Bien que le confinement semble être peu à peu levé, les grandes fêtes qui rythment la belle saison sont annulées les unes après les autres. Une saison blanche s’annonce.
La pandémie de Covid-19 ne laisse guère le choix. Tant qu’il n’existe pas de remède à la maladie, rassembler des centaines (et plus souvent des milliers) de personnes pour célébrer le plaisir d’être ensemble autour de belles bouteilles reste un objectif illusoire. C’est comme ça, il n’y a guère le choix et il faut bien accepter la situation telle qu’elle est.
Xavier Bettel a déjà annoncé que ce type d’évènements était annulé jusqu’au 31 juillet. En jetant un œil sur le calendrier publié par l’Office régional du tourisme, on comprend donc que pas moins de quatre rendez-vous traditionnels sont déjà définitivement passés à la trappe : le Proufdag de Vinsmoselle aux caves de Remerschen (le 1er mai), le week-end de portes ouvertes chez les vignerons Wine, Taste, Enjoy (23 et 24 mai), le Wënzerdag d’Ehnen (18 et 19 juillet) et la kermesse de Wellenstein (du 25 au 27 juillet).
Et les suivants ? Bien que l’évolution de la situation soit hautement incertaine, les organisateurs savent bien que les espoirs sont minces. La fête du Pinot et de la Friture, qui doit avoir lieu à Schengen les 1er et 2 août est pratiquement condamnée. «Si on peut, on fera quelque chose, mais je n’y crois pas beaucoup», souffle Marc Zago, le président du syndicat d’initiative de la commune.
Des budgets impossibles à monter
Le Picadilly, grand rassemblement de trois jours qui a lieu tous les ans le deuxième week-end d’août sur la prairie de l’écluse de Stadtbredimus, a lui aussi été annulé. «La sécurité et la santé des bénévoles et des plus de 20 000 visiteurs est une priorité. C’est pourquoi, et compte tenu du fait qu’une évolution précise de la situation jusqu’au mois d’août est difficilement prévisible, nous avons pris la décision d’annuler cette édition», expliquait le communiqué envoyé la semaine passée.
Pour autant, les organisateurs ne veulent pas sombrer dans la déprime. Jeudi matin, ils se sont rendus à la cave coopérative de Vinsmoselle à Wellenstein pour déguster le Picadilly de l’année, ce vin pétillant à base de vin blanc et de cassis qui fait la renommée de l’évènement. «Nous allons quand même en produire quelques bouteilles, mais beaucoup moins qu’une année normale, explique la vice-présidente du syndicat d’initiative Steff Marx. Nous ne savons pas encore exactement comment, mais nous voulons donner la possibilité à ceux qui en dégustent chaque année d’ouvrir une bouteille même cet été !»
Livraison, drive-in… différentes solutions sont à l’étude, mais aucune n’est encore définitivement arrêtée. Ce qui est acté et clairement affirmé, par contre, c’est que «nous ne laisserons pas tomber les fans de Picadilly !» sourit-elle. Le message de l’annulation de la fête annonçait même déjà la création d’un Picadilly@home, dont les contours sont en train d’être définis. «Nous y travaillons, nous avons des idées et il faudra que l’on voit ce qu’il sera possible de mettre en place», avance Steff Marx.
Au mois de septembre, cette fois, l’enchaînement des célébrations bacchiques se poursuit normalement par la fête du Raisin et du Vin de Grevenmacher. Elle devait avoir lieu cette année du 11 au 13, mais les organisateurs viennent d’annoncer son report à l’année prochaine. «C’est bien triste, mais nous n’avons pas le choix», regrette le vice-président du Syndicat d’initiative de Grevenmacher, Alain Goedert. «Il y a tellement de personnes qui viennent qu’il faut savoir être raisonnable, ajoute-t-il. Et puis, boire du vin avec un masque…»
Le syndicat a bien réfléchi à élaborer une version allégée de la programmation qui accueille chaque année une soixantaine de groupes folkloriques et musicaux, mais la tâche était impossible. Et puis, monter un budget de 200 000 euros était insurmontable cette année. «Beaucoup d’entreprises sponsors, des grandes comme des petites, sont à l’arrêt. Comment leur demander de nous soutenir alors qu’elles-mêmes n’ont pas de revenus ?» soulève Alain Goedert.
Même en septembre, ce sera dur
Du coup, c’est acté, Jessica restera la Reine du Vin une année supplémentaire, car c’est lors de ce rendez-vous que le couronnement a lieu. «C’était la meilleure solution, soutient le vice-président. Lors d’une année normale, la reine participe à une soixantaine d’évènements, alors que là, elle n’en a fait que deux ou trois. Les quatre princesses ont toutes été d’accord pour que Lee, la prochaine reine, reçoive sa couronne lors de l’édition 2021.»
Le week-end suivant (du 18 au 20 septembre), c’est traditionnellement au tour de la commune de Wormeldange de faire la fête lors du Riesling Open. Les vignerons de toute la commune (donc Ahn et Ehnen également) ouvrent leurs portes pour rendre tous les honneurs au roi des cépages. Cette année, il y a très peu de chances pour que tout se passe comme d’habitude. «Nous prendrons une décision la semaine prochaine, car, aujourd’hui, c’est difficile à dire : il y a des changements tous les jours… indique le bourgmestre Max Hengel. Nous trouverons une solution avec les vignerons.»
À l’heure actuelle, la tendance est d’annuler la fête au cours de laquelle a lieu le couronnement de la Reine du Riesling, mais d’attendre encore un peu avant d’annuler les portes ouvertes chez les vignerons. Si jamais elles étaient règlementairement possibles, certains aimeraient les maintenir quand d’autres ont déjà prévenu qu’ils ne seraient, de toute façon, pas partants…
Il est donc peu probable que l’on puisse déguster les vins de la Moselle assis sur des bancs posés dans les cours des domaines et sur les places de village cet été. Mais il serait trop bête de se priver de ces crus pour autant. Les vignerons se décarcassent pour livrer à domicile tous leurs clients en respectant scrupuleusement toutes les consignes. Ne vous privez pas, vous vous ferez plaisir et vous soutiendrez un secteur qui en a bien besoin !
Erwan Nonet
«Il faut continuer d’y croire !»
La Hunnefeier de Schengen est la dernière fête à avoir lieu dans la Moselle, puisqu’elle célèbre la fin des vendanges. Marc Zago, le président du syndicat d’initiative de Schengen, veut encore y croire.
Avez-vous déjà pris une décision sur la tenue ou l’annulation de la Hunnefeier ?
Marc Zago : Elle se déroule toujours le troisième week-end d’octobre, alors on va attendre un peu pour voir l’évolution de la situation en espérant pouvoir organiser quelque chose. Mais même si on a le droit, que le gouvernement nous l’autorise et que la commune est d’accord, nous ne pourrons sûrement pas faire une aussi grande fête que d’habitude. Nous avons besoin d’un à deux mois pour tout mettre en place et nous ne les aurons certainement pas. Une fête un peu plus petite serait sans doute plus raisonnable. On pourrait, par exemple, ne pas organiser le marché aux puces, mais garder les stands des vignerons, les food trucks et un peu de musique. D’habitude, nous accueillons 6 000 à 8 000 personnes, mais je n’imagine pas ça cette année. Et même si nous avons toutes les autorisations, je pense qu’un certain nombre de personnes n’oseront pas encore participer à une fête populaire.
Vous êtes donc relativement optimiste et vous continuer d’y croire !
Il le faut ! Je suis d’ailleurs content que l’Iron-Man de Remich qui devait avoir lieu le 14 juin soit repoussé au 11 octobre : cela nous laisse de l’espoir ! Si les triathlètes ont le droit de concourir à cette date, je ne vois pas pourquoi nous n’aurions pas le droit d’organiser notre fête. Et puis, je vais vous dire, je suis président du syndicat d’initiative depuis le mois de janvier seulement et je passe mon temps à tout annuler. Alors, sincèrement, je voudrais bien faire autre chose ! Personnellement, j’ai besoin de rencontrer du monde et j’ai hâte de retrouver un rythme normal.
Vous n’organisez pas que les fêtes à Schengen, mais aussi les marchés. Qu’en est-il ?
Ils ont lieu tous les premiers mercredis du mois. En avril, nous l’avons annulé, mais nous l’organiserons à nouveau dès le mois de mai, avec quelques modifications pour que les règles soient bien respectées. Par exemple, nous n’installerons pas notre stand où l’on peut boire un verre et manger un morceau sur les tables et les bancs. On pourra acheter les aliments, mais pas consommer sur place.
Schengen est également la commune européenne par excellence, mais en ce moment, comment vivez-vous le fait d’être bloqué à toutes les frontières ? C’est incompréhensible et cela m’attriste énormément. On punit les gens alors que le virus n’a que faire des frontières ! J’ai peur que le confinement laisse des traces plus durables que ce que l’on pourrait penser. Ce serait dramatique.