Actuellement encore en phase de test, une navette autonome circule dans la rue de l’Alzette. Elle devrait prochainement faire partie du quotidien des Eschois.
La commune d’Esch-sur-Alzette a décidé, dans le cadre d’Esch 2022, de redynamiser son centre-ville. Une navette autonome identique à celle qui a circulé au Pfaffenthal, va participer à cette entreprise. La rue de l’Alzette est une des plus longues rues commerciales du Luxembourg et d’Europe. Des commerces s’y étalent sur près d’un kilomètre. La navette va relier la place du Brill à la place Norbert-Metz aux deux extrémités. Elle est exploitée par l’entreprise Sales-Lentz.
«Nous nous trouvons dans les étapes finales de programmation. Dès que tous les tests de sécurité et de programmation auront été réalisés, nous pourrons la mettre en service. Des programmations doivent être effectuées pour relier la navette à son parcours et au centre de contrôle Navya qui a une main mise sur le véhicule en permanence», explique Xavier Kieffer, directeur commercial et marketing chez Sales-Lentz, qui précise : «Nos opérateurs vont être formés dans les prochains jours à ce nouveau trajet et à la mise au dépôt.»
Les paramètres les plus compliqués à prendre en compte pour les programmateurs sont ceux de l’environnement et de la météorologie. Certains environnements ne sont pas propices aux navettes comme les rues étroites ou arborées qui vont compliquer la connexion satellite, les objets qui changent de place régulièrement… «Chaque trajet a ses spécificités et il est impossible de les reproduire d’un parcours à l’autre, précise le directeur commercial et marketing. Ces navettes sont destinées au last mile, les trajets très courts. Ce sont des ascenseurs horizontaux.»
Par mesure de sécurité, la navette avancera à une vitesse de 8 kilomètres par heure dans la rue de l’Alzette. Au beau milieu même. «D’un côté de la rue, il y a les piliers et les lampadaires. En haut de la rue, il y a beaucoup de terrasses de café. Le milieu s’impose de manière naturelle», explique Xavier Kieffer. Son parcours sera rythmé par différents arrêts qui permettront aux usagers de monter et de descendre au plus proche de l’endroit où ils souhaitent se rendre. Huit personnes pourront prendre place à l’intérieur de la navette avec l’opérateur.
Le projet qui éveille déjà une curiosité certaine au sein de la population eschoise, sera présenté officiellement ce vendredi par les autorités communales eschoises dans le cadre de la semaine européenne de la Mobilité. La date de mise en service de la navette autonome reste un secret bien gardé, même s’il se murmure que la commune aimerait déjà l’avoir en activité encore cette année.
Une technologie en évolution
Il s’agit du même modèle que celui qui circulait au Pfaffenthal à Luxembourg. Navya n’a développé qu’un seul modèle qui est constamment amélioré et mis à jour au niveau technologique ou du confort. Sales-Lentz est en partenariat avec la société française qui mène des projets de navette partout dans le monde, comme le projet Horizon 2020 qui englobe les deux projets de navette à Luxembourg et à Esch-sur-Alzette. En parallèle, les études pour développer et faire évoluer les techniques de conduite autonome se poursuivent. «Par la suite, il faudra adapter les législations européennes et nationales à ce type de mobilité, comme la conduite totalement autonome», explique Xavier Kieffer. Sans oublier les questions des assurances et de signal data aux passages de frontière.
La navette de la Métropole du fer n’est pas encore totalement sur les rails que Sales-Lentz envisage déjà d’autres projets du même type dans d’autres communes luxembourgeoises et sur le site d’une grosse société industrielle. «Le site sera fermé et privatif, nous n’aurons donc pas besoin d’opérateur à bord. Le but est de promouvoir le service à la demande sur un même site. Sur une application, il sera possible d’appeler la navette. Ce sera la prochaine évolution dans la programmation de Navya», explique Xavier Kieffer. Les tracteurs industriels autonomes, comme ceux utilisés sur les aéroports, sont une autre application de cette technologie. Sales-Lentz participe avec sa filiale belge Voyages Léonard et Flibco à un projet européen de navette autonome à l’aéroport de Charleroi.
Xavier Kieffer en est convaincu, les solutions de transports autonomes vont devenir de plus en plus présentes dans nos quotidiens. «Nous avons été consultés par un cabinet d’architectes qui développe un projet d’écoquartier à Luxembourg. Les habitants devront laisser leurs voitures à l’extérieur du quartier. Les navettes autonomes peuvent être des solutions pour les ramener jusqu’à leur domicile de manière écologique sans émissions et sans nuisance sonore. Les tracteurs autonomes pourraient être utilisés pour sortir les poubelles ou pour effectuer des livraisons volumineuses», explique-t-il.
Actuellement encore, les navettes ne sont pas entièrement autonomes. La loi requiert la présence d’un opérateur à leur bord pour assurer la sécurité des usagers et reprendre la main sur la technologie en cas de déficience ou d’imprévu.
Les Eschois ont la parole
«Tant que je peux me déplacer à pied, je me déplace à pied. Je ne la prendrai certainement pas», lance une dame, catégorique, interrogée ce mardi matin au sujet de la navette automatique à l’essai dans la rue de l’Alzette. «Je pense que je tenterai un essai. Un bus qui roule tout seul, quand on était jeunes, on nous disait que c’était de la science-fiction», raconte un Eschois croisé dans l’artère commerçante de la Métropole du fer. «Je n’en ai pas entendu parler», avoue Gino en rigolant. «C’est ce truc qui roule en faisant ding, ding? L’idée est bonne», reconnaît-il après avoir découvert le concept. «Il faudra voir à l’usage.»
«Ce sera pratique pour les personnes qui vont au marché. Elles n’auront plus à porter leurs sacs sur toute la longueur de la rue», indique le serveur chez Kaf Lokal. «Les gens en parlent de manière très positive», ajoute-t-il. Sa collègue, Alice, approuve également l’initiative. «C’est super! Les personnes âgées qui ont du mal à marcher ou des problèmes de santé vont pouvoir en profiter. Je ne sais pas si cela va ramener du public en centre-ville, mais pourquoi pas. Il faut juste espérer que les jeunes ne vont pas la détériorer.» Plus économique qu’un taxi, la navette est bien accueillie par les personnes croisées.
Sophie Kieffer