Lézard des murailles, lézard vivipare, mais surtout lézard des souches : les trois espèces de reptiles répertoriées et présentes au Luxembourg sont menacées de disparition à des degrés divers.
«L’espèce la plus en danger est le lézard des souches, car il est assez rare et, de plus, vulnérable. Et nous ne pouvons pas savoir combien de spécimens subsistent exactement à l’heure actuelle», explique Claudine Felten, ingénieur forestier à l’ASBL natur&ëmwelt.
Cette population de lézards vit essentiellement dans le Gutland. «En effet, ces lézards privilégient les endroits bien chauds et ensoleillés. Ils apprécient particulièrement les pelouses sèches et les murs en pierre sèche», souligne également Claudine Felten. Et ils apprécient la terre meuble, car ils y pondent leurs œufs.
De la chaleur et des murs en pierre sèche
De manière générale, on peut en trouver dans les anciennes minières et carrières du sud du pays, mais aussi le long de la Moselle, où ils se plaisent à profiter de la vie, notamment dans les anciens vignobles. «Ces lézards sont présents aux endroits où se trouvent encore des murs en pierre sèche», précise Claudine Felten.
De son côté, le lézard des murailles fréquente à peu près les mêmes endroits et aime également les lieux chauds et bien ensoleillés, mais, à la différence de son confrère des souches, il est plus répandu au Grand-Duché, où on peut le retrouver un peu partout. Murs, rochers, anciennes carrières sont ses terrains préférés. D’ailleurs, certains spécimens ont pu être observés cet été sur les murailles du magnifique château d’Ansembourg par des touristes en goguette savourant leurs «Vakanz Doheem». Cela dit, on peut également retrouver l’animal près des habitations ou le long des voies ferrées. Enfin, la troisième espèce présente au Luxembourg est le lézard vivipare, qui est le plus petit des trois.
Lorsqu’on pense à un lézard, on se projette presque inconsciemment sur les rives du bassin méditerranéen. Le cliché est à oublier au plus vite. «Car les lézards vivent depuis toujours au Luxembourg», explique Claudine Felten.
En ce qui concerne leur style de vie, les lézards possèdent une particularité naturelle bien spécifique : «Leur température interne n’est pas constante. Ils ont besoin de la température ambiante pour vivre. De ce fait, le matin, ils commencent leur journée par un bain de soleil, afin de se réchauffer le corps. Et quand ils sont à une bonne température, ils partent à la chasse aux insectes», précise l’ingénieur forestier de natur&ëmwelt. On le voit : l’expression «lézarder au soleil» n’a pas été forgée pour rien.
Des œufs à l’incubation variable
Par ailleurs, en matière de longévité, le lézard des souches vit de cinq à sept ans, et même jusqu’à douze ans lorsqu’il est en captivité. L’hiver, ce n’est pas leur saison : «Pendant la période la plus froide de l’année, à savoir d’octobre à mars, les lézards se cachent, se mettent à l’abri et bougent très peu», raconte Claudine Felten. Tout change «dès que les températures montent», poursuit l’ingénieur forestier, et les lézards de nos contrées obéissent alors à la nécessité de se reproduire : «Ils sortent et s’accouplent entre avril et mai. La ponte est suivie du développement des œufs : il faut compter entre 25 et 30 jours, voire plus, en fonction de l’espèce et de la température ambiante. Sauf pour le lézard vivipare qui, lui, met des jeunes au monde qui sont déjà complètement développés, bien qu’entourés d’une coque.»
Claude Damiani
La queue, un moyen de défense
Pour échapper à un prédateur, les lézards abandonnent une partie de leur queue, qui continue à bouger et divertit ainsi le prédateur de sa proie. La queue du lézard peut se régénérer à plusieurs reprises.
Des habitats naturels à protéger
La Fondation natur&ëmwelt/Hëllef fir d’Natur a lancé un appel aux dons pour que les habitats naturels des lézards soient bien conservés ou restaurés, afin qu’ils puissent y être accueillis.
À l’heure actuelle, les lézards luxembourgeois se trouvent dans une situation critique, car ils sont menacés de disparition. Dans ce cadre, le combat de la Fondation natur&ëmwelt/Hëllef fir d’Natur vise à ce qu’ils puissent vivre dans des conditions et lieux optimaux.
La menace est double
Car la menace qui les concerne est double : d’un côté, ils aspirent à des habitats naturels adaptés pour pouvoir bien y vivre et se reproduire, et de l’autre, ils risquent, à terme, de ne plus trouver de nourriture. Les lézards s’alimentent en insectes, mais pas uniquement : sur leurs menus gastronomiques de prédilection figurent aussi bien tous les arthropodes dont les cloportes, les centipèdes, mais aussi les araignées et les sauterelles. «Tout ce qui bouge, en fait… or la disparition progressive des insectes inquiète. Car si les lézards ne trouvent pas assez de nourriture, ils ne pourront pas survivre non plus», explique Claudine Felten.
Plus généralement, l’ingénieur forestier de natur&ëmwelt évalue le risque de disparition des lézards, dont notamment l’espèce «des souches» : «Le risque d’extinction pour les lézards vivipares et des murailles ne se conçoit pas dans un futur proche. Les constructions faites par la main de l’être humain, telles que les routes, les habitations… menacent cependant leurs habitats naturels et le contact entre les animaux. Ceci dit, l’espèce la plus en danger est celle du lézard des souches, étant donné qu’il est considéré comme vulnérable. En effet, sa population est réduite et il n’existe que quelques spécimens qui sont par ailleurs très isolés. Le risque de disparition est donc bien réel.» Quant à l’idée d’une future réintroduction de l’espèce, Claudine Felten, se montre quelque peu sceptique : «Il s’agit de projets très difficiles à réaliser et si cela devait se faire, nous travaillerions certainement avec le musée national d’Histoire naturelle. Cela étant, personnellement, je ne vois pas un tel besoin de réintroduction dans l’immédiat, bien que de tels projets aient été réalisés avec succès en Allemagne ou en Belgique.»
C. D.