Deux couples de cigognes blanches ont niché dans le sud du pays. Mais à cause du froid et de l’humidité des mois de mai et juin, seul un petit s’est envolé.
La troisième année du retour des cigognes blanches au Luxembourg aura été la pire pour ces grands oiseaux qui ont beaucoup souffert des mauvaises conditions météo. Sur les sept jeunes qui sont nés cette année, un seul est parvenu à quitter le nid.
Après plus d’un siècle d’absence, cela fait désormais trois ans que les cigognes sont revenues nicher au Grand-Duché. Cet évènement positif a été rendu possible par les efforts qui ont permis de renaturer les rives de l’Alzette entre Bergem et Schifflange, à Lameschmühle.
En effet, le cours d’eau canalisé a laissé la place à une vallée inondable lors des fortes pluies, ce qui a entraîné une explosion de la biodiversité. La présence de nombreux batraciens, d’insectes et de petits poissons est une aubaine pour les cigognes, puisqu’il s’agit ni plus ni moins de leur menu! Le retour de ces majestueux oiseaux était donc très attendu.
Ces trois dernières années, donc, un couple de cigognes a élu domicile sur le nid artificiel installé par natur&ëmwelt. «Ce sont les deux mêmes cigognes tous les ans, relate l’ornithologue Patric Lorgé. Les cigognes sont des oiseaux qui ont leurs petites habitudes!» Cette fidélité au lieu montre qu’elles se sentent bien là où elles sont. Preuve que la renaturation est un indéniable succès. «Si elles ne trouvaient pas suffisamment de nourriture, elles ne reviendraient pas», assure le scientifique.
«C’est malheureux, mais il faut l’accepter»
À Bettembourg, tout près, un autre couple est revenu après un premier séjour l’an passé. Là encore, le couple était le même qu’en 2015, la femelle y était déjà en 2014. Elle avait été baguée à Karlsruhe. L’an dernier, trois petits s’étaient envolés du nid, ce qui avait été une excellente nouvelle.
Malheureusement, cette année a été beaucoup plus difficile. «Les conditions météorologiques exécrables ont provoqué une situation dramatique, explique Patric Lorgé. L’humidité et la fraîcheur au printemps sont les pires conditions pour les jeunes cigognes.»
Avec une nature qui tarde à démarrer, le garde-manger habituel a été réduit à la portion congrue. Les parents ont donc eu toutes les peines du monde à nourrir leurs petits qui, eux, souffraient du froid et de l’humidité dans le nid.
Quatre petits cigogneaux sont nés à Bettembourg et à Lameschmühle, trois œufs ont tout de même éclos. Mais sur ces sept petits, un seul a survécu à ce printemps inhabituellement pourri. «C’est malheureux, bien sûr, mais il faut aussi l’accepter, soupire Patric Lorgé. C’est la nature et nous n’y pouvons rien…» Il faut simplement espérer qu’il fasse meilleur aux mois de mai et juin prochains pour que ces oiseaux emblématiques ne perdent pas leurs nouvelles habitudes et aillent choisir un autre endroit pour nicher.
Car une fois qu’elles sont parties, il n’est jamais évident de faire revenir les cigognes. Une portion de la Syre, aux alentours de Munsbach, a également été renaturalisée et un nid artificiel y a été installé il y a plusieurs années. «Nous avons observé beaucoup de cigognes dans ce secteur, mais aucun couple n’y a encore niché», regrette-t-il.
Les raisons de ce désamour, jusqu’à présent, sont difficiles à évaluer. «Nous ne comprenons pas vraiment pourquoi… Peut-être que l’emprise de la renaturation n’est pas assez grande pour leur procurer suffisamment à manger», lance l’ornithologue.
Erwan Nonet
Pour les rapaces, ça a été dur aussi
Il n’y a pas que les cigognes qui ont souffert du printemps affreux, les rapaces aussi. «Il y avait tant d’eau que les espèces qui nichent au sol n’ont pas eu de petits du tout», souligne Patric Lorgé. Même si les rapaces qui nichent au sec n’ont pas été touchés par les inondations, c’est indirectement qu’ils ont été impactés. «Comme il n’y a pas eu beaucoup de souris non plus, ils ont eu des difficultés à nourrir leurs petits et il y en a très peu qui se sont envolés…» Là aussi, un printemps désastreux provoque pratiquement la disparition d’une génération.