Dimanche sera diffusé au Luxembourg un match pas comme les autres : des pros vont s’affronter à coup d’AK-47 et de fusils à pompe… virtuels! Pour la première fois, les jeux vidéo débarquent au cinéma.
Le sport électronique, en pleine expansion, a fini par atteindre le Grand-Duché. Dimanche sera retransmise, par les cinémas Utopia, la finale mondiale du jeu Counter Strike : Global Offensive. Un «gamer» luxembourgeois nous donne cinq bonnes raisons d’assister au spectacle.
C’est vrai que c’est un sport encore mal connu. Pourtant, des gens gagnent leur vie avec. Il y a deux semaines, à Seattle, il y a eu une grande compétition avec près de 18 millions de dollars à gagner!», sourit Sébastien Thill.
Ce sport, c’est l’e-sport, ou, en bon français, le «sport électronique». Bref, des compétitions de jeux vidéo. Comment ça, pas un vrai sport? «Si, c’est vraiment un sport, car il y a des équipes, des stratégies, des entraînements, des capitaines… Jouer plusieurs heures en restant concentré, c’est vraiment du sport», rétorque ce Luxembourgeois de 25 ans, étudiant en informatique.
L’e-sport est devenu un phénomène mondial, avec ses stars et ses compétitions. Mais il reste encore obscur pour le commun des mortels. Au Luxembourg, le phénomène est encore balbutiant, et les équipes ne se bousculent pas. C’est après quelques recherches que l’on tombe sur la team MTF Gaming à laquelle appartient Sébastien.
Et qui est pratiquement la seule, à l’écouter : «On est la plus vieille, on existe depuis 2005. On voit que parfois d’autres équipes sont créées, puis ils s’engueulent et ça s’arrête», sourit-il.
Cela dit, ce club, qui compte une vingtaine de membres, fait actuellement une pause : «On n’a plus d’équipe en ce moment, à cause des emplois du temps chargés de chacun, mais je pense que dans un an ou deux, on recommencera. Donc moi, actuellement, je joue dans une équipe allemande et autrichienne.»
Son jeu de prédilection est Team Fortress 2, un jeu de tir à la première personne (FPS), où deux équipes s’affrontent pour atteindre un objectif.
Arrivé jusqu’au niveau européen
Mais il participe aussi à d’autres jeux célèbres, comme Counter-Strike, un autre FPS. «La meilleure chose qu’on ait faite avec notre club, c’est de jouer il y a 4 ou 5 ans en première ligue ESL (Electronic Sport Ligue), l’équivalent de la ligue UEFA en football, sur le jeu Counter-Strike. Mais on a perdu.» À cause d’un problème de communication entre les joueurs, explique-t-il.
Son club dispose en effet d’une équipe professionnelle «qui joue dans les hautes ligues» et une autre en loisir. «Moi, j’aspire à devenir professionnel, on va dire», sourit-il.
Les jeux vidéo sont souvent accusés de créer des générations d’asociaux. Pourtant, si les parties se déroulent généralement en ligne, donc, à distance, Sébastien Thill l’affirme : «Je connais assez bien ceux avec qui je joue, et j’ai aussi noué des amitiés.»
Et devenir un pro, au point de gagner sa vie? «Ça me ferait plaisir, mais ça me prendrait aussi trop de temps, et j’aime avant tout l’informatique.»
Cinq raisons de regarder un tournoi d’e-sport :
1. Parce qu’il y a des matches d’anthologie
«C’est clair. Parfois on voit des renversements de situation complètement fous. Mais il peut arriver, au contraire, qu’une équipe domine tellement que le match n’ait plus d’intérêt», constate Sébastien. Une chose est sûre : «C’est un sport de jeunes. Car, à partir de 30 ans, on est déjà trop vieux, les réflexes diminuent.» Merci de nous le rappeler!
2. Parce que c’est très stratégique
«Cela dépend des jeux, mais c’est souvent ce qui est déterminant dans les matches, plus que la technique. Si chacun veut la jouer solo et faire son truc dans son coin, ça ne marchera pas, il faut travailler en équipe, comme dans un vrai sport», explique-t-il. «Moi, je suis un grand fan de stratégie. Mais il y a toujours des exceptions. Par exemple, sur Counter-Strike, on tombe parfois sur des « campeurs », des types qui trouvent une planque vraiment bien placée qui leur permet de tuer tout le monde. Mais on trouve toujours les moyens de les déloger quand même», rit-il.
3. Parce qu’on est chauvin
Au niveau mondial, ce sont la Chine, la Corée du Sud et les États-Unis qui tiennent le haut du pavé. «Pour Counter-Strike, ce sont les Suédois qui sont bons je trouve. Pour Dota2, ce sont les Américains. Et pour Team Fortress 2, ce sont aussi les Américains», constate Sébastien. Et le Luxembourg dans tout ça? «Au Luxembourg, les jeux vidéo sont populaires, comme partout, mais surtout les jeux en solitaire, pas les jeux en ligne», regrette-il. Donc, il va falloir se bouger pour que le Luxembourg puisse lui aussi arriver à un niveau mondial!
4. Parce que les jeux en ligne sont ouverts à tous
Si certains jeux très stratégiques ressemblent à un grand bazar pour les profanes, d’autres sont bien plus accessibles. Counter-Strike, qui sera diffusé dimanche, est par exemple un jeu de tir dont la finalité -anéantir l’équipe ennemie) est limpide. Mais le niveau de stratégie risque d’en impressionner plus d’un. Et la pratique des jeux en ligne est ouverte à tous. «Oui, on peut tout à fait jouer seulement pour s’amuser. Je joue par exemple à un petit jeu simple qui s’appelle Depth, où des plongeurs affrontent des requins. Et on est d’ailleurs en train de battre le top 10 mondial, on a gagné deux fois et perdu une fois.»
5. Parce qu’on peut refaire le match
Qui sont les stars de la plateforme Youtube actuellement? Les gamers! Même au Luxembourg, «il y a un petit groupe de Luxembourgeois qui s’amusent sur Youtube, avec des jeux comme Super Smash Bros», explique Sébastien. Les joueurs et les spectateurs adorent revisionner les matches en ligne, à cause des multiples rebondissements et stratégies qui se prêtent à une analyse d’après-match. «Je préfère jouer que regarder, mais si on a envie de s’améliorer, c’est utile en effet de revoir les matches, les erreurs de stratégie, etc.» Et pour regarder les pros, Sébastien va sur des plateformes de streaming telles que Twitch TV.
Romain Van Dyck