Il a 15 ans, est issu de l’école régionale de musique de Mondorf-les-Bains, partage sa vie entre Rome et la cité thermale. Thomas Cremmer, joueur d’euphonium et collectionneur de premiers prix.
Il peut parler des heures durant de son instrument, de son histoire, de ses plus grands maîtres. À 15 ans, Thomas Cremmer est intarissable sur le sujet, passionné et passionnant quand il raconte sa vie de jeune musicien, entre Rome et Mondorf-les-Bains. Il est le seul Luxembourgeois à avoir remporté le premier prix du concours international Golden Classical Music Awards 2020 qui lui a donné son ticket pour jouer le 1er novembre prochain au Carnegie Hall à New York.
L’euphonium, il en est tombé amoureux à l’âge de 9 ans quand son professeur Olivier Gravier, le directeur de l’école régionale de musique de Mondorf-les-Bains, lui a mis l’instrument entre les mains. Thomas jouait de la trompette depuis deux ans déjà quand il lui fut suggéré de choisir l’euphonium dont l’embouchure convenait mieux à sa morphologie.
Ce solide adolescent aime le son de son instrument qu’il compare à une voix. Étymologiquement, euphonium provient du grec ancien et signifie «le beau son». «L’extension de l’euphonium est illimitée, des euphonistes arrivent à faire 5 octaves et ça ressemble à la voix humaine. Moi j’arrive à trois octaves et demie», raconte Thomas.
Il a toujours aimé ça, la musique. Sa maman chante, son papa joue du piano. «Quand il était petit, je lui proposais des livres, mais ce n’était pas vraiment son truc. En revanche, quand je le mettais devant le xylophone, il pouvait expérimenter des sons pendant des heures», témoigne sa maman, Daniela.
C’est donc tout naturellement que Thomas rejoint l’école de musique (anciennement UGDA) à Mondorf, apprend le solfège et la trompette. C’est un élève brillant qui, à l’âge de 11 ans, doit suivre sa mère, fonctionnaire européenne, à Rome. Inscrit depuis deux ans au lycée musical Farnesina dans la capitale italienne, il ne veut pas couper le lien avec la cité thermale où il a grandi et revient deux fois par mois pour suivre les cours en parallèle avec son professeur de toujours.
Peu de pièces symphoniques
«J’ai encore beaucoup à apprendre avec Olivier Gravier et il est un de mes professeurs préférés», confie le jeune musicien, reconnaissant, qui rate des dates dans le calendrier des masterclass dans les grandes capitales européennes pour revenir régulièrement à Mondorf.
Mais cela ne l’a pas empêché de décrocher des premiers prix à Bruxelles et à Vienne aux concours Virtuoso, et un prix spécial de la Sacem au concours des jeunes solistes à Luxembourg.
«Cette expérience de Virtuoso m’a donné le goût et l’envie de m’améliorer encore parce que j’ai vu des enfants de dix ans jouer des pièces magnifiques», raconte-t-il.
Thomas saisit son lourd instrument et interprète un extrait des Tableaux d’une exposition du compositeur russe Modeste Moussorgski, une des pièces les plus célèbres pour euphonium. À l’écouter, on comprend mieux pourquoi il évoquait «le son sombre, chaud et enveloppant» de son instrument. «J’aime beaucoup cette œuvre et j’irai l’écouter le 24 février à Rome dans l’interprétation de l’orchestre philharmonique de la Scala de Milan», se réjouit l’adolescent en reposant son euphonium.
«Il y a rarement des pièces pour orchestre symphonique, c’est surtout dans les brass bands ou les orchestres harmoniques que l’on trouve l’euphonium», explique le jeune Thomas en ajoutant que l’instrument ne date que du XIXe siècle alors que les œuvres majeures avaient déjà été écrites. Sans lui.
Pour la petite histoire, quand sa mère est allée l’inscrire à Rome dans un conservatoire, le personnel de l’établissement a refusé de croire qu’un gamin de 10 ans pouvait se trimbaler avec un euphonium de 7 kilos.
Son instrument voyage avec lui deux fois par mois entre Rome et Mondorf. Thomas a choisi une vie d’artiste, encouragé par ses parents et ses professeurs. Et s’il s’apprête à aller jouer à New York, accompagné par la pianiste Olga Volkova, il ne manquera aucun concert de son école de musique mondorfoise, ni aucun défilé pour la kermesse du village. Il y tient. Son rêve? Faire venir un jour à Mondorf Steven Mead, grand nom de l’euphonium. C’est jouable.
Geneviève Montaigu
L’euphonium, ce méconnu
Cuivre d’origine anglaise dont la forme rappelle le saxhorn basse, doté de 3 ou 4 pistons, l’euphonium se différencie du saxhorn par sa perce plus grosse (diamètre de la branche d’embouchure) et sa sonorité plus douce et plus ronde. Voilà ce que l’on peut lire sur Internet. Mais c’est Thomas qui en parle le mieux : «L’euphonium est conique, ce qui signifie que dès que le tube quitte le groupe de valves, il devient de plus en plus large et cela crée une tonalité qui offre de grandes possibilités de cantabile.»
Thomas raconte encore que de 1870 à 1920, l’Italie a eu les meilleurs joueurs d’euphonium en Europe mais qu’ils sont partis pour la plupart aux États-Unis pour fuir la crise, à l’instar de Simone Mantia, Leonard Falcone et John Perfetto.