Découvert en 1978, le menhir est situé à 282 mètres d’altitude sur la partie orientale de la butte du Béisenerbierg à Reckange.
Le site semble n’être connu que des autochtones tant il est éloigné de la route principale de Reckange. Et le chemin carrossable qui mène à ce monument a beau être indiqué par deux panneaux, il faut avoir l’œil pour ne pas passer à côté et continuer sa route en direction de Brouch, manquant ainsi un spectacle époustouflant et quelque peu mystique.
Car la découverte du menhir et du site qui l’accueille se mérite : il faut ainsi gravir plusieurs centaines de mètres sur un chemin a priori uniquement destiné aux promeneurs du dimanche et aux cyclistes les plus courageux avant que l’ombre du menhir apparaisse tout en haut de la butte du Béisenerbierg.
De là, il reste encore quelques centaines de mètres à parcourir, avant d’atteindre le Graal, à savoir un ancien sanctuaire et cimetière datant du Moyen Âge qui s’apparente à un véritable havre de paix.
Mais au-delà de ces considérations topographiques, la suite de l’ascension appartient, elle, à l’Histoire… En effet, c’est en 1978 que le couple Maisy et Robert Weyrich, aidés de Roger Kugener, ont découvert une pierre enterrée dans cette butte du Béisenerbierg, dont seule la face supérieure était visible.
Alors qu’ils pensaient qu’il s’agissait effectivement d’un menhir, ils entreprirent de déterrer la pierre, puis de la dresser un plus tard. Le bloc de grès de 3,5 tonnes et de 3 mètres de longueur sera alors déplacé à une cinquantaine de mètres de l’endroit de sa découverte, afin de permettre d’éventuelles investigations scientifiques futures.
Un des plus anciens monuments
En 2001, une fouille archéologique menée à l’emplacement d’origine par la section «Préhistoire» du musée national d’Histoire et d’Art de Luxembourg (MNHA) permet de prouver que cette pierre a été érigée ver la fin du Néolithique, c’est-à-dire il y a plus de 4 500 ans.
Lors des fouilles, une fosse de 65 cm de profondeur est découverte : c’est là que le menhir était maintenu grâce à une demi-couronne de pierres de calage. Entraîné par son poids du côté où le calage manquait, il est tombé à une époque difficile à préciser. Par ailleurs, le calage d’un poteau a également été mis au jour. Il devait servir à maintenir provisoirement une pièce de bois, peut-être pour aider au levage original.
Le menhir de Reckange est fait de grès de Luxembourg, dont les plus proches affleurements se situent à plus de 2 km à l’ouest de son lieu de levage. Le bloc a été mis en forme par l’enlèvement de gros éclats de roche pour évoquer une silhouette humaine : il est rétréci à la taille et il possède une ébauche de tête. Après son façonnage, il a ensuite été transporté et levé dans une fosse de calage.
Il est à noter que ce menhir est le premier découvert au Grand-Duché. En raison de sa rareté et de son ancienneté, le menhir du Béisenerbierg a été inscrit en 2003 sur la liste des monuments nationaux.
Claude Damiani
Les menhirs en bref
Certaines populations de la fin de la Préhistoire (époque du Néolithique entre 4 500 et 2 500 ans avant J.-C.) élèvent des mégalithes – dolmens et menhirs – qui figurent parmi les plus vieux monuments connus en Europe de l’Ouest. Le menhir est une pierre dressée, isolée ou organisée avec d’autres pierres, en champs en hémicycles… Leurs vocations sont diverses : commémoratives, symboliques, délimitation ou organisation des espaces.
Ces pierres peuvent être laissées brutes ou mises en forme par diverses techniques (bouchardage, piquetage, épannelage…). Les statues-menhirs (sud de la France, Suisse), suggérant des personnages par la gravure de parures, d’armes d’armes, de vêtements à motifs géométriques, figurent parmi les plus anciennes représentations humaines. D’autres encore étaient peints, comme certains menhirs d’Espagne ou du Portugal.
(Source : Service des sites et monuments nationaux)
Aussi un lieu de recueillement et de mémoire
Sur le site du menhir se trouve l’Eenelterkapell et différentes plaques commémoratives qui perpétuent le souvenir d’un sanctuaire et d’un cimetière datant du Moyen Âge.
Au sommet du Béisenerbierg, le visiteur peut aussi se recueillir dans la chapelle d’Eenelter, située au sein d’un ancien sanctuaire et d’un cimetière datant du Moyen Âge. Dès 1089, les historiens retrouvent des traces de vie de l’ermite saint Théobald de Provins à Eenelter.
Le sanctuaire, qui pourrait dater du début du deuxième millénaire est mentionné pour la première fois dans un document historique en 1180. La chapelle possédait déjà le droit de tenir un marché annuel, le lendemain de la fête de l’Élévation de la Sainte-Croix qui se tient le 15 septembre.
En 1607, l’abbé Jean Bertels d’Echternach confirme qu’Eenelter compte parmi les marchés les plus anciens du Duché de Luxembourg. L’an 1751 voit la consécration d’une nouvelle chapelle. En 1799, le mobilier de la chapelle est vendu aux enchères, sous le régime de la Révolution française. La chapelle est alors déjà tombée en ruine.
En 1802, le marché d’Eenelter, plusieurs fois centenaire, est transféré à Mersch, alors qu’en 1897, un nouveau sanctuaire est érigé en l’honneur de saint Donat et de saint Théobald, grâce à l’aide généreuse des habitants de Reckange. La chapelle, telle qu’elle se présente aujourd’hui, après d’importants travaux de restauration et de consolidation, date de 1997.
Différentes plaques commémoratives se retrouvent dans le sanctuaire, dont celle honorant dix femmes et hommes tombés pendant la Seconde Guerre mondiale, entre 1940 et 1945, ainsi que quinze serviteurs de Napoléon, morts entre 1798 et 1815. Des stèles ainsi qu’une statue de la Vierge Marie sont également disséminées sur le site, qui dispose de plusieurs sentiers qui s’entrelacent.
C. D.