Un vigneron qui ne peut pas faire déguster son vin est, quelque part, un vigneron malheureux. La réouverture possible des terrasses de l’Horeca le 7 avril serait aussi celle des bars à vin des domaines. Quand bien même les règles seraient strictes, cette réouverture serait une vraie bouffée d’air frais.
Marc Desom : «Si c’est cela la nouvelle normalité, eh bien, allons-y!»
Le changement de paradigme qui, avec l’arrivée du printemps, pourrait voir la fin de l’hibernation de l’Horeca a fait du bien au moral de Marc Desom (caves et domaine Desom, à Remich). «Je ne comprends pas les gens qui continuent à râler sur les réseaux sociaux, souffle-t-il. Ces annonces donnent quand même de nouvelles perspectives et, pour une fois, elles sont positives. Cela faisait longtemps que ce n’était pas arrivé alors profitons-en!»
Le patron de cette belle maison familiale est concerné en premier lieu avec son Pavillon, à la fois salle de dégustation et restaurant de qualité. «Pour l’instant, je finalise les projets pour la relance, je ne peux pas vous dire grand-chose parce que tout n’est pas bouclé», indique-t-il. Habituellement, le Pavillon Desom est ouvert de 14 h à 22 h alors, bien sûr, il va falloir trouver un nouveau concept. «Mais cela ne me dérange absolument pas, sourit-il. Il va bien falloir comprendre que le monde d’après ne sera pas celui d’avant, plus rien ne sera pareil. Et si c’est cela la nouvelle normalité, eh bien, allons-y ! En tant que vigneron, avec le changement climatique, nous devons nous adapter aux nouvelles lois de la nature. Pour le business, finalement, c’est la même chose. On ne peut pas diriger une entreprise quand on n’est pas capable de se remettre en question.»
Il est en tout cas convaincu que, si elle le peut, la clientèle reviendra, comme cet été où le Pavillon a très bien fonctionné. «Les gens vont venir prendre l’air et se promener sur la Moselle et nous, nous serons là pour les accueillir avec une belle coupe de crémant, de bons petits plats et une belle vue sur la rivière!»
Patrick Berg : «L’avantage, c’est que l’on pourra déguster avant d’acheter»
Pour le directeur de Vinsmoselle, l’annonce de Xavier Bettel «donne un peu d’espoir», ce qui est toujours bon à prendre par les temps qui courent. «Les terrasses des Escales à Wormeldange et Remerschen ouvriront dès qu’elles le pourront, de 10 h à 18 h», promet-il. Des horaires qui, finalement, lui conviennent plutôt bien. «Nos clients, ce sont surtout des personnes plus si jeunes qui viennent prendre l’apéritif à 11 h ou 11 h 30 et des promeneurs qui viennent boire un verre après leurs balades. Contrairement au Pavillon de Marc (Desom), les Escales ne sont pas à proprement parler des lieux de sorties, mais plutôt des endroits où l’on vient faire une pause dans la journée. Et de toute façon, nous ne faisons pratiquement pas de restauration, nous avons juste quelques petites choses à grignoter pour accompagner le verre.»
Ce qui lui fait plaisir, c’est que les Escales vont de nouveau permettre aux clients de goûter les vins avant de les acheter. «Normalement, l’avantage de venir acheter son vin directement chez nous plutôt qu’au supermarché, c’est que l’on peut les déguster avant d’acheter. C’est la raison d’être de nos Escales. Il faudra évidemment respecter toutes les mesures sanitaires, espérer qu’il fasse suffisamment beau pour pouvoir s’installer en terrasse, mais cette réouverture sera un vrai plus pour nous.»
Cette lueur qui pourrait annoncer, enfin, une dynamique positive, lui permet même d’oser le rêve fou de la tenue du Proufdag le 1er mai, cette traditionnelle journée de dégustation du nouveau millésime qui a lieu dans le grand hall de la cave de Remerschen. «Si les restaurants ouvrent complètement d’ici là, oui, ce serait possible…, glisse-t-il. Si nous avons la possibilité de le faire, même avec des tables de 2 ou 4 et sans self-service, nous l’organiserons!» Bon, précisons tout de même qu’un plan B est tout de même étudié… «Je suis tiraillé entre le réalisme et l’idéalisme!», reconnaît Patrick Berg en souriant.
Jean-Marie Vesque : «Autant préparer au mieux les beaux jours !»
À Hëttermillen, entre Stadtbredimus et Ehnen, Jean-Marie Vesque (domaine Cep d’or) a de la chance : il possède sur le toit de sa cave l’une des plus grandes terrasses de la Moselle! Une aubaine compte tenu de la situation. Alors, bien sûr, il aimerait beaucoup lui aussi que l’annonce de Xavier Bettel puisse se concrétiser : «Il s’agirait d’un premier pas, d’une toute petite ouverture, mais je serais très content parce qu’elle indiquerait que nous nous dirigerions dans la bonne direction. Et puis, cela tombe bien : nous ouvrons traditionnellement la terrasse pour le week-end de Pâques, nous serons presque dans les temps!»
Prévoyant, il a anticipé dès cet hiver cette (possible) nouvelle dynamique en achetant de nouveaux meubles destinés pour la terrasse. «Autant préparer au mieux les beaux jours! En respectant toutes les distances, nous pourrons installer confortablement une quinzaine de personnes supplémentaires. Quand la terrasse sera pleine, nous n’aurons pas à nous plaindre!»
Lui aussi est plutôt confiant sur le retour des clients. «À Remich, le parking des camping-cars est toujours plein. Sur la route du Vin, le week-end, on voit passer de grands groupes de cyclistes : les gens ont envie de sortir. Nous l’avons bien vu l’été dernier où même en semaine, la terrasse était bien fréquentée. Et avec toutes les mesures que nous respecterons totalement, je pense que tout le monde se sentira en sécurité et que les gens prendront plaisir à venir nous voir.» Il se réjouit déjà de pouvoir leur présenter les nouveautés de sa gamme, dont un crémant Riesling brut nature (zéro dosage) millésimé 2016, un rosé bio (cabernet noir) parfait pour les terrasses et le retour de ses cabernet blanc, muscat ottonel et gewurztraminer qui étaient en rupture de stock.
Erwan Nonet