Mieux comprendre le racisme pour pouvoir lutter contre celui-ci : c’est là le but du cycle de formation, gratuit et accessible à tous, que va proposer Lëtz Rise Up à la Maison du savoir à Belval.
Comment se manifeste le racisme ? Comment se maintient-il ? Comment peut-il avoir un impact sur l’ensemble de la population ? Afin d’obtenir des clés pour mieux comprendre le racisme et pouvoir ainsi lutter contre ses formes mêmes les plus insidieuses, l’association féministe et antiraciste Lëtz Rise Up organise les 30 novembre, 1er et 2 décembre prochains un cycle de formation intitulé «Racisme, comprendre pour agir».
Animée en collaboration avec le Centre féministe belge de réflexion et d’action sur le racisme anti-noir.e.s Bamko, cette formation gratuite principalement à destination des enseignants, des travailleurs sociaux ainsi que des acteurs du monde associatif (mais néanmoins ouverte à tous) se déroulera en trois étapes à la Maison du savoir à Belval, sur le campus de l’université.
Un séminaire d’abord, pour bien comprendre le racisme en tant que système qui structure la société – ses origines, ses manifestations, son impact sur les personnes qui en sont victimes. Un atelier mené en petits groupes ensuite qui fournira des pistes d’actions concrètes pour lutter contre le racisme au sein de sa propre organisation. Et un échange de bonnes pratiques pour terminer afin de partager les différentes solutions trouvées au cours de l’atelier.
«L’éducation et la sensibilisation sont essentielles pour lutter contre le racisme», insiste Sandrine Gashonga, la présidente de Lëtz Rise Up. «L’éducation est d’ailleurs à la base de tout. Si un jeune est mal orienté, cela aura un impact sur sa recherche de travail, puis dans sa profession et donc dans son accès au logement», complète Marissa Daruwalla Ovuo, membre de l’ASBL, faisant notamment référence à une étude du Centre d’étude et de formation interculturelles et sociales (Cefis) datée d’avril 2017 au sujet de la diaspora capverdienne au Luxembourg. Cette étude faisait état de la persistance du racisme structurel dans le pays, les jeunes de couleur étant plus généralement orientés vers les lycées techniques que vers les lycées classiques, et ce, en dépit de leurs aptitudes, comme le relevaient les auteurs : «La répartition des élèves capverdiens dans l’enseignement luxembourgeois montre une concentration dans les lycées techniques, puis à l’intérieur de l’enseignement technique dans les voies de formation et filières les plus courtes et les moins valorisantes (les classes préparatoires, diverses classes d’accueil, régime professionnel…)», ce qui «réduit fortement les chances d’accéder à une longue carrière scolaire ou à certains types d’emplois qualifiés».
Un problème minoré au Grand-Duché
C’est un fait : bien que le Grand-Duché n’ait pas un passé colonial comme ses voisins, le racisme existe bel et bien au Luxembourg. «Mais il est plus dissimulé qu’aux États-Unis par exemple», précise Sandrine Gashonga, qui ajoute : «Chaque personne de couleur a été confrontée au racisme.» L’étude «Being Black in the EU», réalisée par l’Agence européenne des droits de l’homme en 2018 et présentée lors de la conférence organisée par l’Association de soutien aux travailleurs immigrés (ASTI) avec celle menée par Mirlène Fonsaca sur le ressenti des jeunes Capverdiens du pays, avait eu l’effet d’un coup de tonnerre : le Grand-Duché est après la Finlande, l’Irlande et l’Autriche, le pays où le sentiment d’avoir été victime de violences racistes durant les cinq années précédentes est le plus fréquent. «Les autres discriminations sont visibles au niveau de la recherche du travail, de l’activité professionnelle elle-même, de l’accès au logement et des relations entre les autorités scolaires et les parents afro-descendants», fait savoir Marissa Daruwalla Ovuo.
Mais les chiffres illustrant la réalité de la situation manquent au Luxembourg qui, au grand regret de Lëtz Rise Up, n’établit pas de statistiques ethniques. «Sans ces chiffres, impossible de prendre la mesure de la gravité de la situation, et donc de savoir par où commencer exactement», déplore Sandrine Gashonga, qui poursuit : «Il y a très peu d’initiatives antiracistes au niveau national. Pourtant des textes européens et internationaux existent, des résolutions ont été prises par le Parlement européen. L’ONU a proclamé en 2013 que la décennie 2015-2024 serait celles des personnes d’ascendance africaine. Mais le Luxembourg n’a pas suivi l’exemple de la Belgique, qui a elle inauguré cette décennie. Nous continuerons de faire un plaidoyer pour que cette décennie soit célébrée. Nous avons jusqu’en 2024 pour le faire !
Tatiana Salvan