Déi Lénk vient de déposer deux recours devant le tribunal administratif par rapport au gardiennage privé sur la voie publique à Luxembourg.
Société de gardiennage et surveillance privée, suite. Depuis le 1er décembre dernier, des agents d’une société privée de gardiennage et de surveillance sont présents, en vertu d’une convention passée avec la Ville, dans la Ville-Haute et le quartier Gare. Et à partir du 15 mai, ils circuleront également dans le quartier de Bonnevoie. Et ces dernières semaines, l’opposition communale, c’est-à-dire déi Lénk, déi gréng et le LSAP, est montée au front contre cette décision du collège échevinal DP-CSV.
La Gauche va aujourd’hui plus loin. Les conseillers communaux déi Lénk de la capitale, Guy Foetz et Ana Correia da Veiga, ont introduit deux recours devant le tribunal administratif, l’un contre les décisions de la ministre de l’Intérieur, Taina Bofferding, et l’autre contre les décisions du collège des bourgmestre et échevins de la capitale. «Nous avons bien conscience de la situation difficile particulièrement dans le quartier de la Gare et on ne la minimise pas. Mais ce n’est pas comme ça qu’on va régler le problème de la toxicomanie par exemple, avance Guy Foetz. Nous demandons que le collège échevinal respecte les limites de l’État de droit. En engageant une société privée de gardiennage et de surveillance, le collège échevinal attaque l’État de droit.» Et plus particulièrement, selon déi Lénk, une des bases de l’État de droit, à savoir le monopole étatique en matière d’exercice de la force publique.
Le conseiller communal a ensuite détaillé l’argumentaire des deux recours. Selon Guy Foetz, «au regard de la Constitution, seule une loi peut régir les attributions des forces de l’ordre. Quant à la loi relative aux activités privées de gardiennage, elle ne prévoit aucunement la possibilité de charger des acteurs privés de missions de surveillance générale des voies publiques à caractère préventif. Ce type de mission de police administrative relève exclusivement de la police grand-ducale. Or, malgré une reformulation des conventions avec les sociétés de gardiennage en direction d’une surveillance des biens communaux, la pratique de la surveillance générale de la voie publique perdure et elle est assumée par le collège échevinal de la Ville.»
«Il faut investir dans le social»
Dans son recours visant la ministre de l’Intérieur, Taina Bofferding (LSAP), déi Lénk déplore dans un communiqué «son inaction à l’encontre de ces agissements anticonstitutionnels et illégaux, malgré deux demandes écrites».
Déi Lénk estime également qu’«au cours des deux dernières semaines, le collège échevinal a eu tendance à exagérer certains agissements criminels et à faire croire que la police serait dépassée par les événements. Une telle présentation de la part des responsables municipaux tend à créer un climat d’insécurité et de méfiance, qui ne correspond pas à la réalité.» «C’est de la paranoïa stimulée», estime Guy Foetz.
Pour la Gauche, «il faut investir dans le social», lance le conseiller communal. Car, peut-on lire dans le communiqué de déi Lénk, «le gardiennage privé n’augmente objectivement en rien la sécurité des citoyens et qu’il vaut mieux utiliser les fonds en question pour renforcer la politique de prévention, d’aide aux toxicomanes et de médiation dans les quartiers Gare et Bonnevoie». «On ne nie pas les efforts de la Ville, avance Ana Correia da Veiga. Mais il faut aller plus loin. Par exemple, on pourrait investir le budget dédié à la société de gardiennage (64 023 euros du 1er décembre 2020 au 31 janvier 2021) dans le renforcement du projet d’Inter-Actions « À vos côtés », qui fait de la médiation et prône le dialogue dans le quartier grâce à de jeunes travailleurs issus du quartier. Il faut aussi une décentralisation d’Abrigado pour réduire la pression sur les quartiers de la Gare et de Bonnevoie. Il faut créer plusieurs structures définitives pour accueillir les toxicomanes. Il faut également accélérer le « housing first » en créant plus de logements encadrés. On a besoin d’une vraie politique sociale.»
Guillaume Chassaing
«On continue le combat politique»
Depuis l’engagement de la société de gardiennage privée par le collège échevinal de la capitale, déi Lénk, déi gréng et le LSAP faisaient front commun contre cette décision. Ils ont notamment fait une conférence de presse et déposé une motion ensemble. Mais déi Lénk dépose seul ses recours devant le tribunal administratif (l’un contre les décisions du collège échevinal de la capitale et l’autre contre les décisions de la ministre de l’Intérieur). Pourquoi le LSAP et déi gréng ne font pas partie des requérants? «Ils nous ont proposé de faire ce recours avec eux, mais il n’y avait pas une unanimité dans notre groupe, répond Tom Krieps (LSAP). Je soutiens ce combat de déi Lénk. Mais nous n’avons pas voulu aller sur le terrain juridique. Nous allons poursuivre notre combat politique contre ces décisions. Plus que jamais vu la surenchère verbale de ces derniers jours de la part du collège échevinal.»
De son côté, Christa Brömmel (déi gréng) estime que «nous avons fait du bon travail à trois pour forcer le débat et présenter les arguments. C’est la décision de déi Lénk d’aller sur le terrain judiciaire. C’est légitime. Pour notre part, nous allons continuer notre travail sur le plan politique.»