Le Science Center de Differdange a inauguré, il y a un mois, le premier planétarium du pays. On fait le bilan entre deux constellations.
Détendus, presque allongés, nous traversons, sourire aux lèvres, les anneaux de Saturne, frôlés par les milliers d’éléments faits de matière rocheuse et de morceaux de glace qui les constituent. Ce voyage vers l’infini et au-delà ne se fait pas depuis Kourou ou Cap Canaveral, mais depuis Differdange.
Exactement depuis le planétarium flambant neuf du Luxembourg Science Center. Inauguré le 20 décembre, le lieu offre une immersion complète dans le cosmos. «Cette idée est née de notre envie de diversité», annonce Nicolas Didier, président et fondateur du lieu, de retour de New York pour quelque temps.
«Ici, nous touchons à toutes les sciences et l’espace était en développement. Le planétarium constituait l’outil idéal pour montrer de nombreuses choses comme des films, le système solaire, le cosmos…»
Les images diffusées sur ce dôme de six mètres de diamètre proviennent des spécialistes du domaine comme l’Agence spatiale européenne. Plus de cent thèmes représentant les différents phénomènes astronomiques sont projetés en haute définition via un projecteur digital, sur toute la surface de la demi-sphère.
L’expérience devient totale avec le son dont les basses font vibrer les corps des spectateurs assis dans cette bulle. Détail amusant, ceux qui prennent place dans le planétarium se retrouvent dans une position similaire à celle qu’adopte l’être humain lorsqu’il se trouve en apesanteur. «On veut créer des frissons et des émotions», sourit le directeur.
Le projet est apparu dans l’esprit de ce dernier il y a deux ans environ. Pour le faire éclore au milieu des 80 stations interactives de la grande salle d’exploration du Science Center, il a fallu ruser. Avec un plafond haut de 4,10 m, difficile d’imaginer un dôme énorme de plusieurs mètres de hauteur.
«Nous avons creusé dans le béton», explique Nicolas Didier. «Et la position couchée permet de profiter de l’ensemble de l’image.» Au total, jusqu’à 26 personnes peuvent s’asseoir dans cet espace et des places prévues pour les personnes handicapées ont été installées.
En compagnie des scientifiques
«Nous sommes là pour sensibiliser, aider les gens à comprendre les questions de notre monde en leur faisant voir les choses par eux-mêmes», expose Nicolas Didier. «Nous travaillons pour la citoyenneté.» Depuis octobre 2017 et l’ouverture du Luxembourg Science Center, son directeur s’est donné cette mission.
Pour accomplir cette tâche, il a su trouver des alliés de choix : les médiateurs scientifiques. Des experts de la science, de la technologie et, ici, de l’espace qui peuvent répondre à n’importe quelle question et ont les connaissances pour s’adapter à n’importe quel public.
«Il y a une liaison directe entre la personne qui fait le show et donne le show. Ailleurs, c’est artificiel, c’est du théâtre, ici, ce sont des scientifiques», appuie le directeur. Julien Laigle est l’un de ces spécialistes qui, en plus de connaître le ciel comme sa poche, est capable d’expliquer les phénomènes du cosmos avec précision. Il écrit lui-même ses visites et s’ajuste au cas par cas.
Il anime avec d’autres collègues les shows à l’intérieur du dôme. Sept sont proposés chaque jour. Depuis sa tablette, il pilote les spectateurs entre les constellations, les nébuleuses et les planètes, tout en décrivant la magie de l’infini qui nous entoure.
Deux types de présentation sont proposés à ceux qui pénètrent dans le planétarium : des films ou des voyages interactifs. Dans les deux cas, le public peut prendre la parole. Le médiateur s’adapte aux questions posées en prenant des exemples ici et là dans le cosmos.
Et des questions, il y en a des tas ! Celle qui a le plus marqué Julien a des allures philosophiques et vient de la curiosité d’un enfant : «Qu’est-ce qui arrive si on tombe dans un trou noir ?»
À l’intérieur de la demi-sphère, Julie Laigle a des superpouvoirs. Il est capable d’allumer des constellations, de maîtriser les cycles jour-nuit et d’entrer dans la matière. Du faisceau de son laser, on passe en revue la constellation d’Orion qui représente un gigantesque chasseur, puis l’on passe à l’étoile de Sirius dont le diamètre fait 600 fois celui du Soleil, avant de plonger dans les couleurs hypnotisantes des nébuleuses.
«Avec cet outil, on peut entrer très profondément dans la matière», détaille Julien. Complètement immergé dans l’obscurité pendant 45 minutes à une heure, le spectateur a des étoiles plein les yeux, au propre comme au figuré.
Le public au rendez-vous
En pleine crise du Covid-19, le Luxembourg Science Center a largement gagné son pari en inaugurant le premier planétarium du Grand-Duché. Unique lieu de ce genre dans la Grande Région, il permet à tous les publics d’accéder facilement aux univers fascinants de nombreux domaines sans avoir à se déplacer jusqu’à la Cité des sciences de Paris.
«Au niveau des chiffres, nous avons pu observer une hausse de 45 % de la fréquentation du grand public en 2021 par rapport à 2019, énonce Nicolas Didier. En revanche, pour ce qui est de la fréquentation des scolaires, nous avons subi de fortes baisses. Il nous est arrivé de n’avoir qu’une seule classe dans tout le musée en raison des mesures sanitaires.»
«Une chose nous diffère des autres, nous sommes intégrés dans les programmes scolaires», constate Nicolas Didier. «Nous voulons développer l’intérêt pour les sciences et les technologies.» Une idée qu’il poursuit en proposant aux élèves du pays une aire dans leur orientation dans les métiers de la science.
Si le Luxembourg Science Center a subi de plein fouet, comme de nombreux musées, la pandémie, sa volonté de se renouveler et de diversifier les thèmes qu’il explore lui a permis de se relever. D’après les chiffres cités par son directeur, 25 % du public du lieu est constitué de personnes qui n’en sont pas à leur première visite et 10 % sont des parents d’élèves qui décident de suivre les conseils de leur progéniture.
Espace et climat, les nouveautés du Science Center
Nicolas Didier appuie volontairement sur ses deux ambitions pour le Luxembourg Science Center : de la diversité et du renouveau. Lors de notre visite, il nous a annoncé deux grandes nouveautés allant dans ce sens.
Pour la première, nous restons la tête dans les étoiles, car il s’agit d’un observatoire astronomique qui prendra place sur le toit du musée à Differdange dans quelques mois. Il permettra au public de se plonger encore un peu plus dans l’infini de l’espace et d’y découvrir les merveilles qu’il recèle.
La seconde surprise du directeur concerne le climat. «Nous n’avons pas encore assez traité ce thème au sein du Science Center», avoue-t-il. Une lacune qui va être bien vite comblée, car un programme spécifique sur le climat qui s’étalera sur cinq ans sera développé au sein du musée dans les années à venir.
Financé par l’Œuvre nationale de secours Grande-Duchesse Charlotte ainsi que par le ministère de l’Environnement, il aura pour objectif de sensibiliser le public aux questions environnementales. Les films et la médiation seront au cœur de ce projet.