Naturalistes, promeneurs et viticulteurs sont invités à aider les biologistes à recenser les reptiles du pays, afin de permettre la mise en place de projets de protection.
Le retour des fortes chaleurs et des balades à travers champs est propice à la découverte de la faune qui nous entoure et tout particulièrement des reptiles qui sont plus susceptibles de pointer le bout de leur nez pour se dorer un peu la pilule lorsque le soleil tape. C’est donc l’occasion idéale d’apporter un petit coup de pouce à la communauté scientifique qui cherche à récolter des données sur ces petites bêtes qui peuplent nos contrées.
On relève six espèces indigènes de reptiles au Luxembourg : quatre types de lézards (les lézards des murailles, les lézards des souches, les lézards vivipares ainsi que les orvets fragiles, lesquels ressemblent à s’y méprendre à des serpents mais qui ne possèdent pas de venin et ne mordent pas) ainsi que deux espèces de serpents (la couleuvre à collier et la coronelle lisse). «Les autres espèces ont été amenées par l’homme, qui les a relâchées en pleine nature, comme les tortues par exemple», indique Tom Dall’Armellina, de la station biologique du Syndicat intercommunal à vocation multiple (SIAS).
Le problème, c’est qu’il est particulièrement difficile pour les chercheurs de mesurer la distribution de ces espèces dans le pays. Ils invitent donc tout un chacun à observer les reptiles et à faire part des photos prises ainsi que des données de localisation via l’application iNaturalist ou sur le portail du musée national d’Histoire naturelle (lire encadré). «Les personnes qui travaillent régulièrement à l’extérieur, comme les vignerons par exemple, ou même des promeneurs, ont beaucoup plus de chances de rencontrer des reptiles que des scientifiques qui vont sur une zone délimitée quelques fois par an», explique le conseiller.
Des informations précieuses qui pourront permettre de mettre en place des projets de protection de ces espèces qui ne semblent pas très bien en point. Une étude parue dans la revue Biological Conversation en 2012 estimait déjà que 19% des reptiles dans le monde sont menacés d’extinction. Au Luxembourg, la coronelle et le lézard des souches n’existent déjà plus qu’en très petit nombre.
Protéger ces espèces
En cause ? La destruction de leur habitat, que ce soit en raison de la déforestation, de l’urbanisation ou de la conversion de certaines zones en grands espaces de monocultures. «Une grande partie des habitats au Luxembourg ont disparu en raison de l’intensification de l’agriculture, de l’empiètement des anciennes carrières et des zones d’extraction à ciel ouvert, du remembrement des vignobles et du creusement des vieux murs en pierre sèche», précise Tom Dall’Armellina. Or les reptiles sont très spécifiquement adaptés à leur environnement et sont donc sensibles au moindre changement.
Pourtant, il est indispensable de protéger ces animaux. Déjà, «parce que toutes les espèces ont le droit d’être protégées», rappelle avec bon sens Tom Dall’Armellina, mais aussi parce que comme chaque animal, les reptiles ont un rôle essentiel à jouer dans l’écosystème. Les lézards se nourrissent notamment d’insectes et les serpents de petits mammifères comme des rongeurs par exemple et permettent donc de réguler certaines espèces. Sans compter qu’ils servent eux aussi à en nourrir d’autres. Tout est une question d’équilibre.
Grâce aux différentes données récoltées par ce recensement public, des habitats pourront donc être refaçonnés qui permettront aux reptiles de se développer plus sereinement : «Si l’on découvre certaines espèces à certains endroits, nous pourrons débroussailler les lieux si besoin et y installer des cairns de pierre pour leur fournir un habitat. Nous pouvons envisager d’établir une praire sèche, entretenue par des moutons éventuellement.»
Que les vignerons et autres cultivateurs ne s’inquiètent toutefois pas : il ne s’agit aucunement de les priver de leur exploitation pour la transformer en espace protégé et y mettre en place des abris pour les reptiles, prévient Tom Dall’Armellina : «Nous souhaitons simplement connaître les régions où se trouvent les espèces. Si les vignerons repèrent quelques spécimens, nous essaierons alors de trouver dans le coin des terrains inutilisés et nous verrons avec les propriétaires s’ils acceptent de collaborer avec nous pour créer un biotope.»
Tatiana Salvan
INaturalist
Pour participer à ce recensement, il suffit de télécharger l’application iNaturalist et de créer un compte afin de pouvoir enregistrer ses observations. L’application permet aussi de déterminer à quelle espèce le reptile appartient à partir d’une simple photo. Une vidéo explicative pour utiliser l’application est disponible sur data.mnhn.lu/fr/content/reptilien-zu-lëtzebuerg.
Les observations peuvent aussi être enregistrées sur la page web iNaturalist.lu ou reportées sur le portail de données du musée national d’Histoire naturelle (data.mnhn.lu/fr/enter-single-record).
Attention à bien accompagner les données d’une photo et la localisation (emplacement GPS).
Où trouver des reptiles ?
Les différentes espèces de reptiles ont chacune un habitat qui leur est spécifique.
Vous aimez lézarder au soleil ? Les reptiles aussi ! Ces animaux à sang-froid apprécient tout particulièrement les bains de soleil afin de réchauffer leur corps et retrouver ainsi toute leur agilité. C’est donc lorsque le soleil brille et que les surfaces sont chaudes qu’il sera le plus facile d’observer ces petites bêtes.
Mais chaque espèce a un habitat qui lui est bien spécifique. Ainsi, les orvets, ces petits lézards sans pattes à ne pas confondre avec les serpents, se rencontrent le plus souvent sous les pierres, tandis que les lézards des murailles aiment les murs en pierre sèche et les surfaces chaudes.
Ne pas les effrayer ou les déranger
Les murs en pierre sèche sont aussi très appréciés des coronelles lisses, ces serpents à tête en forme de cœur, mais elles sont très rares au Luxembourg, alors il faudra bien ouvrir l’œil pour en apercevoir. Tout comme il faudra être fin observateur pour avoir la chance de repérer un lézard des souches. Cette espèce n’existe plus elle aussi qu’en petit nombre dans le pays. Les explorateurs en herbe les plus méticuleux pourront également tenter de différencier les mâles des femelles. Les lézards se distinguent par la taille et la couleur.
Une règle d’or toutefois pour partir à la découverte de ces espèces : ne pas effrayer ou déranger ces petits animaux qui peuvent facilement s’affoler.
Des photos et des informations complémentaires sont disponibles sur le site iNaturalist.LU dans le guide Reptilien zu Lëtzebuerg.
T.S