Une personne sur quatre souffrirait de troubles de la santé mentale. Pourtant la majorité des personnes concernées ne consultent pas. Une brochure a été créée pour les encourager à traiter leurs problèmes psy.
Consulter un professionnel de la santé mentale (psychologue, psychiatre ou psychothérapeute) est encore bien trop souvent mal perçu et considéré comme l’apanage des seuls «fous».
Or près d’un quart de la population souffrirait en fait de troubles de la santé mentale. «Les psychoses représentent moins de 1 % de la population. Les troubles de la santé mentale sont en fait très fréquents et très divers», rappelle le Dr Barbara Bucki, du service information et prévention de la Ligue luxembourgeoise d’hygiène mentale, qui cite «les troubles anxieux, obsessionnels compulsifs, du comportement, de la dépendance, les troubles paniques, de stress post-traumatique, l’anxiété sociale, la dépression…». Un quart des femmes et un homme sur huit connaîtront ainsi au moins une fois dans leur vie un épisode de dépression.
Une absence de soin
Cependant, d’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), les deux tiers des personnes concernées négligent de consulter un professionnel. Une absence de soins dont les répercussions peuvent être importantes, voire dramatiques, sur le plan tant physique que social, professionnel ou économique. «Ces troubles peuvent dégrader les relations familiales, conduire à un isolement social, voire au suicide», alerte Barbara Bucki. On estime même qu’au Luxembourg près d’un décès sur 50 est en fait un suicide (chiffre du ministère de la Santé).
«Pourtant, dans la plupart des cas, il existe des traitements efficaces pour soigner ces troubles», insiste Barbara Bucki.
Mais la honte de traverser des difficultés psychologiques, la peur du rejet social et des discriminations, la négligence ou un manque d’informations freinent encore beaucoup de personnes. «Quand on a un problème de santé physique, on va chez le médecin, il doit en aller de même quand on a un problème de santé mentale! Et le Luxembourg dispose d’un réseau d’aide et de soins développé», fait savoir Barbara Bucki.
Déstigmatiser les troubles de la santé mentale
Afin d’obtenir les meilleurs résultats possibles et éviter les risques de rechute, «il est important de consulter le plus tôt possible : dès que l’on constate un changement d’humeur, physique, de comportement, ou des troubles qui empiètent sur le fonctionnement habituel : social, intellectuel, sur le sommeil…», précise Grégory Lambrette, psychothérapeuthe et membre de l’Association luxembourgeoise de thérapie interactionnelle et stratégique (Altis). Difficile parfois cependant de s’y retrouver dans la nébuleuse que représente «la psy». Qui consulter? Quelles sont les différences entre le psychologue, le psychiatre et le psychothérapeute? Comment peuvent-ils nous aider? Quels sont les tarifs? Où les trouver? sont des questions fréquentes que les gens sont amenés à se poser.
Afin d’y répondre et de déstigmatiser les soins psy en sensibilisant le grand public, la Ligue, soutenue par différentes associations nationales de professionnels, a créé dans le cadre du plan national de prévention du suicide une brochure permettant de répondre à ces principales interrogations. Intitulée Et si j’en parlais à un psy?, elle est à télécharger ou à retrouver dans tous les centres liés à la santé (lire «infos pratiques» ci-dessous).
En parler à son médecin de famille qui pourra orienter vers tel praticien ou telle méthode ou faire confiance au bouche à oreille (d’où l’importance de briser le tabou et de libérer la parole) peuvent être un premier pas pour trouver son thérapeute. Sachant que la relation que l’on aura avec ce dernier sera déterminante, comme le souligne Grégory Lambrette : «La relation thérapeutique va influer. Il est donc important de se sentir bien avec le professionnel.»
Une centaine de psychiatres et 500 professionnels reconnus
«On doit se demander : est-ce que je peux m’ouvrir? Est-ce que j’ai l’impression que cette personne peut m’aider?», conseille Marc Stein, de la Société luxembourgeoise de psychologie. «Aux professionnels également d’être honnêtes et de savoir dire à la personne : je ne suis pas spécialiste de ce trouble. Le premier entretien et le réseau permettront de guider le patient vers d’autres personnes.»
Quant à la prise en charge des soins, elle reste assez aléatoire, les tarifs et les conditions de remboursement évoluant régulièrement. Une centaine de psychiatres et 500 professionnels sont actuellement reconnus par la CNS, et certaines structures publiques proposent des consultations gratuites. La rubrique «Et si j’en parlais à un psy?» des sites de prévention suicide, dépression ou panique consigne ces informations actualisées.
Tatiana Salvan
Les méthodes reconnues au Luxembourg
Les psychothérapeutes sont des psychologues ou des médecins (généralement des psychiatres) formés en psychothérapie. Quatre méthodes sont reconnues.
Le psychothérapeute utilise dans le cadre de son activité professionnelle une méthode thérapeutique qui fait exclusivement appel à des moyens psychologiques complémentaires à d’autres traitements (notamment médicamenteux), afin de traiter des troubles chez l’adulte, l’enfant ou l’adolescent», explique Grégory Lambrette, de l’Association luxembourgeoise de thérapie interactionnelle et stratégique.
Les méthodes sont extrêmement nombreuses. Quelque 500 méthodes auraient ainsi été dénombrées sur le territoire américain. Quatre méthodes de psychothérapie sont reconnues au Luxembourg. Elles sont détaillées dans la brochure intitulée Et si j’en parlais à un psy? Mieux connaître pour mieux choisir, que vient de lancer D’Ligue, dans le cadre du plan national de prévention du suicide du ministère de la Santé. Les voici.
Les thérapies cognitivo-comportementales
«Ces thérapies reposent sur les interactions entre les pensées, les émotions, les comportements et leurs conséquences. Un ou plusieurs objectifs clairs sont fixés avec l’aide du psychothérapeute. Lorsque les objectifs sont atteints, la psychothérapie peut s’achever.»
Les thérapies systémiques et familiales
«Ces thérapies considèrent que les difficultés ou symptômes d’une personne peuvent résulter des interactions avec son entourage (ou système). La thérapie peut inclure les membres de la famille pour comprendre le sens des difficultés et chercher des solutions plus adaptées.»
L’approche psychodynamique
«Inspirées par la psychanalyse et pratiquées notamment par les psychanalystes, ces psychothérapies ont pour but de faire revenir au conscient les conflits et traumatismes refoulés dans l’inconscient, et ainsi comprendre ou diminuer les souffrance et les troubles actuels.»
Les thérapies humanistes
«L’approche humaniste se fonde sur une vision positive de l’être humain. Ces thérapies s’appuient sur la tendance innée de la personne à vouloir se réaliser. Elles l’aident à mobiliser ses forces de croissance psychologique et à développer son potentiel.»
Infos pratiques
Des brochures permettant d’apporter des réponses aux questions que tout un chacun peut se poser en termes de prise en charge de la santé mentale seront disponibles en français, en allemand, en anglais, en luxembourgeois et en portugais dans les salles d’attente des médecins, dans les pharmacies, les laboratoires… Elles sont d’ores et déjà téléchargeables sur trois sites : www.prevention-suicide.lu, www.prevention-depression.lu et prevention-panique.lu.
Des vidéos pédagogiques illustrant de manière ludique les différentes professions de la santé mentale peuvent également être visionnées sur Instagram (prevention.lu) et sur Facebook (Prévention Luxembourg).