Invités au Grand-Duché, les commerçants de Saragosse ont plutôt rassuré leurs collègues de l’Union commerciale de la ville de Luxembourg sur l’impact des travaux du tram.
Lorsque les commerçants de la ville pensent au tram, ce n’est pas nécessairement la confiance qui règne. Particulièrement dans le quartier de la gare. Mais à Saragosse, une ville qui vient de passer par là, le chiffre d’affaires des boutiques n’a baissé que de 5% pendant les travaux. C’est ce que leur a dit, vendredi, la présidente de l’Union des commerçants de la ville espagnole, invitée à Luxembourg.
Luxtram, qui souhaite que la paix sociale règne autour du grand projet de la capitale, avait lancé l’idée d’une rencontre entre les commerçants de Saragosse et ceux de la capitale. Alors que les Luxembourgeois s’apprêtent à entrer dans une période de travaux qui devrait durer jusqu’en 2021, les Espagnols sortent du même genre de chantier. Chez eux, celui-ci s’est achevé il y a deux ans (lire ci-dessous) et, visiblement, tout le monde est ravi.
Le rendez-vous, qui n’était pas ouvert à la presse, s’est déroulé vendredi dernier en soirée. Une date pourtant pas idéale pour des commerçants qui se préparent pour la grosse journée du samedi. La rencontre a réuni François Bausch, ministre du Développement durable et des Infrastructures, Guill Kaempff, président de l’Union commerciale de la ville de Luxembourg (UCVL), Thierry Nothum, président de la Confédération luxembourgeoise du commerce (CLC), et les représentants de Luxtram, dont son directeur général, André Von Der Marck.
« C’était une belle présentation, marquée par un grand optimisme , a relevé Guill Kaempff dans un sourire. Comme nous, les commerçants espagnols avaient une certaine crainte et se posaient beaucoup de questions avant le démarrage du chantier .» Pourtant, à Saragosse, tout semble s’être bien passé lors des travaux. « Ils ont réagi rapidement, notamment en mettant en place une excellente communication en direction des clients », reconnaît Guill Kaempff.
Un de chevaux de bataille des commerçants a été de conserver l’attractivité du centre historique de cette grande ville touristique (680 000 habitants). Pour ce faire, ils ont lancé plusieurs types d’opérations. « Les commerçants de Saragosse ont mis en place des points de rassemblement autour de certaines stations de tram dans le centre, où ils organisaient très souvent des concerts. Les habitants ont vite pris l’habitude de s’y regrouper », raconte-t-il.
La fin des travaux, «un soulagement»
Mais la meilleure nouvelle de cette réunion a sans doute été l’annonce, par la présidente de l’Union des commerçants, que la diminution du chiffre d’affaires des magasins situés à proximité des travaux ne tournait autour de seulement 5 %. « Si c’est ce qui nous attend, nous serons tous plus qu’heureux », a glissé Guill Kaempff, apparemment un brin sceptique.
Le tram n’a donc visiblement pas traumatisé les commerçants espagnols, qui n’en voient aujourd’hui que des bénéfices. « Ils nous ont dit qu’ils avaient gagné en tranquillité, assure Guill Kaempff. Le trafic a baissé. Non seulement, il y a moins de voitures, mais il y a aussi trois lignes de bus en moins dans le centre. Une fois les travaux passés, ça a été un soulagement .»
Les commerçants luxembourgeois ont apprécié de pouvoir partager avec leurs homologues espagnols, même si toutes les expériences ne seront sans doute pas transposables. À l’heure actuelle, par exemple, il n’est pas prévu de créer des points de rencontre où seraient organisés des concerts. La communication autour du chantier n’a pas non plus été réellement amorcée.
Mais l’UCVL a le temps. La première phase des travaux, qui durera jusqu’à la fin 2017, ne concerne que le Kirchberg, où les commerces ne sont pas si nombreux. La poursuite du tracé sur le boulevard de la Foire, l’avenue Émile-Reuter et le boulevard Royal devrait gêner davantage les automobilistes que les commerçants. Finalement, c’est lorsque le chantier atteindra la place de Paris et qu’il se déplacera vers la gare que les nuisances seront les plus fortes, mais nous n’y sommes pas encore…
Erwan Nonet
À Saragosse, le frère jumeau
Avec 680 000 habitants, Saragosse (au nord de l’Espagne) est la cinquième plus grande ville du pays. Le tram qui circulera à Luxembourg ressemblera comme deux gouttes d’eau à celui de la capitale de l’Aragon. Comme Luxtram, Saragosse a effectivement choisi le constructeur espagnol CAF et son modèle Urbos 3.
La ville espagnole avait en outre sélectionné la solution technique retenue par Luxtram : ces fameux accumulateurs de charge rapide qui récupèrent de l’énergie lors des freinages et permettent de se passer des caténaires pendant une partie du trajet. De cette façon, les supercondensateurs peuvent être rechargés par biberonnage lors des arrêts sur le tronçon sans fils. Dans la cité qui borde l’Ebre, le tram circule sans caténaires sur deux kilomètres. Cela en fait le plus long du genre en Espagne. Au total, la longueur de la ligne qui traverse la ville du Nord au Sud est de 12,8 kilomètres.
Pour comparaison, en 2021, la ligne luxembourgeoise parcourra 16 kilomètres entre le Findel et la Cloche d’or. Entre l’arrêt Kirchberg-Pfaffenthal (pont rouge) et la gare centrale (soit 3,6 km), on ne verra pas les caténaires.
À Saragosse, une grande promenade de près de 2 kilomètres a été créée, le vieux centre est devenu piéton et un tapis vert de 40 000 m 2 marque désormais l’emplacement des rails dans plusieurs secteurs. Le long de la voie, 1 076 arbres ont été plantés.
La mise en service du premier tronçon du tram de Saragosse s’est effectuée le 19 avril 2011 alors que la deuxième phase a été inaugurée le 26 mars 2013.