Depuis novembre, trois infirmiers de Caritas vont à la rencontre des sans-abri dans les rues de la capitale.
Ils sont tous les trois infirmiers. Et depuis novembre, leur lieu de travail est la rue, ou plutôt les rues de Luxembourg. Laurie Gatley, Marion Carminati et Jean-Michel Doller vont à la rencontre des sans-abri de la capitale pour les «aider à prendre conscience de l’importance de prendre soin de leur santé et de leur hygiène».
Soutenu par l’Œuvre Grande-Duchesse Charlotte et des dons privés, le projet de la Caritas a été mis en place il y a bientôt trois mois. «L’idée de ce projet est née il y a trois ans, explique Stéphanie Sorvillo, membre de la direction de la Caritas et responsable du service Accueil Urgence. Nous avions notamment constaté à l’époque qu’au foyer Ulysse beaucoup souffraient de maladies mentales et qu’ils n’étaient pas suivis médicalement, qu’ils n’avaient pas de traitement et qu’aucun n’irait de lui-même chez un médecin. Et de manière générale, de nombreux sans-abri qui devraient être soignés se méfient et ne savent pas à qui s’adresser. Aujourd’hui, notre équipe d’infirmiers de rue va à la rencontre des sans-abri.»
Depuis novembre, les trois infirmiers de rue de la Caritas sillonnent les rues de la capitale entre trois et cinq fois par semaine (matin ou soir) pour aller à la rencontre des sans-abri et leur demander s’ils vont bien, médicalement parlant. Dans leurs sacs à dos, ils ont tout le nécessaire pour faire un bilan médical et prodiguer les premiers soins : tensiomètre, saturomètre, glucomètre, pansements, produits d’hygiène… sans oublier des masques ou encore du gel hydroalcoolique.
«Nous répondons à un besoin»
«Au début, le plus important est de réussir à créer un lien de confiance avec la personne, souligne Laurie Gatley. Ce lien de confiance va se créer et se construire au fil du temps. Une fois qu’ils nous ont vus trois ou quatre fois, une demande peut émerger. Par exemple, nous avons rencontré plusieurs fois un monsieur, qui nous disait tout le temps : « Non, non, je n’ai besoin de rien. Tout va bien ». Et un jour, on commence à parler d’oiseaux et cela l’intéresse beaucoup. On parle, on parle… Au fil des minutes, la confiance s’installe. Et là, il commence à nous parler de ses problèmes médicaux.» Jean-Michel Doller complète : «Pour eux, les soins et le médical passent après. Leur priorité reste l’administratif, trouver un endroit où dormir…» Marion Carminati enchaîne : «Nous sommes là pour les soigner, pour qu’ils renouent le lien avec leur corps et aussi leur rappeler que la santé est la base et un levier pour une réinsertion à moyen et long terme.»
En après près de trois mois d’existence, l’équipe d’infirmiers de rue de la Caritas a d’ores et déjà rencontré une centaine de personnes et environ une vingtaine sont suivies régulièrement. Sans oublier les permanences régulières qu’elle effectue au Findel dans les locaux de la Wanteraktioun (Action hiver). Les trois infirmiers de rue questionnent, soignent, orientent et accompagnent les personnes qu’ils rencontrent. Ils font de la prévention, de la sensibilisation et prodiguent des soins.
«Nous répondons à un besoin, estime Laurie Gatley. Même si le lien de confiance met du temps à se faire, quand nous disons que nous sommes infirmiers, nous avons une certaine légitimité et ils savent que nous sommes soumis au secret professionnel. Notre rapport à eux est différent, mais complémentaire à celui qu’ils ont avec les streetworkers par exemple. Nous ne sommes pas une équipe isolée, nous travaillons en étroite collaboration avec différentes structures, des associations, des médecins ou encore les hôpitaux. Notre souhait est de développer au Luxembourg cette expertise d’infirmier de rue, qui n’existe pas encore, contrairement aux pays voisins, mais qui est essentielle si l’on veut que les sans-abri puissent bénéficier d’une prise en charge globale et avoir accès aux soins de santé.»
Guillaume Chassaing