il fixe l’âge minimum d’utilisation à 12 ans, limite leur vitesse à 25 km/h, interdit la circulation sur les trottoirs et l’usage à plusieurs, et les oblige à être équipés de feux de position avant et arrière.
Des avancées « insuffisantes »
Après la mort d’une Italienne de 32 ans en juin 2021, percutée par une trottinette électrique sur laquelle se trouvaient deux personnes, Paris avait obligé les opérateurs à brider la vitesse à 10km/h dans 700 zones denses. A l’instar de Paris, d’autres capitales comme Stockholm, Oslo et Copenhague ont fortement encadré l’usage des trottinettes en libre-service.
Mardi, le ministre délégué aux Transports Clément Beaune est venu au secours des opérateurs parisiens en se prononçant pour un « plan de régulation » national plutôt que pour une interdiction. Il craint notamment de « casser un mode de transport qui peut être écologique ».
Dans un communiqué, l’opposition de droite a estimé qu’une suppression ne « règlera pas tout le problème ». « Cela fait deux ans et demi que nous avons mis en place le maximum de régulations autorisées par la loi et que nous demandons au gouvernement de nouveaux outils pour réguler les trottinettes en libre-service, sans aucun résultat à ce jour », a réagi auprès de l’AFP l’adjoint parisien chargé des transports David Belliard, qui critique aussi la « faible durée de vie » des trottinettes.
Un problème sanitaire majeur
Malgré des avancées, il juge encore « très insuffisantes » les mesures prises ou envisagées par les opérateurs pour améliorer la cohabitation avec les autres usagers de la rue, citant des technologies qui permettraient d’empêcher de circuler à deux, sur les trottoirs ou en état d’ivresse.
Les accidents et blessures liés à l’utilisation des trottinettes électriques sont, en outre, devenus un problème sanitaire majeur.
En 2022, 22 décès accidentels dus aux engins de déplacement personnel motorisés – qui réunissent, outre la trottinette électrique, le monoroue, le gyropode et l’hoverboard – ont été répertoriés en France, contre dix en 2019, selon un rapport de l’académie nationale de médecine publié en novembre 2022, citant des chiffres de la sécurité routière.