Les professionnels du tourisme souffrent énormément depuis plus d’un an. Globalement, l’activité du secteur a chuté de 60 %, souligne l’Office régional du tourisme (ORT) mosellan dans son dernier rapport d’activités. Mais derrière ce voile se cachent aussi d’encourageantes nouvelles.
L’Office régional du tourisme (ORT) Visit Moselle vient de dresser le bilan 2020 et, personne ne sera surpris, il n’est pas rose. Confinement, limitation des déplacements, réapparition des frontières, distanciation sociale, fermeture de l’Horeca, limitation des jauges d’accueil et on en passe sûrement : avec des contraintes comme celles-là, comment voulez-vous réussir une belle saison?
Les mauvais chiffres ne sont pas surprenants, ils restent toutefois saisissants : -60 % d’activité moyenne (sources : Statec), -55 % de la fréquentation des bureaux d’accueil (offices de tourisme… sources : Luxembourg for Tourism), -42 % de nuitées d’hôtels (sources : Statec), -70 % de nuitées à l’auberge de jeunesse de Remerschen (sources : Centrale des auberges de jeunesse luxembourgeoises), -42 % de nuitées dans les gîtes et les Airbnb (sources : Statec), -65 % de nuitées dans les campings (sources : Statec).
Dans l’introduction du rapport d’activités 2020, le président de l’ORT, Gilles Estgen, n’hésite pas à déclarer qu’«on dirait que nous avons vécu la crise la plus grave de l’histoire du tourisme». Depuis la guerre, c’est très probable…
Ceci étant dit, il paraît clair que la cause du problème est conjoncturelle et pas structurelle. La pandémie est la seule responsable de ce triste état des lieux et il y a tout lieu de penser qu’une fois qu’elle sera derrière nous, le tourisme – comme les autres secteurs sinistrés, dont l’Horeca – repartiront. Il faudra du temps pour récupérer les niveaux d’avant-crise, c’est évident, mais le besoin de respirer et de profiter de la région n’en sera que plus grand.
Ruée sur les «boucles de rêve»
Ce appétit pour s’aérer le corps et l’esprit s’est d’ailleurs traduit par de jolis résultats, rendus possibles par un été chaud et sec, propice aux activités extérieures. «Le tourisme actif (randonnée et vélo) a connu un vrai essor», rappelle Gilles Estgen. Il a également noté «un certain regain du tourisme domestique, qualifié de « plus sûr » et par certains de « patriotique », les vacances à domicile représentant un effort national pour relancer ce secteur».
Ainsi, les compteurs placés sur les Traumschleifen, ces randonnées «boucles de rêve» labellisées par l’Office allemand de la randonnée, ont enregistré plus de 21 000 passages. C’est beaucoup : deux fois plus qu’en 2019. Cet intérêt massif pour la marche à pied justifie d’ailleurs les efforts entrepris pour uniformiser le marquage des sentiers dans le pays par la Direction générale du tourisme dépendant du ministère de l’Économie, l’administration du Cadastre et de la Topographie et les acteurs locaux.
Le Vëlosummer, opération lancée par le ministère pour réserver des routes aux cyclistes en août a également été un vrai succès, malgré toutes les critiques entendues. Plus de 40 000 amateurs ont ainsi emprunté ces chaussées sans auto, et notamment les 85 km de la route régionale E, qui serpentait entre les vignes et la vallée de la Syre. Cet engouement a convaincu les autorités à renouveler l’expérience cette année, du 31 juillet au 29 août.
Fidéliser les touristes locaux
Face à cette redécouverte de nos territoires et de leurs attraits, tout le défi du monde d’après-Covid sera de réussir à conjuguer le retour des touristes d’avant avec le maintien de la fréquentation des touristes de 2020. Gilles Estgen ne dit pas autre chose : «Peut-on fidéliser les touristes locaux une fois que nous serons plus libres de circuler?»
Pour y parvenir, l’ORT a travaillé sa communication et développé de nouveaux outils. Puisque l’accès physique aux informations n’a jamais été aussi compliqué, le volet numérique est particulièrement travaillé. Ces efforts ont permis d’augmenter l’audience virtuelle de l’ORT qui a gagné sur la période 1 406 abonnés Facebook et 1 033 sur Instagram.
Pour répondre aux nouvelles problématiques, Visit Moselle a également rapidement mis en place un nouveau système de billetterie en ligne généré par Regiondo et accessible depuis son site web (onglet «Tickets», sur www.visitmoselle.lu). Cette nouvelle fonctionnalité a permis, notamment, de gérer sans fausses notes les nouvelles jauges d’accueil du public. Pas moins de 31 385 tickets ont ainsi été vendus pour les sites culturels, les piscines, les cinémas, les attractions en plein air, les randonnées guidées à pied ou à vélo, le tourisme fluvial…
Une app pour le tourisme fluvial
De nouveaux contenus numériques sont apparus et d’autres sont sur le point de l’être. Le dépliant Guided Tours (qui reprend les circuits culturels et thématiques) est désormais disponible en version digitale. Les trois Pocket Guides (qui compile 61 sentiers de randonnée répartis sur les 14 communes de l’Est) également. Ces derniers sont d’ailleurs les brochures les plus demandées en 2020, devant 100 Things to Do et Vëlokaartent & Rent a Bike.
Au rayon des nouveautés à paraître, l’ORT va très bientôt proposer deux nouveaux Läuschtouren, ces balades guidées où l’on suit toutes les informations sur son smartphone. Elles permettront de découvrir Schengen et Remerschen.
L’Office du tourisme a également décidé de répondre à l’invitation de la base de loisirs nautiques de Basse-Ham et de la Société publique Moselle Nord Plaisance qui vise à créer une app trilingue (français, allemand, anglais) dédiée au tourisme fluvial transfrontalier franco-luxembourgeois.
Elle permettra de donner toutes les informations pratiques aux bateliers naviguant sur la Moselle (carburant, accastillage, alimentation…) mais aussi de livrer tous les renseignements pour profiter au mieux de son passage dans la Grande Région (sentiers, pistes cyclables, restauration, patrimoine culturel…).
Finalement, la pandémie a permis d’accélérer le renforcement d’une offre qui perdurera même lorsque le ciel se dégagera. La crise, c’est aussi le rebond!
Erwan Nonet
Le tourisme boosté par l’ouverture des terrasses?
Jeudi, Xavier Bettel à confirmé à la Chambre l’autorisation d’ouverture des terrasses à partir de mercredi prochain. Cette décision concerne les cafés et les restaurants, mais aussi les domaines viticoles qui seront prêts à faire déguster leurs vins aux visiteurs, proposition qu’ils ne pouvaient pas faire jusque-là. Évidemment, la météo de la semaine prochaine promet d’être exécrable, il faudra donc sûrement attendre un peu avant de voir les bouchons sauter un peu partout.
Néanmoins, les vignerons se souviennent de l’été dernier, où leurs Wäistuffen avaient été fréquentées comme jamais. «Le Pavillon a extrêmement bien marché, rappelle Marc Desom (Domaine et Caves Desom, à Remich). Nous n’avions jamais eu autant de personnes venant de la capitale et beaucoup continuent aujourd’hui à passer commande.»
Ern Schumacher (domaine Schumacher-Lethal, à Wormeldange) enchérit : «Les portes ouvertes pendant la fête des Vins et Crémants (NDLR : deux week-ends en novembre) ont été un succès incroyable, je n’avais jamais vu ça et jamais vendu autant de vins à cette occasion!»
Autant de raisons de voir d’un très bon œil cette petite ouverture vers un retour à la normalité tant espérée. «Deux personnes par table, ce n’est pas beaucoup : je ne pourrai accueillir que neuf couples sur la terrasse, ce sera vite plein!», reconnaît Jean-Marc Schlink (Caves Schlink, à Machtum), qui dispose d’une belle Wäistuff entre Grevenmacher et Machtum.
Pour profiter au mieux de cette possibilité, il ouvrira un peu plus tôt qu’en temps normal, dès midi plutôt que 14 h. Il a également commandé de nouveaux meubles pour améliorer le confort et uniformiser sa terrasse.
E. N.