Un nouvel outil digital permet d’apprendre à bien sélectionner les arbres à couper pour une gestion durable des forêts du territoire.
Les amateurs de balades en forêt ont sans doute déjà remarqué les encoches et signes sur certains arbres qui présagent leur prochain abattage. Lors de l’exploitation forestière, forestiers publics et privés sont en effet tenus de couper les arbres qui ont été «martelés», c’est-à-dire marqués au moyen d’un marteau forestier, une sorte de hache munie de l’autre côté d’un poinçon.
«Le problème, c’est qu’on ne tient pas toujours compte de la valeur notamment biologique des arbres que l’on va couper. Certains sont en effet des habitats de chauve-souris par exemple. Or si on les enlève, ces animaux perdent leur habitat», expose Philippe Genot, vice-président de l’ASBL Pro Silva Lëtzebuerg, branche luxembourgeoise du réseau international Pro Silva qui promeut une sylviculture irrégulière, continue et proche de la nature des forêts du territoire.
Pas question pour autant de ne pas prendre en considération le volet économique de l’exploitation forestière, qui a aussi toute son importance. «Ce n’est pas on coupe rien ou on coupe tout : il faut trouver un équilibre.»
Une question d’équilibre
Les défenseurs d’une gestion durable de la forêt aimeraient en effet que la sélection des arbres à couper soit plus réfléchie afin de préserver la biodiversité, tout en respectant l’aspect économique que représente l’exploitation du bois mais aussi le volet social afin que le public puisse continuer à se balader dans une belle forêt, accueillante. Finies donc les zones entièrement déboisées.
À cet égard, l’ASBL Pro Silva Lëtzebuerg a décidé d’installer plusieurs marteloscopes sur le territoire du Grand-Duché, des espaces qui permettent de s’entraîner au martelage dans des conditions réelles grâce à un outil digital.
L’un de ces marteloscopes se trouve dans la forêt de Mersch et a été inauguré mercredi dernier en présence de la ministre de l’Environnement, Carole Dieschbourg. Une équipe de l’European Forest Institute (FSI), qui a mis au point cette méthodologie, est venue y inventorier et numéroter chaque arbre se trouvant sur une parcelle délimitée d’un hectare.
Les forestiers, particuliers et publics, désireux de suivre la formation au martelage, sont alors chargés de sélectionner sur une tablette les arbres de cette parcelle qu’ils estiment vouloir couper. L’application analyse ensuite les choix effectués en prenant en considération les critères économiques, syvicoles, écologiques…
Un marteloscope à Mersch et un autre au Grünewald
«Ce n’est pas toujours facile de savoir quel arbre enlever, de savoir lequel a le plus de valeur marchande et lequel a le plus de valeur biologique. Différents critères valent différents points. Par exemple, un trou de chauve-souris vaut dix points et l’application va calculer le ratio entre la valeur biologique d’un arbre et sa valeur économique. Cet outil permet de prendre conscience de l’impact de nos choix dans la vie réelle», détaille le vice-président de Pro Silva Lëtzebuerg.
Le Luxembourg compte environ 90 000 hectares de forêts. Une soixantaine de forestiers publics et quelque 14 000 propriétaires privés sont amenés à prendre en charge l’abattage des arbres.
En sus du marteloscope de Mersch, un autre a été installé au Grünewald. À terme, le Luxembourg devrait compter cinq parcelles d’entraînement de ce type d’un hectare chacune.
«L’idée est d’installer des marteloscopes à différents endroits pour qu’ils soient représentatifs de nos forêts : il y en aura donc un au Nord, un autre au Sud, un dans une forêt où il y a beaucoup de hêtres et de chênes… L’ensemble du projet devrait être finalisé d’ici la fin de l’année», annonce Philippe Genot.
Tatiana Salvan
Pour apprendre à marteler
Pro Silva Lëtzebuerg organise régulièrement des demi-journées gratuites de formation au martelage sur le marteloscope de Mersch. Au programme de chaque session : une demi-heure d’introduction à l’outil marteloscope, puis 1 h 30 d’exercice de martelage sur site. S’ensuivent 15 minutes d’analyse des résultats individuels et 30 minutes de discussion générale.
En raison des restrictions sanitaires, le nombre maximum de participants à chaque séance de martelage est limité à 8. Pour s’inscrire, rendez-vous sur www.prosilva.lu/fr/events