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Tramway de Luxembourg : «Nous ne sommes pas encore à 100 %»


Le tram va pouvoir repartir au maximum de ses capacités quand la situation l'exigera (Photo : Archives LQ).

Assurer la continuité des transports et garantir la sécurité des salariés, telles sont les priorités de Luxtram depuis le début de la crise, selon André von der Marck, son directeur général.

Les travaux du tram ont été interrompus, comme tous les autres chantiers au Luxembourg, par la crise du coronavirus. Les cadences des trams ont été réduites. Comment avez-vous organisé le quotidien au sein de Luxtram depuis le début de la pandémie ?

André von der Marck : Un certain nombre de nos salariés sont en télétravail, une quinzaine sur les 115. La direction générale est restée sur le pont pour assurer la gestion au jour le jour de la crise. Les choses évoluent très vite. Tous les jours, on a de nouvelles informations sur le virus et donc nous les distillons au jour le jour pour améliorer notre management. En termes de gouvernance, nous sommes restés en contact étroit avec la délégation du personnel qui a été très proactive dans la gestion de cette crise. Un point de la situation est réalisé deux fois par semaine au niveau de la direction générale.
Nous avions deux objectifs. Le premier était d’assurer la continuité des transports. Le deuxième était d’assurer la sécurité sanitaire de nos salariés de sorte que chacun puisse profiter de la même protection selon un souci d’égalité de traitement.

Ces mesures se sont-elles révélées efficaces ou des salariés ont-ils été touchés par le coronavirus ?
En termes pratiques, nous avons mis en place un cloisonnement au niveau des équipes. Les équipes de maintenance travaillaient une journée sur deux sans jamais se rencontrer de sorte que si un cas se présentait, nous puissions l’isoler. Nous sommes allés encore plus loin en ce qui concerne les conducteurs. Avoir un service réduit nous a permis de créer deux équipes : chaque conducteur a sa propre rame qu’il conduit toute la journée. Une rame n’est plus conduite par plusieurs conducteurs sur une même journée. Le soir, les rames sont nettoyées et désinfectées de manière très consciencieuse. Tout cela était accompagné des gestes barrières et, depuis le 20 avril, nous avons mis en place l’obligation de porter des masques. Toutes ces mesures ont fait en sorte que pour l’instant nous n’avons pas de cas déclaré de membre du personnel touché par le coronavirus.

Vous êtes donc totalement en capacité d’augmenter les cadences de roulement du tram lors des prochaines échéances du déconfinement.
L’ensemble de notre personnel est effectivement mobilisable. À partir de la semaine prochaine, nous allons augmenter légèrement notre exploitation. Nous sommes constamment à l’affût du nombre d’utilisateurs pour pouvoir coller à la demande. Pour vous donner un ordre de grandeur, avant la crise, nous étions dans les premiers jours du mois de mars à 32 000 voyageurs par jour et, depuis le 16 mars, nous sommes à un peu moins de 2 000 voyageurs par jour. On constate un effet important du confinement. Nous augmenterons nos fréquences d’exploitation, au fur et à mesure que le déconfinement se mettra en place. Nous pourrons également rouvrir les dimanches. Nous l’annoncerons certainement dans les prochains jours.

Avez-vous eu le temps, dans les tout premiers jours de mars, de remarquer un effet de la gratuité des transports en commun sur la fréquentation du tram ?
Tout est allé très vite. Les chiffres dont nous disposons à ce jour ont très peu de signification. Il nous faut davantage de chiffres sur la durée pour mesurer si la gratuité a eu un réel impact et tirer des conclusions.

Quelles répercussions la crise du Covid-19 aura-t-elle pour Luxtram ?
La première répercussion se situe au sein de l’entreprise où nous avons dû modifier nos conditions de travail et nos règles. Ensuite, nous avons su préserver notre capacité d’adaptation. Ce qui fait qu’aujourd’hui nous sommes arme au pied, prêts à monter en puissance dès qu’il le faudra. Nous avons cette semaine également commencé à lancer les chantiers. L’équipe qui a en charge la maîtrise d’ouvrage a pu, avec les bureaux d’études et les entreprises, s’occuper du lancement. Nous ne sommes pas encore à 100 %, ce qui est normal étant donné que les entreprises doivent repartir avec l’application de nouvelles règles sanitaires que nous leur imposons en raison des directives du gouvernement. Cela prend un minimum de temps de mise en place et d’adaptation. Cette crise a quand même fortement impacté nos manières de travailler.

Le chantier du tramway indemnise
ce qu’aucun autre chantier de voirie ne fait !

Les chantiers du tram reprennent doucement. Lesquels ont été relancés en priorité ?
Nous avons repris partout où nous nous étions arrêtés. Nous sommes présents sur l’avenue Émile-Reuter où nous faisons des travaux de voirie, au boulevard Royal où nous posons les rails… Au niveau de l’avenue de la Liberté, nous avons dû arrêter la plantation des arbres. Il reste dix-huit arbres à planter. Ils le seront à partir de mardi prochain à raison de trois par jour. Les transports depuis les Pays-Bas sont possibles. J’ai eu le feu vert ce matin. Les arbres seront donc plantés dans les quinze prochains jours dans la période propice. Les travaux de voirie vont continuer en parallèle ainsi que, sur la place de la Gare, les travaux de la plateforme sur laquelle reposeront les rails.

Est-ce que ce temps d’adaptation, qui s’ajoute aux semaines au cours desquelles les chantiers ont été arrêtés, signifie des retards à prévoir ?
Si j’avais une boule de cristal, je vous le dirais. Il y a un mois et demi encore, je ne pensais pas que nous serions arrêtés pendant cinq semaines. Tout le monde subit ce virus et la crise. Je ne suis pas aujourd’hui en mesure d’en évaluer les conséquences. Nous ferons au mieux et nous espérons qu’il n’y aura pas de seconde vague de contamination et que le déconfinement se passera le mieux possible. Nous serons capables d’évaluer les conséquences sur notre planning et l’impact sur la mise en service dans les prochaines semaines.
La priorité pour nous est la sécurité de nos salariés de manière à pouvoir mener ce chantier à son terme dans les meilleures conditions possibles. La mise en service ne signifie pas uniquement terminer les travaux. Il faut également recruter des conducteurs et cette procédure a, elle aussi, été interrompue. Il faut les former… Il s’agit en réalité d’un ensemble de choses. Une donnée importante est le congé collectif. Nous ne savons pas encore s’il sera maintenu ou pas. Tous les acteurs sont sensibles à la question et essayent de faire au mieux.

La semaine passée, le ministre de la Mobilité et des Travaux publics, François Bausch, indiquait que cette reprise des chantiers alors que toute l’activité n’avait pas encore repris permettait à certains endroits de soulager les automobilistes ou les riverains, comme par exemple dans l’avenue de la Gare à Luxembourg.
Les commerces ne sont pas fermés au motif du chantier du tram. La situation que les commerçants viennent de vivre ces dernières semaines est liée à un virus. Nous essayons de faire en sorte que les choses aillent mieux. Quand les commerces rouvriront, nous continuerons à être à leurs côtés pour faire en sorte que le chantier soit le moins pénalisant possible sur l’activité commerciale.

Lundi dernier, lors du conseil communal de Luxembourg, il a été question de la situation des commerces qui subissaient les effets du virus après avoir pour certains dû subir les effets du chantier du tram. Le conseiller communal socialiste Gabriel Boisante a notamment dit que « le problème n’était pas la vitesse d’exécution, mais la nature des indemnités mises en place ». Qu’en pensez-vous ?
Une procédure est en cours en termes de compensation financière des commerçants. Nous avons plus d’une vingtaine de dossiers en cours d’examen. Ils notifient l’activité de ces commerces en 2019. Le principe est de compenser la perte ou le manque à gagner des commerces à hauteur de 50 % si les entreprises nous présentent des dossiers bien ficelés. La commission chargée de cette question tranchera le moment voulu. Généralement sur les chantiers, il n’y a pas d’aides. Le chantier du tramway indemnise ce qu’aucun chantier de voirie ne fait au Luxembourg ! Je crois que c’est quand même assez positif.

Quelles sont les prochaines grandes étapes du tram à Luxembourg ?
Une fois que nous aurons atteint la gare, nous nous attaquerons au tronçon supplémentaire qui nous permettra d’atteindre le lycée de Bonnevoie. C’est un chantier que nous enclencherons en 2021. Des études de faisabilités sont en cours en ce qui concerne le tronçon vers la route d’Arlon.

Entretien avec Sophie Kieffer