L’administration de la Gestion de l’eau a présenté, lundi, une première analyse des terribles inondations qui ont touché tout le pays. Plusieurs facteurs expliquent les crues historiques.
Les très fortes chutes de pluie qui se sont abattues depuis lundi dernier sur le pays, avec un pic enregistré lors de la journée de mercredi, ont provoqué des inondations sans précédent.
Lundi matin, les autorités ont présenté une première analyse de la montée extrême du niveau des cours d’eau. Explications et chronologie.
Lundi 12 juillet
Le service de prévision des crues (SPC) prend connaissance des prévisions faisant état de fortes chutes de pluie. «Les modèles n’étaient pas encore très clairs», relate Christine Bastian, du service hydrologie. Aucune mesure spécifique n’est encore décidée par les autorités.
Mardi 13 juillet
Le SPC se met en état d’alerte et lance la phase de vigilance à 14 h. Un premier avis de crue est établi et communiqué pour le bassin de la Moselle, mais aussi pour la Sûre, l’Alzette, la Chiers et la Syre. «En été, les activités aux abords des cours d’eau sont plus nombreuses qu’en hiver. Les campings sont ouverts, des chantiers sont en cours. La phase de vigilance a été décrétée pour permettre aux exploitants de camping et aux entreprises de construction de prendre les précautions nécessaires», note Christine Bastian.
À ce moment, les modèles n’étaient toujours pas très clairs : «Les plus fortes averses étaient prévues pour la région de la Moselle. Le Luxembourg est un si petit pays qu’il suffit d’un peu de vent pour que l’épisode de pluie se déplace hors de nos frontières.»
Mercredi 14 juillet
Tout s’accélère 24 heures plus tard. «On se voit confronté à un front quasiment stationnaire. Il s’agit d’une situation vraiment exceptionnelle. Des pluies diluviennes tombent de manière ininterrompue sur l’ensemble du pays avec des pics dépassant les 100 litres par m2 en 24 heures. Cette quantité s’abat sur des sols déjà très humides, plus capables d’absorber la pluie», explique Christine Bastian. Deux records absolus ont été mesurés : 79,4 litres par m2 au Findel et 105,7 litres par m2 à Godbrange (voir aussi carte ci-contre).
Les premiers appels d’urgence proviennent d’habitations situées en hauteur. «Des petits ruisseaux se sont transformés en torrents dévastateurs. Jamais auparavant des inondations n’ont été enregistrées à ces endroits», évoque la ministre Dieschbourg. L’eau coule alors en direction des rivières situées en contrebas. «Cela a contribué à faire sortir les cours d’eau de leur lit. En fin de compte, nous avons vécu une crue hivernale en été», complète Christine Bastian.
À 12 h, la phase de préalerte est lancée, suivie de la phase d’alerte à 17 h. Le plan d’intervention d’urgence est déclenché. En fin de soirée, la cellule de crise du gouvernement se réunit. Il est alors décidé de donner la priorité au sauvetage des personnes.
Jeudi 15 juillet
Pendant la nuit, les niveaux des cours d’eau montent dans l’ensemble du pays, à l’exception de la Moselle. «De très nombreux cours d’eau affluent dans la Moselle. Heureusement la pluie n’est pas aussi fortement tombée sur le bassin mosellan. Cela a permis d’évacuer une partie des masses d’eau», indique Christine Bastian. Un modèle avait au départ fait état d’une crue de la Moselle à 9 mètres de haut.
Le Luxembourg compte 41 stations hydrométriques. Dans 10 stations, une crue centennale a été enregistrée. Il s’agit de Livange, Hesperange, Pfaffenthal, Steinsel et Mersch, localités et quartiers situés le long de l’Alzette. S’y ajoutent Rosport (Sûre) et les stations installées le long de la Mamer, de l’Our, de l’Ernz Blanche et de la Chiers.
Des niveaux d’eau historiques ont été enregistrés dans 15 stations le long de l’Alzette, de la Sûre, de la Clerve et aussi le long de la Mamer, de l’Our, de l’Ernz Blanche, de la Wiltz, de la Chiers et de la Syre.
«Les cotes d’alerte ont été dépassées pendant plus de 30 heures», note encore Christine Bastian.
Vendredi, 16 juillet
La phase d’alerte reste en vigueur, «même si la situation se stabilise. Les crues stagnent et commencent même déjà à baisser». L’alerte pour la Sûre, l’Alzette, la Chiers et la Syre est levée samedi matin.
Conclusions
L’alerte a-t-elle été donnée trop tardivement ? Non, selon les autorités. «Les gens habitués à vivre des inondations ont pris leurs précautions. Mes mesures anticrues ont aussi permis de retarder l’échéance. Mais en fin de compte, les masses d’eau étaient tellement extrêmes que les mesures de prévention n’étaient pas suffisantes», indique la ministre de l’Environnement. «Nous n’avons pas été surpris par cette crue, mais bien étonnés des masses d’eau», note de son côté Christine Bastian.
L’effet du «dérèglement climatique» n’est pas à nier, selon Carole Dieschbourg. «Il s’agit d’un phénomène à part, mais la fréquence de ce genre de catastrophe naturelle s’accentue. On voit clairement l’influence du changement climatique», conclut la ministre. Dans les mois et années à venir, les mesures visant à «gérer au mieux les risques et dangers» liés à ces intempéries extrêmes vont se multiplier.
David Marques