NOERTZANGE Le couple de cigognes blanches, fidèle au Luxembourg depuis 2013, est revenu cette année encore. Sur quatre naissances, deux cigogneaux se portent bien.
Le couple de cigognes blanches qui vient traditionnellement nicher dans la vallée supérieure de l’Alzette, à Noertzange, aurait pu être brisé cette année.
«La femelle est arrivée de façon très précoce, dès fin février», raconte Patric Lorgé, ornithologue de natur&ëmwelt, qui suit ces oiseaux depuis des années. Début mars, elle a été rejointe par un mâle, mais pas le sien. Heureusement, quand le maître des lieux a rejoint à son tour l’emplacement en mars, il a chassé son rival. Les amoureux ont pu retrouver leur plénitude dans leur nid commun, caqueter ensemble et reprendre leur histoire là où ils l’avaient laissée avant la période de migration l’été dernier.
Quelques semaines plus tard, début avril, la maman cigogne a pondu quatre œufs. Le 23 avril, le jour de la mort du Grand-Duc Jean, les petits cigogneaux ont été vus pour la première fois.
Un doute subsiste. Est-ce vraiment le couple habituel? «Vraisemblablement», assure Patric Lorgé. Mais la femelle n’étant pas baguée, impossible d’en être certain.
Pourquoi la femelle est-elle venue si tôt cette année? Est-ce à cause des beaux jours qui étaient précoces? «Difficile à dire. Pour qu’elle arrive aussi tôt, c’est certainement qu’elle a passé l’hiver en France, peut-être en Alsace, répond l’ornithologue. Car, en Alsace, les cigognes sont sédentaires.»
Victimes du froid et de l’humidité
Si l’histoire de la femelle reste mystérieuse, on en sait davantage sur le père. Celui-ci est né il y a sept ans dans la région de Bade-Wurtemberg (Allemagne). C’est un oiseau sauvage.
Malheureusement, quelques jours après la naissance des quatre cigogneaux, le temps est devenu très pluvieux. «S’il fait trop froid et trop humide, c’est très dangereux pour les bébés cigognes, prévient le spécialiste des oiseaux. Surtout qu’il s’agit d’un nid ouvert, sans branches pour les abriter des éléments et du froid. Ils sont à la merci de la météo.»
La pluie qui s’est violemment abattue sur le pays pendant plusieurs jours a été fatale pour deux cigogneaux de la nichée. Si les deux autres sont désormais plus costauds, il faut tout de même souhaiter qu’il n’y ait plus d’épisodes aussi froid et humide cette saison.
Si tout va bien, la famille de quatre individus devrait s’envoler pour l’Afrique ou un autre territoire d’ici la fin juillet ou août. Impossible de savoir si les observateurs reverront alors un jour les cigogneaux : «La première année, le petit reste en Afrique, explique Patric Lorgé. L’année suivante, il reste dans le sud de l’Europe et ce n’est qu’au bout quatre ans qu’il est en âge de créer leur nid et de se reproduire. Et il ne revient pas forcément nicher là où il est né. Les cigognes que nous avons eues jusque-là provenaient de nichées qui se situent entre 200 ou 240 kilomètres d’ici, de Suisse ou encore de la vallée du Rhin.»
Un couple de cigognes qui revient nicher chaque année depuis 2013 au Luxembourg, c’est déjà une victoire. Car ces oiseaux migrateurs avaient abandonné le pays pendant plus d’un siècle, mais il pourrait y en avoir bien plus. D’autres nids artificiels ont été installés. Un couple s’était d’ailleurs installé près de Bettembourg il y a trois ans, mais il n’est jamais revenu.
Un habitat à améliorer
«Les cigognes trouvent leur nourriture dans des prairies humides et zones inondables, de préférence près d’une rivière avec un cheminement sauvage et des rives plates, indique l’ornithologue. Elles se nourrissent de grenouilles, de vers de terre ou de souris, surtout après le passage des agriculteurs qui ont coupé les herbes. C’est pour cela qu’on les voit souvent suivre un tracteur.» Pour qu’une cigogne s’installe sur un territoire, il faut que toutes ces conditions soient réunies. Or, par exemple, «dans le Roeserbann, un endroit où l’Alzette n’a pas été renaturée et où le lit de la rivière est assez profond, on a vu jusqu’à 14 cigognes dans la prairie pendant les fortes pluies cette année, raconte Patric Lorgé. La zone était provisoirement inondée. Elles ont séjourné quelques jours et sont parties. On peut être sûr que si l’habitat avait été meilleur, plus adapté, certaines seraient restées».
Audrey Libiez