De nombreux édifices étaient illuminés hier à l’occasion du Rare Disease Day, une journée consacrée aux maladies rares. L’association ALAN veut par ce biais sensibiliser et éviter qu’elles ne soient oubliées.
Un vingtième de la population luxembourgeoise pourrait développer une maladie rare. Des maladies oubliées par la recherche et pour lesquelles il n’existe aucun traitement. Shirley Feider-Rohen, la présidente de l’association ALAN – Maladies rares Luxembourg, est atteinte de la maladie de Charcot Marie Tooth, une neuropathie sensitive-motrice. Elle évoque la situation des malades au Luxembourg.
On estime à 30 000 le nombre de Luxembourgeois atteints d’une maladie rare. Finalement, elles ne sont pas si rares que cela ces maladies?
Shirley Feider-Rohen : Nous partons du principe qu’entre 4 et 6 % de la population mondiale a une maladie rare. Reporté au Luxembourg, cela donne environ 30 000 personnes. Il n’y a pas une maladie rare, il y en a entre 6 000 et 7 000 différentes. Elles sont plus ou moins rares. Les moins rares concernent une personne sur 2 500. Prenez la mucoviscidose, elle entre encore de justesse dans la catégorie des maladies rares parce que c’est une des plus courantes. Chez ALAN, nous ne voyons pas les 30 000 personnes. Nous ne voyons que la pointe de l’iceberg.
La partie immergée de l’iceberg n’a pas encore reçu de diagnostic ou ne ressent-elle pas le besoin d’avoir recours à vos services?
Certains n’ont pas encore reçu de diagnostic – il faut cinq ans en moyenne – ou la maladie ne s’est pas encore développée. Dans 70 % des cas, les premiers symptômes apparaissent dans l’enfance. Il y a aussi les faux diagnostics et les 15 % de maladies rares qui n’ont pas encore de nom. Les experts sont unanimes, mais elles n’ont pas encore de qualification médicale et ne sont pas prises en compte.
Il n’y a pas une maladie rare, il y en a entre 6 000 et 7 000 différentes.
Le fait qu’une maladie n’ait pas de nom prive-t-il les personnes de traitement?
Parfois, les maladies qui ont un nom n’ont pas de traitement non plus. Il n’existe de traitements que pour 5 % d’entre nous et, dans la plupart des cas, il ne s’agit que de traitements qui calment les symptômes. Les traitements curatifs sont très rares.
Les cas sont-ils trop rares pour que la recherche s’y intéresse?
La recherche coûte cher et les laboratoires pharmaceutiques ne font pas forcément de recettes avec des traitements qui ne concernent que quelques milliers de personnes. Certains projets se mettent en route à la suite de dons ou de la pression des États membres de l’Union européenne. Nous ne devons pas être oubliés ou considérés comme des patients de seconde zone. Mais nous avons des idées de projets de recherche avec des instituts du sud du pays.
Le plan national se termine en 2022. Va-t-il être prolongé et comment vous a-t-il aidés?
Le Luxembourg était un des derniers pays en Europe à adopter ce plan. Cela nous a permis d’apprendre des erreurs de nos voisins. Nous avons instauré une Infoline qui permet aux personnes concernées de nous contacter rapidement. Nous avons pu engager du personnel pour aider les patients. Nous travaillons à un endroit qui regrouperait tous les besoins des patients : des médecins, des psychologues et des assistants sociaux. Cela permettrait de les diriger le plus vite possible auprès des bonnes personnes. Comme l’European Reference Network, où les médecins collectent les dossiers et contactent les membres du réseau pour obtenir un diagnostic et éviter aux patients de se déplacer. Nous allons tout faire pour que le plan soit prolongé. Le Covid a ralenti la transposition des mesures qu’il prévoyait.
On connaît la mucoviscidose en raison du Téléthon, mais très peu les autres maladies rares.
C’est notre problème. Nous devons expliquer plusieurs types de pathologies sous un même nom générique sans en oublier aucune. Le public a du mal à avoir une vue d’ensemble. Le Rare Disease Day va nous permettre d’expliquer toutes ces facettes : du diagnostic au manque d’informations ou de traitement en passant par le fait que la plupart de ces maladies sont dégénératives et ont des répercussions sur nos vies quotidiennes. Cette journée est organisée par Eurordis, une organisation qui agit aux niveaux européen et socio-politique pour que les maladies rares deviennent une priorité dans les systèmes de santé.
Que va-t-il se passer pendant ce Rare Disease Day?
En raison de la pandémie, les manifestations sont annulées. Des bâtiments comme le château d’eau à Gasperich, les hauts-fourneaux de Belval ou les colonnes des nations à Schengen vont être illuminés pendant toute la semaine. Des portraits de malades vont être présentés dans les médias et, demain, nous organisons une conférence en ligne sous forme de bilan du plan maladies rares.
Durant le premier confinement, 84 % des personnes atteintes d’une maladie rare n’ont pas pu suivre leur traitement
Quelle influence la pandémie a-t-elle sur vos vies?
Avant la pandémie, nous étions habitués à être isolés, à prendre chaque jour comme il vient et à ne pas trop planifier d’avance… Le virus n’a fait que renforcer tout cela. Ce n’est pas simple pour certains de nos membres les plus vulnérables. Même si nous avons un bon système de santé, nous craignons, parce que ça a déjà été le cas, de passer entre les mailles du filet. Nous faisons tout pour ne pas être oubliés. Pour l’instant, le ministère de la Santé a toujours été très présent.
Quid du vaccin?
Il n’y a pas de contre-indication à la vaccination pour la majeure partie des personnes atteintes d’une maladie rare. Seulement, quand vont-elles être vaccinées? La réponse est difficile à trouver dans la liste de priorités du gouvernement. Nous prévoyons d’aborder le sujet avec le ministère de la Santé. Je ne serais pas étonnée d’apprendre que le taux de personnes vaccinées est plus élevé chez les personnes qui ont des maladies rares. Nous savons ce que c’est que d’être immobilisés par la maladie et nous connaissons le temps que prend la convalescence. Alors entre être malades ou vaccinés, nous choisissons la deuxième option et prenons le risque d’effets secondaires.
Le confinement a-t-il eu une incidence sur les traitements?
Eurordis estime qu’au Luxembourg, durant le premier confinement, 84 % des personnes atteintes d’une maladie rare n’ont pas pu suivre leurs traitements. Certaines activités de rééducation, comme celles dédiées à ceux d’entre nous ayant des maladies chroniques, ou des activités sportives en groupe n’ont toujours pas repris. Notre état de santé est très précaire en ce moment. Je ne me sens pas bien dans mon corps en ce moment.
Durant le confinement, nous nous sommes sentis protégés. Comme la situation change régulièrement, les personnes extrêmement vulnérables jouent à la roulette russe. Leurs enfants vont à l’école, personne n’est vacciné, ils peuvent ramener le virus à la maison… La situation est très angoissante. Un vaccin donnerait aux plus vulnérables un sentiment de sécurité. Les personnes souffrant d’angoisse et de dépression ont pu bénéficier de consultations en ligne de l’ALAN ainsi que de cours de relaxation et de méditation. Nous avons dû en doubler le nombre. Nous espérons pouvoir organiser des activités à l’extérieur en été.
Entretien avec Sophie Kieffer
ALAN, ses raisons d’être
Fondée en 1998, l’association a pour but de «construire un environnement permettant aux personnes vivant avec une maladie rare de réaliser leur plein potentiel grâce à une meilleure reconnaissance, l’égalité des chances et une qualité de vie améliorée». Pour y parvenir, elle propose entre autres un service de consultation ainsi qu’un soutien administratif et social et facilite les échanges interdisciplinaires entre professionnels. Elle s’engage également dans la mise en œuvre du plan national maladies rares pour garantir l’égalité d’accès au diagnostic, la thérapie, les soins et la recherche pour toute personne vivant avec une maladie rare et milite pour une meilleure reconnaissance et des changements politiques aux niveaux national et européen.
Une aide précieuse attend les personnes concernées à l’Infoline au 2021 2022 ou par mail à infoMR@alan.lu.
alan fait rien du tout pour malades rares, suis 1cas / 100.000 et depuis 20 ans du diagnositic je me bats seul avec cliniques. drs, cns, ministère santé…, à chaque fois qu’on leur téléphone ils font rien! nada. c’est le club le plus mauvais et inefficace que je connais.