Dans le nord, Wincrange, la plus vaste commune du pays malgré ses 4 000 habitants, va accueillir un parc éolien ultramoderne d’ici la fin de l’année, capable de produire l’équivalent de la consommation de 13 000 habitants.
Les sept éoliennes plantées sur le plateau de Weiler doivent produire l’équivalent d’une cinquantaine d’éoliennes des années 2000. Le futur, on y est!
Au lieu d’un «parc éolien», c’est une ligne, un chemin qui façonne l’horizon de Wincrange avec une certaine élégance. Peut-être qu’un jour, des artistes peindront ce paysage comme un tableau bucolique. En attendant, d’ici la fin de l’année, la commune du Nord accueillera «le parc éolien le plus innovant du pays». Avec une telle annonce, on s’attend à tomber sur un champ de moulins blancs. Il n’en est rien.
La société Oekostroum Weiler, fondée spécialement pour la construction et la gestion du parc, a choisi des éoliennes Siemens dernière technologie. Résultat : «Une éolienne de ce type produit sept fois plus électricité qu’une éolienne des années 2000», lâche fièrement Frank Muller, administrateur délégué de la société EMCA, principale partenaire du projet avec la société Becolux et le gouvernement. Au final, les sept éoliennes du projet restitueront l’énergie de 50 éoliennes du passé!
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De près, les «demoiselles» sont également impressionnantes : 142 mètres de haut, des pales de 113 mètres de diamètre, un moteur à entraînement direct, donc moins bruyant… Pour la petite histoire, il a fallu mobiliser la grue la plus haute d’Europe, capable de se déployer jusqu’à 200 mètres de haut, pour achever les premiers modèles!
Un chantier de titan qui rend fier le bourgmestre de Wincrange, Marcel Thommes, à la tête de 4 000 administrés. «Il a tout de même fallu convaincre, glisse-t-il. Non pas que les gens étaient contre. Mais ce genre de projet fait peur, il faut inclure les citoyens pour les informer concrètement.» Marcel Thommes a visiblement assisté à des débats déchaînés de l’autre côté de la frontière, en Belgique, lors d’implantation d’éoliennes. «Des conférences où le bourgmestre finissait par dire aux agriculteurs : « mais vous croyez quoi? L’investisseur s’en fout de votre avenir! » Franchement ce n’est pas constructif.»
Des compensations écologiques
À Wincrange, le projet a fait l’objet d’une maturation pendant dix ans. Tout s’est accéléré l’an dernier, avec la construction des premiers socles. «La société Oekostroum a dû négocier avec une trentaine d’agriculteurs pour rassembler les terres, détaille Christine Lutgen, conseillère communale. Il fallait bâtir les éoliennes, mais aussi assurer les compensations écologiques de la déforestation.»
Le parc en lui-même, encore une fois une ligne de crête, s’étale sur quatre kilomètres de long. Les douze hectares monopolisés (dont 3,3 hectares de déforestation) ont été compensés par 21 hectares d’arbres et de prairie naturelle. Car ces oiseaux d’acier peuvent en gêner d’autres! Le Milan royal surtout, qui vole autour de 150 mètres de haut, avant de fondre sur sa proie.
Pour préserver le rapace, tout un écosystème a été mis en place : les prairies naturelles seront tondues régulièrement pour laisser apparaître les mulots et autres bestioles appréciés par le Milan royal. «La société Oekostroum crée comme « un garde-manger » censé détourner l’attention de l’oiseau, explique Christine Lutgen. Il fera donc ses nichées loin du tracé des éoliennes.» En espérant que ça marche… Les dirigeants d’Oekostroum, Frank Muller en tête, ont visiblement visité des parcs éoliens où le système était testé avec succès.
Revenons aux hommes : le nouveau parc fournira l’équivalent de la consommation énergétique de 13 000 ménages par an. Virtuellement, cette électricité sera vendue sur un marché de l’énergie renouvelable. Mais concrètement, ce sont les ménages aux alentours qui bénéficieront de cette énergie verte dans leurs prises. Pour brancher son ordinateur, ça ne changera rien. Pour la planète en revanche, c’est un sacré gain.
Hubert Gamelon
D’autres projets en cours
Le gouvernement, qui compte de nombreux écologistes, dont le secrétaire d’État au Développement durable, Camille Gira, met les bouchées doubles sur les énergies «propres». «Avait-on du retard sur l’éolien par rapport à nos voisins? Je ne sais pas, a répondu Camille Gira. Toujours est-il qu’avant la fin de la mandature, nous aurons de l’avance… Nous avons presque atteint les quotas d’éoliens qui étaient fixés pour 2020!»
Francine Closener, secrétaire d’État à l’Économie, précise en chiffres : «Nous devrions les dépasser de 20 %. En fait, trois autres projets éoliens doivent émerger dans les prochaines années, dont un à Differdange et un autre à Garnich.»
Malgré tout, le Luxembourg importe encore 96 % de son énergie et les énergies renouvelables ne représentent que 5 % de l’ensemble de la consommation…