Le Luxembourg ne totalise même pas 2 % de logements sociaux. L’État débloque désormais des places sur les logements de service inoccupés. Alors que l’offre immobilière reste saturée au Luxembourg, les premiers exclus sont les classes précaires.
C’est une maison luxembourgeoise comme une autre. «Ça pourrait être votre voisin», résume Gilles Hempel, chargé de direction de l’Agence immobilière sociale (AIS). Deux étages, quatre chambres, une salle de bains avec baignoire. Une jolie maison de Rodange, ni trop petite ni démesurée, comme l’État luxembourgeois en a sur les bras. Des logements de service inoccupés pour différentes raisons : disparition d’un métier (douaniers des postes frontières), mutation d’une fonction. «Tous les policiers devaient vivre dans le périmètre de leur commissariat à une époque, cite en exemple Gilles Hempel. L’État offrait donc un logement à moindres frais.»
Des logements vides en pleine pénurie
Aujourd’hui, plus de 20 % de ces logements de service sont vides. 67 sur les 302 du pays, plus précisément, alors que le Luxembourg connaît une crise du logement qualifiée de «pénurie» par tous les observateurs avisés. «Les premières victimes de cette raréfaction des biens sont les plus démunis, développe Gilles Hempel. Quand on est au salaire minimum avec plusieurs enfants, le moindre faux pas devient interdit. Les loyers sont devenus trop élevés (lire ci-contre).» D’où une idée simple, née d’un partenariat entre les fédérations sociales comme l’AIS et l’État : récupérer des logements de service et les louer à bas prix aux ménages en difficulté.
Lundi matin à Rodange, c’est une famille avec quatre enfants qui a récupéré les clefs. Comme toutes les autres, elle a dû satisfaire à des conditions précises auprès de l’office social, regroupées sous l’onglet «détresse logement». Ce qui en dit long sur leur situation précédente. La maison, vide depuis un an, était occupée par un douanier. «Ça va nous aider à reprendre notre vie en main», témoigne simplement la mère du foyer. La famille va pouvoir louer à tarif préférentiel pour trois ans maximum.
Le secrétaire d’État au logement, Marc Hansen, leur a remis les clefs en personne. «Ces passerelles vers les logements de service ont été votées en décembre, glisse-t-il. On ne peut pas dire que la précarité augmente de façon exponentielle. En revanche, nous constatons que les efforts en faveur des mal-logés restent insuffisants. D’où la recherche de nouvelles solutions.» Le Luxembourg n’est doté que de 1,5 % de logements sociaux. «L’association Caritas a récemment estimé les mal-logés à plus de 30 000 dans le pays», enfonce Gilles Hempel. Ce n’est pas les 76 logements de service disponibles qui vont changer la donne. Même si concrètement l’idée est bonne.
Hubert Gamelon
Les prix s’envolent
Face à la pénurie de logements, les plus démunis sont les premiers touchés», affirme l’Agence immobilière sociale. Et pour cause. Selon le ministère du Logement, le prix moyen de l’achat d’un appartement au Luxembourg est passé de 3 877 euros/m2 à 4 531 euros/m2, entre 2009 et 2014. L’inflation est moins prononcée pour la location d’appartements : les loyers moyens sont passés de 1 128 euros/mois en 2009 à 1 207 euros/mois en 2014. Quoi qu’il en soit, des tarifs trop élevés pour les familles précaires. En même temps qu’un indicateur de bonne santé pour le reste du pays, car la demande ne fléchit pas.