À la suite des inondations, les différents services compétents de la Ville et de l’État ont permis d’éviter le pire. Le pont de la rue Munster a en effet fait l’objet de soins très méticuleux.
Les inondations qui ont frappé le pays les 14 et 15 juillet n’ont pas épargné la capitale et notamment son quartier du Grund. L’historique pont de la rue Munster, qui a souffert, a fort heureusement bénéficié d’une attention particulière des autorités communales et étatiques afin de le protéger. Le chef du service voirie de la Ville de Luxembourg, Claude Walisch, explique les détails de l’opération sauvetage de cet ouvrage classé et très précieux.
Alors que les averses s’éternisaient le 14 juillet, il indique que son service et lui-même ont, «dans un premier temps, observé la situation, vu que l’eau commençait à monter de manière continue et que des objets, des débris, des arbres et même une benne étaient en train de heurter le pont. À un certain moment, l’eau a atteint un niveau plus élevé que celui de l’arc du pont. Elle a presque atteint la hauteur du tablier. La section ouverte était saturée. Bien qu’elle ne soit pas passée au-dessus, l’eau a commencé à se répandre en largeur. Il n’y avait plus d’eau supplémentaire qui pouvait passer sous le pont. Au-dessus du pont, il y avait encore un mur qui déviait l’eau. Et il y avait une certaine pression de l’eau qui agissait sur le pont.»
Expérience et coopération sans faille
Les opérations et la coordination entre différents services de la Ville et de l’État se sont alors rapidement mises en place : «Il y avait de l’eau partout et la pluie était abondante. On courait des risques et il fallait barrer le pont. C’est ce qu’on a fait alors que les rues et le passage commençaient à être inondés. À cause de la pluie diluvienne et de l’eau qui venait un peu de tous les côtés, les joints des pavés, faits en sable, qui étaient dans un état déjà précaire avec le temps, ont été complètement délavés. L’eau commençait à pénétrer dans le lit de pose et les pavés commençaient déjà à nager légèrement.»
Ces moments critiques ont vu l’intervention des services voirie et circulation de la Ville, de l’administration étatique de la gestion de l’Eau. Le service hygiène est intervenu surtout par la suite et le service qui gère les ouvrages de la Ville était aussi présent, souligne l’ingénieur Claude Walisch. À la question de savoir si ce dernier a, à un moment ou à un autre, craint le pire, il se montre catégorique : «Non ! Par expérience, à aucun moment je n’ai pensé que le pont allait s’écrouler. Nous sommes des ingénieurs et on s’est dit que le pont allait tenir. Mais on ne savait ni comment l’eau allait pouvoir s’évacuer tout autour ni jusqu’à quel niveau elle allait monter, et là, on a barré les routes. Par extension, nous ne savions donc pas comment allait se développer la situation.», souligne le chef du service Voirie de la Ville.
Le véritable danger résidait dans le revêtement du pont, qui n’était plus stable pour que l’on puisse traverser l’ouvrage en toute sécurité. «On a fait descendre l’eau et on s’est vite rendu compte que ce revêtement était déjà disloqué. Il n’était déjà pas bon à la base et il était de toute manière prévu de le refaire en 2023. Nous étions donc bien conscients qu’il fallait intervenir à moyen terme.» Claude Walisch poursuit : «Donc, dans une première phase, afin de pouvoir rouvrir la circulation à court terme, car on savait qu’avec les prochaines pluies la situation serait inacceptable, nous avons proposé à nos décideurs politiques d’enlever le pavé et de poser un béton asphaltique. En clair, on a posé deux couches d’asphalte, comme sur une route classique.» Et d’ajouter : «L’avantage est qu’on peut rapidement mettre ces couches en œuvre et puis c’est un revêtement beaucoup plus étanche. Il est posé chaud, mais il sèche endéans une demi-journée. Parce qu’à travers les joints, l’eau pénétrait à l’intérieur de l’ouvrage. En hiver, la situation initiale aurait pu poser un problème avec le gel, lequel aurait davantage endommagé le pont. Et cela, on voulait absolument l’éviter. On a donc attendu qu’il s’arrête de pleuvoir pour poser l’asphalte. On a commencé le vendredi et terminé le mardi, soit une opération sur trois jours ouvrables.»
Des pavés classés par l’Unesco
Les pavés ont été conservés, «car il s’agit d’une matière précieuse, des pavés du Luxembourg…» Selon l’ingénieur, «Il est très difficile, voire impossible, d’en obtenir, donc il a été décidé de les placer dans notre stock en vue de les remettre en œuvre pour la restauration prévue en 2023.» En effet, «on parle d’un patrimoine culturel qui fait partie de la zone l’Unesco. D’ailleurs on a travaillé avec l’Unesco Site Manager, Monsieur Robert Philippart, et nous avons informé le Service des sites et monuments nationaux avant d’intervenir. La décision de conserver et de protéger ce patrimoine a été prise d’un commun accord.»
Aujourd’hui, «le passage du pont est sûr. D’ailleurs, un bureau d’études l’a inspecté et a donné son feu vert pour sa réouverture.» L’arc du pont, cependant, conserve un léger stigmate : une trace de couleur blanche. Elle a une petite histoire : «Cela provient d’une benne qui a heurté le pont. Elle est venue du chantier de la LUGA (première grande exposition horticole du Luxembourg prévue en 2023), qui se trouve à plusieurs dizaines de mètres de là. Car le niveau de la Pétrusse a monté et la benne a flotté depuis là, tout comme d’autres débris. Toute la vallée était inondée.»
Claude Damiani
Une restauration déjà programmée pour 2023
Le pont devait de toute façon être restauré pour 2023, dans le cadre d’un projet plus global, qui a vu la participation des riverains, de l’Unesco Site Manager, Robert Philippart, du Service des sites et monuments nationaux et du Syndicat du Stadtgrund, dont il a été tenu compte des doléances. «En vue de 2023, on refera l’étanchéité, et s’il y a des dégâts qu’on ne connaît pas actuellement, on restaurera avant de remettre les pavés sur le pont. Les joints seront en béton afin d’éviter toute humidité qui pénètrerait dans la construction portante», précise encore le chef du service voirie.
Le projet de restauration comprend également un réaménagement de la place Saint-Ulric, de l’autre côté du pont, car, selon Claude Walisch, «l’objectif est une restructuration de l’espace».